Le devoir d'innover

Par Jean-Christophe Tortora  |   |  569  mots
Au lendemain de la victoire du Front national aux élections européennes, La Tribune compte prendre part à l'urgence d'un renouveau démocratique. Par Jean-Christophe Tortora, directeur de La Tribune.

Inutile de pleurnicher sur le "séisme" des résultats de l'élection européenne : les électeurs ont adressé un message clair de défiance à l'égard du gouvernement, des deux grandes formations politiques et de tous ceux qui construisent ou dirigent une Union européenne qui ne convainc plus personne. Ce n'est pas l'idée européenne qui est mise à mal, tous les sondages le montrent, mais ce qu'en ont fait les responsables politiques et technocrates depuis une vingtaine d'années.

 

Impuissance politique

L'Europe, créée sans les peuples, a continué de se construire sans eux. Son logiciel, le traité de Lisbonne, a fini de verrouiller cette absence de démocratie en gravant dans le marbre les principes communs d'une gouvernance automatique, basée sur des indicateurs macro-économiques absurdes et illisibles par les citoyens. La machine infernale s'est mise en marche et la succession des grands partis conservateurs ou sociaux-démocrates, servant la même politique économique et sociale, est devenu le triste spectacle de l'impuissance politique et démocratique. Dès lors à quoi bon voter, sinon pour ceux qui, malheureusement, sont les seuls à tenir un discours audible sur l'inanité de ce système...

Alors que faire ? Le vernis consensuel européen des grands partis commence à craqueler. C'est l'heure des frondeurs et des longs couteaux. Mais la recomposition des forces politiques, avec un FN fort, va être longue. L'UMP toujours prête à se ressouder derrière les thèmes rebattus de la sécurité ou de l'immigration est en retard d'un train. Le parti de Marine Le Pen a compris que c'est sur les thèmes de l'économie, de la sujétion aux marchés financiers, du diktat de l'Europe de Merkel et de Bruxelles ou du traité transatlantique qu'il peut ramasser la mise à double titre : ces sujets parlent aux Français et ils divisent profondément les deux grands partis. Les cicatrices de Maastricht et Lisbonne, pansées régulièrement, sont rouvertes et il faudra du temps pour guérir - ou autopsier - les deux grands corps malades.

 

Un renouveau démocratique régional 

Mais avec un Front national en tête de ce scrutin européen, pas question de baisser les bras ou d'attendre que ces appareils se remettent en marche. Il faut agir : ce sont les régions qui doivent prendre le relais de l'innovation démocratique, sociale et économique. Les discussions sur le mille-feuille territorial peuvent sembler provinciales ou austères. Elles sont pourtant l'occasion de reprendre la main sur le logiciel du pays. Les métropoles, dont les entreprises et les élus sont à la fois tournés vers leur territoire et vers l'international, sont un lieu possible de renouveau démocratique.

"La Tribune", qui suit de plus en plus près l'innovation et l'impact du numérique sur la société, l'économie et l'entreprise, sait que l'avenir se joue aujourd'hui dans les territoires, loin des appareils parisiens ou bruxellois. Dans la construction de villes intelligentes qui remettent le citoyens au cœur des décisions, dans les incubateurs de start-ups, dans les laboratoires de R&D des grandes entreprises, dans l'économie sociale et solidaire, dans les nouvelles formes d'échange, de monnaie et de commerce local ou global. Plus que jamais, nous sommes convaincus que c'est le rôle de la Tribune d'encourager ce renouveau, qu'il soit technologique, économique, social, démocratique... en un mot politique.