Ségolène Royal à la BPI : le clash de trop

Par Eric Walther, directeur de la rédaction  |   |  485  mots
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Il est des unions, en ces heures de vote solennel en faveur du texte sur le mariage pour tous, dont il est écrit qu'elles ne pourront jamais fonctionner. Celle de Ségolène Royal avec la BPI en fait indéniablement partie. Le clash que l'ancienne candidate à l'élection présidentielle a provoqué hier à l'issue du conseil d'administration de la banque nouvellement créée (elle l'aurait même quitté en cours, selon certaines sources) en tenant une conférence de presse en solo, n'est pas le premier, et ne sera pas le dernier si un divorce n'est pas prononcé dans les meilleurs délais.

Rappelons les faits : depuis plusieurs jours, Jean-Pierre Jouyet, patron la Caisse des Dépôts, tutelle de la BPI, et Nicolas Dufourcq, son directeur général, se sont employés à cadrer assez clairement les missions de ladite banque. Pour faire simple, elle n'est pas là pour sauver les canards boiteux de l'industrie française, allusion directe à Petroplus ou à Florange, mais pour préparer la « France de 2030 ». De quoi exaspérer la présidente de la région Poitou-Charentes, sauveteuse malheureuse de l'équipementier auto Heulliez, qui s'est emportée en déclarant que la BPI n'était pas là « pour faire du business ni des profits ». Après tout, Ségolène Royal a le droit de dire et penser ce qu'elle veut. Sauf qu'elle est vice-présidente de cette BPI,  dont François Hollande a fait l'un des fers de lance de son programme de compétitivité pour l'industrie française.

Un parachutage difficilement digéré par Jean-Pierre Jouyet

Dans n'importe quelle entreprise, l'un ou l'autre des deux camps aurait été démis ou aurait pris ses cliques et ses claques dans les meilleurs délais. La BPI n'est pas une entreprise comme les autres, direz-vous. Justement ! Elle est née dans la douleur, son statut est complexe, elle doit regrouper des entités qui ne s'adorent pas forcément comme Oseo, le FSI et CDC Entreprise, et intégrer la voix des régions qui se sont fait un rien dépouiller de ce qu'elles estimaient être un peu leur bébé. Pas simple. Certains, un rien naïfs, avait vu dans le parachutage de Ségolène Royal un mal nécessaire pour faire parler la société civile et politique dans ce repaire de technocrates. Après tout, pourquoi pas ? Même Jean-Pierre Jouyet, ami historique du couple Royal-Hollande avait fini par digérer le morceau. C'était sans compter l'appétit d'une vice présidente pour micros et caméras. Pour exister. Les optimistes se rassureront en disant qu'elle peut toujours parler, sa voix ne porte pas bien loin. Les autres se diront que ce n'est pas le moment de laisser prospérer un nouveau foyer d'incohérence dans un appareil d'Etat qui n'en a vraiment pas besoin. Et ils n'auront pas tout à fait tort.