Pour Trump, l'Europe existe-t-elle ?

Par Robert Jules  |   |  624  mots
Donald Trump, lors de sa campagne, a déclaré vouloir remettre en cause nombre d'accords et d'engagements entre son pays et l'Union européenne - même sa participation à l'Otan.
Dans la vision du monde de Donald Trump, l'Union européenne est reléguée à l'arrière-plan. Mais a-t-il vraiment tort?

Le Brexit l'avait déstabilisée, l'élection de Donal Trump la paralyse. L'Union européenne (UE) avait perdu un membre, elle perd désormais une boussole, tant il y a un monde entre Obama et le nouvel élu. On attendait une position commune forte du Vieux Continent, on a eu les formules convenues : Donald Tusk et Jean-Claude Juncker invitent le 45e président des Etats-Unis pour tenir un sommet US-UE « dès que cela lui conviendra ». Un tel attentisme peut se révéler dangereux pour une Union déjà affaiblie par les divisions et le scepticisme de citoyens européens de plus en plus tentés par le repli sur le cadre national.

Le dangereux attentisme européen encourage le dédain de Trump

Une position forte aurait pu au moins rappeler que les efforts réalisés jusqu'à maintenant seront clairement défendus, notamment par rapport aux déclarations du candidat Donald Trump remettant frontalement en cause l'action des pays de l'UE : l'accord international sur le climat, pour lequel l'UE -et notamment Paris- n'ont pas ménagé leurs efforts ; l'accord sur le nucléaire militaire avec l'Iran qui avait annulé la plupart des sanctions économiques à l'égard de Téhéran ; le fonctionnement de l'Otan, notamment son financement ; l'Ukraine, où les Européens pourraient faire les frais d'un réchauffement bilatéral américano-russe ; les négociations sur le TTIP (le traité commercial entre les deux parties), même s'il est loin de faire l'unanimité en Europe. Cette dévalorisation du rôle de l'UE montre le peu de cas qu'en fait Donald Trump dans sa vision du monde.

2017, une année d'élections à risques dans toute l'Europe

L'attentisme européen est d'autant plus dangereux que le calendrier électoral joue contre l'UE. Les pays les plus importants, économiquement et diplomatiquement parlant, vont en effet traverser une zone de turbulences. 2017 sera une année électorale majeure tant en France qu'en Allemagne. Angela Merkel n'a toujours pas annoncé si elle serait candidate à un quatrième mandat, celui de trop ? Sa cote de popularité baisse, elle est contestée au sein même de son parti, la CDU, et doit faire face à un fort courant eurosceptique au sein de la population. En France, le président Hollande, qui semble vouloir se représenter, bat des records d'impopularité. Son bilan économique ne plaide pas en sa faveur. Sans compter que la France va être scrutée car, fait inimaginable il y a encore peu, elle court le risque d'être le troisième domino à tomber suivant la logique « populiste » en élisant Marine Le Pen. En Italie, le président du conseil Matteo Renzi joue son poste le 4 décembre, lors du référendum sur le projet de réforme constitutionnelle. Quant à l'Espagne, elle est restée 9 mois sans véritable gouvernement avant de voir le retour de Mariano Rajoy, symptôme d'une crise profonde du système politique. Quant au Royaume Uni, il compte bien renouer comme au bon vieux temps ses relations avec les Etats-Unis pour peser dans ses négociations avec ses futurs ex-collègues.

Si elle veut peser, l'Europe doit sortir de sa passivité diplomatique

Le pire pour l'Union européenne serait de temporiser, gagner du temps comme d'habitude, en espérant que l'entourage de Donald Trump l'oblige à revenir à des considérations plus réalistes - autrement dit, faire le contraire de ce qu'il a promis. Il conviendrait au contraire que l'UE prenne son destin en main. Si elle veut peser réellement sur la scène internationale, elle doit rapidement inscrire à l'ordre du jour une véritable diplomatie et, surtout, une défense commune. Trump pourrait en fournir l'occasion. Mais l'Europe en est-elle encore capable ou en a-t-elle seulement envie ?