Taxe climat : à quelles conditions transformer l'essai ?

Par Agnès Michel  |   |  666  mots
Agnès Michel, pôle Vert, Terra Nova | DR
Récemment instituée, la contribution climat énergie peut amener de vrais changements dans les comportements. Mais sous certaines conditions. Par Agnès Michel, pôle économie Verte de Terra Nova

 

Présenté le 25 septembre , le budget 2014  était particulièrement attendu : budget clé du quinquennat, il incarne les grandes lignes de la politique du gouvernement. Parmi les premières mesures annoncées par Jean-Marc Ayrault, la création d'une contribution climat énergie, mécanisme essentiel pour répondre à nos engagements de lutte contre le changement climatique, est LA mesure emblématique du quinquennat.

Encore insuffisamment comprise, la contribution énergie climat a le potentiel politique de constituer un précédent historique et d'incarner, à l'étranger, un véritable modèle. Le contexte s'y prête : dans les derniers scénarii du GIEC, dont la vision est toujours plus sombre si rien n'est fait pour limiter les émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial, la pression s'accentue sur la France pour qu'elle mette en place avec détermination les instruments lui permettant de remplir ses engagements.

Relancer l'économie tout en répondant aux impératifs écologiques

Or, en ces temps de crise économique, de plus en plus de pays rechignent à engager leur économie dans une démarche environnementale qui serait contraire à la croissance. Pourtant, de nombreux économistes ont montré qu'il existait des instruments de politiques publiques capables de relancer l'économie tout en répondant aux impératifs écologiques. Terra Nova, a montré constamment, depuis plus d'un an, comment résoudre les profondes contradictions dans lesquelles la transition énergétique nous plongera, à court et à long terme.

A cet égard, l'un des instruments les plus efficaces est celui de la fiscalité écologique, et en particulier la contribution énergie climat qui devrait être progressivement mise en place dans les trois prochaines années.

Pour un vrai bouclier énergétique

Pour autant, son impact sur les comportements des acteurs économiques sera d'autant plus fort que le signal-prix ainsi délivré encouragera les investissements nécessaires à l'amélioration de l'efficacité énergétique et, partant, au développement des énergies renouvelables. Il faudra aussi accompagner la montée en charge de la contribution climat énergie par des mesures sociales avec l'instauration d'un vrai bouclier énergétique pour tous les ménages modestes, quel que soit leur mode de chauffage.

Il sera également nécessaire que, dans ses modalités, cette taxe tienne compte des mécanismes existants, tel que le mécanisme européen d'ETS qui prévoit une taxation des émissions de carbone: les plus gros émetteurs devraient se voir imposer une taxe réduite du montant des ETS.

Il faudra enfin  intégrer les effets de la compétition mondiale sur nos entreprises en fixant comme priorité l'obtention d'un accord du plus grand nombre de pays européens sur une taxe similaire. Ou encore, en prévoyant que soient déductibles de cette taxe d'éventuelles taxes déjà acquittées dans le pays d'origine des produits importés, incitant ainsi chacun de nos partenaires à mettre en place une fiscalité climat.

Réformer par ailleurs la fiscalité du diesel

Par ailleurs, la contribution climat énergie ne suffira pas pour lutter contre le changement climatique et répondre aux enjeux de santé publique soulevés par les émissions de particules ou d'oxydes d'azote liées au diesel, au charbon ou à l'artificialisation des sols. Il faudra donc examiner la faisabilité d'une réforme de la fiscalité du diesel avec la suppression de la niche fiscale dédiée qui coute aujourd'hui 7 milliards d'euros à l'État. Il pourrait ainsi être proposé de mettre en œuvre cette réforme de façon progressive pour préserver le pouvoir d'achat des ménages les plus pauvres et permettre aux entreprises du secteur automobile d'anticiper la mutation industrielle en résultant.

Il reste que, en annonçant la mise en place de la contribution climat énergie, le gouvernement a franchi un premier pas en faveur d'un système économique durable qui allie l'impératif écologique à la contrainte économique. C'est un bon début.

 

*Agnès Michel, consultante en ingénierie financière durable et les pôles économie verte et énergie de Terra Nova.