L'Italie, talon d'Achille de l'Europe

Par Robert Jules  |   |  693  mots
Beppe Grillo.
Le 4 décembre, les Italiens se prononceront par référendum sur un projet de réforme de la Constitution visant à donner plus de stabilité à la vie politique du pays. Les sondages donnent le "non" gagnant, faisant planer le risque d'une crise qui pèserait sur l'UE.

L'élection présidentielle en France en 2017 sera-t-elle la prochaine étape de la montée du populisme, avec une victoire de Marine Le Pen? Rien n'est moins sûr. Et puis il y a d'abord le référendum du 4 décembre en Italie, où le parti anti-système de Beppe Grillo, le Mouvement 5 étoiles, a le vent en poupe.

Ce jour-là, les Italiens doivent se prononcer sur le projet de réforme de la Constitution. Présenté par le président du Conseil, Matteo Renzi, ce projet vise à remodeler les règles qui régissent la vie politique de la Péninsule, en supprimant le paritarisme dans les deux chambres, en réduisant le nombre de sénateurs de 315 à 100, et en baissant le coût du fonctionnement des institutions. En outre, une nouvelle loi électorale doit être mise en place pour assurer davantage de stabilité à une majorité et éviter les « combinazioni » qui ont caractérisé durant des années la vie politique italienne et fragilisé les gouvernements.

L'engagement de Renzi

Matteo Renzi, en poste depuis 2014, se dit prêt à démissionner en cas de rejet, faisant de la consultation un vote en faveur de son action. Or, aujourd'hui, selon les sondages, le « non » l'emporterait largement avec plus de 10 points d'avance, montrant que les Italiens sont sceptiques sinon mécontents de la politique menée depuis 2 ans.

Il n'est pas sûr que Matteo Renzi puisse inverser la vapeur en si peu de temps. D'autant qu'il doit composer avec Bruxelles qui lui a mis le bonnet d'âne de la zone euro pour son projet de budget 2017. Il ne respecte pas, par exemple, les engagements en matière de déficit public (2,3% du PIB pour un objectif de 1,8% maximum). La Commission, impatiente, a annoncé qu'il n'y aurait pas de nouvelle dérogation, et lui a demandé de revoir sa copie.

Une aubaine pour le "Mouvement 5 étoiles"

La chute de Renzi pourrait donc être une aubaine pour le « Mouvement 5 étoiles », taxé de parti populiste. Mais ce dernier est-il prêt à gouverner ? Et avec qui ? Les vieilles règles perdurant, la composition d'un nouveau gouvernement risque d'être compliquée. Paradoxalement, la faiblesse du président du conseil pourrait être demain sa force. Faute de mieux, la classe politique italienne pourrait reconduire le sortant, comme on l'a vu en Espagne, sur fond de crise rampante.

La réticence populaire à l'égard du projet Renzi est liée également à l'économie. La croissance reste poussive, inférieure à 1%, le chômage élevé, supérieur à 11%, avec un taux pour les moins de 25 ans qui frôle les 50%. Et même l'excédent budgétaire primaire est prévu de se réduire, de 2,8% du PIB prévu en 2016 à 2,1% en 2018. Quand au déficit public, il reste plombé par le poids d'une dette souveraine qui représente 133% du PIB, la plus élevée de l'UE après celle de la Grèce.

Or cette situation perdure depuis le début de la crise de la dette dans la zone euro. Les Italiens ont vu défiler nombre de présidents de Conseil qui devaient relancer l'économie, notamment grâce à la mise en place de « réformes structurelles » réclamées par Bruxelles, selon le mantra habituel. D'où leur scepticisme qui ne date pas d'hier.

Les Italiens méfiants à l'égard de Bruxelles

Car contrairement aux Espagnols, aux Grecs ou au Portugais, il est vrai avant la crise, les Italiens sont toujours restés méfiants à l'égard de l'UE, comme a pu l'illustrer leur choix régulier en faveur d'un Silvio Berlusconi. Selon le dernier Eurobaromètre, ils ne sont aujourd'hui que 38 % à avoir une image positive de l'UE et sont 25% à en avoir une image négative, un des taux les plus élevés (21% pour la France et 17% pour l'Allemagne) du Vieux continent.

Le risque d'une montée importante du mécontentement à l'égard de l'Union européenne au  sein de la troisième puissance économique de la zone euro est réel et doit être bien mesuré par les leaders européens. Après le Brexit, il n'est pas sûr que l'UE y survivrait en l'état.