Les classes moyennes, grandes oubliées du logement

Par Hervé Legros  |   |  677  mots
Il y a quelques semaines, une étude Elabe pour le groupe Alila révélait que six locataires sur dix dépensent un tiers ou plus de leur budget pour leur loyer. (Crédits : iStock)
OPINION. Ces dernières années, pour faire face aux difficultés de logement des classes moyennes dans les agglomérations, des outils aussi prometteurs qu'innovants ont vu le jour. C'est l'exemple du logement intermédiaire, destiné aux ménages pour lesquels le marché privé est trop cher, mais qui ont des revenus trop élevés pour prétendre à un logement social. Une solution encore trop peu exploitée. Agissons donc pour construire plus de logements intermédiaires et permettre à toutes les familles de vivre dans un logement de qualité. Par Hervé Legros, PDG et fondateur du groupe Alila.

C'était il y un an. Dans les territoires, délaissés par tous, un mouvement spontané sans précédent de contestation se levait contre la hausse des prix du carburant et la vie chère. La colère des classes moyennes est celle des Français qui ne s'en sortent plus et qui sont venus l'exprimer avec fracas dans les rues de Paris et dans les métropoles régionales où le coût du logement n'a de cesse d'augmenter.

Mais on ne peut pas évoquer la crise du pouvoir d'achat en France sans s'intéresser à la question centrale - mais trop souvent oubliée - du logement. Pour des millions de Français, accédants ou locataires, la hausse ininterrompue du coût du logement est une plaie ouverte qui pénalise trop fortement le budget familial. Il y a quelques semaines, une étude Elabe pour le groupe Alila révélait que six locataires sur dix dépensent un tiers ou plus de leur budget pour leur loyer. Qui peut trouver ce chiffre raisonnable ? Car dans le même temps nous ne pouvons compter sur un éventuel choc d'offre qui viendrait tirer les prix à la baisse. Depuis deux ans, la tendance générale des chiffres de la construction est en berne, que ce soit en matière de mise en chantier, de construction effective, ou de délivrance de permis.

Outils prometteurs

Ces dernières années pourtant, pour faire face aux difficultés de logement des classes moyennes dans les agglomérations, des outils aussi prometteurs qu'innovants ont vu le jour. En 2014, le logement intermédiaire était créé, destiné aux ménages pour lesquels le marché privé est trop cher, mais qui ont des revenus trop élevés pour prétendre à un logement social. Des objectifs ambitieux avaient d'ailleurs été fixés, de l'ordre de 80.000 constructions par an, et des structures dédiées avaient été mises en place avec des personnalités qui ont fait bouger les lignes à l'instar de Benoist Apparu chez In'li, filiale du groupe Action Logement ou encore CDC Habitat, la filiale de Caisse des dépôts et consignations.

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Cinq années se sont depuis écoulées et nous attendons encore que cette ambition forte se concrétise pleinement sur le terrain. Pour l'heure, sur dix logements sociaux construits, un seul est un logement intermédiaire. Dans des dizaines d'agglomérations, les millions de Français des classes moyennes ne peuvent, hélas, pas s'en contenter. Benoist Apparu lui-même concède que "le commun des mortels ne sait pas que ça existe".

Comment stimuler la production de logements intermédiaires ?

L'année dernière, la loi Elan a fixé des objectifs de construction de logements intermédiaires dans les métropoles. C'est un premier pas que nous saluons... mais malheureusement, ces objectifs demeurent facultatifs.

C'est parce que nous restons au milieu du gué et que nous manquons de détermination que les simples incitations ne fonctionnent pas et ne feront pas décoller la production. Qu'attendons-nous pour tirer profit de nos expériences passées en la matière et de ce que l'abbé Pierre qualifiait « d'honneur de la France », la loi SRU, qui en dépit des débats, enregistre un bilan globalement positif au service notamment de la mixité.

Sur le même principe, je propose de mettre en place des mécanismes d'incitation pour atteindre 20% de logements intermédiaires dans les futurs programmes lancés dans nos métropoles. Concrètement, sur les 5.500 logements construits en 2018 dans la métropole rennaise, 1.100 logements intermédiaires verraient ainsi le jour. Autrement dit, un logement à un prix accessible dans la métropole pour près de 3.000 rennais des classes moyennes.

Agissons maintenant avec détermination pour desserrer la pression qu'exerce le logement sur le budget des classes moyennes. Agissons pour construire plus de logements intermédiaires et permettre à toutes les familles de vivre dans un logement de qualité.

Agissons pour le logement pour tous.