Le prix du baril de brut Brent progressait ce mardi en fin d'après-midi de 1,1%, à 84,7 dollars, son plus haut niveau depuis le 27 octobre dernier. Celui du baril de WTI, la référence nord-américaine, s'appréciait de 1%, à 84,7 dollars.
Depuis leur dernier point bas de la mi-décembre, les prix de l'or noir ont progressé de plus de 23%. Et la hausse s'accélère avec un gain de plus de 8% sur un mois.
Tensions au Moyen-Orient
Sur les marchés à terme, les investisseurs s'inquiètent de la montée des tensions géopolitiques dans la région du Moyen-Orient après le bombardement de l'ambassade de l'Iran en Syrie par l'aviation israélienne qui a tué 11 personnes dont des hauts responsables des Gardiens de la révolution, le fer de lance du régime. Ali Khamenei, le guide suprême du région, a promis que « le régime pervers sioniste sera puni par nos braves hommes ». Ce qui pourrait passer par une intensification des actions des rebelles yéménites Houthis, toujours actifs en mer Rouge, obligeant nombre de tankers à faire le détour par le cap de Bonne-Espérance.
Les cours étaient également soutenus par l'annonce par la compagnie publique pétrolière du Mexique, Pemex, d'un plan de réduction de ses exportations dans les prochains mois, augmentant la crainte de tensions sur l'offre mondiale de pétrole.
Les attaques menées par l'Ukraine sur les raffineries de pétrole russe, en recourant à des drones, ont également réduit la capacité de raffinage pour transformer le brut en essence, diesel et kérosène.
En outre, selon le cabinet d'études Wood Mackenzie, plus de 20% de la capacité mondiale de raffinerie est en risque de fermeture avec la baisse des marges et le poids des taxes carbone imposées pour lutter contre le dérèglement climatique.
Moscou va réduire sa production
Les investisseurs intègrent également dans leurs positions sur les marchés la promesse de Moscou de réduire sa production à 9 millions de barils par jour (mb/j) en juin contre 9,5 mb/j en février, pour se conformer à la politique de quotas de production fixés par l'Opep+ (partenariat entre l'Opep et 10 autres pays dont la Russie), ce qui pourrait faire passer le prix du baril au-dessus des 90 dollars au mois de mai, anticipe la banque américaine JP Morgan, qui prévoit même qu'il atteigne les 100 dollars en septembre si les producteurs non-Opep n'augmentent pas leur production pour compenser le recul. Ce qui risque de ne pas être possible même si les Etats-Unis devraient continuer à pomper à plein régime avec une production qui pourrait même atteindre 14 mb/j cette année, selon la banque Macquarie, dépassant largement les extractions de l'Arabie saoudite et de la Russie.
L'enjeu est d'autant plus important que les Etats-Unis vont voir s'intensifier dans les prochains mois la campagne pour la course à la Maison Blanche entre Joe Biden et Donald Trump. Or, le prix à la pompe pourrait venir s'inviter comme thème dans la campagne présidentielle. Toujours selon JP Morgan, l'administration Biden pourrait éventuellement puiser dans les réserves stratégiques de pétrole pour compenser les baisses de l'Opep et de la Russie. Les analystes de la banque américaine évaluent à quelque 60 millions de barils cette compensation pour éviter une flambée des prix du gallon, qui se rapprochent déjà aujourd'hui des 4 dollars.
Le recours aux stocks commerciaux est d'ailleurs déjà à l'œuvre depuis le début de l'année puisque selon le cabinet McKinsey, ils ont baissé en janvier de quelque 32 millions de barils pour tomber à 4,5 milliards de barils, dont une large part provenant des pays de l'OCDE.
Réduction du niveau des stocks commerciaux
Dans son rapport de mars, l'Opep pointe qu'en janvier ce niveau est inférieur à la moyenne des années 2015-2019, et représente 59,6 jours de consommation, soit 2,4 jours de moins que la moyenne.
Les prix devraient d'ailleurs continuer à être soutenus par la demande mondiale, en raison de l'intensification de la hausse du trafic aérien et routier, et la reprise du secteur de la construction, notamment en Chine et aux Etats-Unis. L'organisation prévoit ainsi que la demande mondiale s'établira en 2024 à 104,46 mbj, soit 2,25 mbj (+2,2%) de plus qu'en 2023, et anticipe encore une augmentation en 2025, de 1,8 mb/j. Signe que la soif de pétrole du monde est loin de s'étancher.