Accord PSA-DongFeng ? La Chine veut des contreparties

Par Jean-François Dufour  |   |  637  mots
Jean-François Dufour, président de Chine-Analyse, revient sur les conditions d'un possible accord PSA-DongFeng | DR
Si l'entrée de Dongfeng au capital de PSA est très probable, les autorités chinoises cherchent à savoir avant de se décider ce que cela peut vraiment rapporter. Tour d'horizon des conditions de cet accord, par Jean-François Dufour, président de Chine-Analyse.

 

La Chine a largement les moyens d'investir à l'étranger, et de s'offrir une part importante de PSA. Pour autant, le pays, engagé dans une stratégie d'investissements à l'étranger sur tous les fronts, et dans une multitude de secteurs, veut des investissements rentables. Non pas en termes financiers - la particularité des investisseurs chinois est précisément de pouvoir regarder sur le long terme. Mais en termes de bénéfices stratégiques - en l'occurrence, de transferts technologiques.

 

Des précédents malheureux

La question est d'autant plus sensible, que la Chine n'a pas que de bons souvenirs en la matière avec la France.

Il y a dix ans, deux opérations françaises symboliques faisaient partie des toutes premières tentatives d'internationalisation de l'industrie chinoise. Lorsque le groupe chinois TCL rachetait coup sur coup les téléviseurs Thomson et la branche téléphones portables d'Alcatel, ces deux acquisitions paraissaient susceptibles de le propulser au firmament de l'électronique grand public.

Dans les faits cependant, les deux opérations se solderont par des échecs retentissants. Leurs cibles révèleront des faiblesses technologiques, aggravées par une gestion chinoise alors peu accoutumée à l'international.

 

Une stratégie qui a évolué

Echaudée par des échecs de ce type, la Chine a fortement fait évoluer sa stratégie d'investissement industriel à l'étranger sur les dix dernières années.

La France en fournit d'ailleurs, à nouveau, une illustration, avec cette fois les deux acquisitions effectuées en 2006-2007 par le chimiste chinois BlueStar.  Rhodia Silicones et Adisseo (ancien Rhône-Poulenc Alimentation Animale), intégrés dans le groupe chinois, lui ont donné les technologies nécessaires à l'ouverture de sites de production majeurs en Chine. Mais ces transferts se sont inscrits dans le cadre de projets industriels qui ont pris soin de maintenir en France les capacités de production acquises, et surtout celles de recherche-développement qui leur sont associées.

 

Construire un projet durable

DongFeng, et surtout le gouvernement chinois qui doit valider et financer l'opération, savent dès lors qu'une coopération avec PSA, pour être porteuse pour l'industrie automobile chinoise, devra s'inscrire dans un projet industriel durable ; qui impliquera financements chinois contre transferts de technologies.

Le cas de Volvo, racheté par le constructeur chinois Geely, constitue un exemple de cette stratégie en deux temps. Au 1,2 milliard d'euros dépensés en 2010 pour l'acquisition elle-même, se sont déjà ajoutés 1 milliard d'euros de prêts, accordés à Volvo par la China Development Bank (CDB, la plus importante des banques « politiques » de Beijing) en 2012. En échange du transfert de technologies à Geely pour le développement de ses propres modèles.

 

Quel coût pour le projet industriel ?

Ce que les autorités chinoises voudront du coup savoir, c'est essentiellement deux choses : d'abord, dans quelle mesure une participation importante mais restant minoritaire permettra réellement des transferts de technologies depuis PSA.

Ensuite, quel sera, par-delà l'acquisition bon marché qui se profile du fait de la situation de PSA, le coût à terme du projet industriel dans lequel s'inscriraient ces transferts, et que devraient financer les banques chinoises.

 

Une décision positive : un bon signe pour PSA

Il faut encore ajouter les données inhérentes à l'attitude des parties tierces - GM pour l'international, et les autres "Majors" chinoises concurrents de DongFeng sur le marché chinois -, et on a alors l'essentiel des données stratégiques que Beijing va s'efforcer de peser avant de prendre une décision sur l'opportunité PSA.

Si cette décision est positive, ce sera bon signe pour PSA. Dans la mesure où cela signifiera que DongFeng a le feu vert, et les moyens, pour financer un projet industriel susceptible de rentabiliser son investissement à terme.

 

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