Locations Airbnb : de LR au PCF, 5 sénateurs saisissent le Conseil d'Etat sur le maintien de la niche fiscale

Par Ian Brossat, Max Brisson, Eric Bocquet, Rémi Féraud et Nathalie Goulet  |   |  520  mots
« Bien au-delà des clivages traditionnels, l'affaire est désormais entendue : le développement exponentiel des meublés de tourisme a des effets néfastes sur nos marchés immobiliers locaux », écrivent les parlementaires. (Photo d'illustration) (Crédits : REUTERS/Nigel Roddis)
OPINION - Les loueurs en meublés de tourisme continueront malgré la loi de finances 2024 à bénéficier d'une exonération fiscale. Un manque à gagner gigantesque pour les finances publiques. Par Ian Brossat, sénateur PCF de Paris, Max Brisson, sénateur LR des Pyrénées-Atlantiques, Eric Bocquet, sénateur PCF du Nord, Rémi Féraud, sénateur PS de Paris et Nathalie Goulet, sénateur centriste de l'Orne (*)

De Paris à Biarritz, d'Annecy à Saint-Malo, de l'Orne à Nice, de Cannes à La Rochelle, près d'une centaine de villes, de toutes orientations politiques, ont adopté des réglementations restrictives en matière de location saisonnière.

Bien au-delà des clivages traditionnels, l'affaire est désormais entendue : le développement exponentiel des meublés de tourisme a des effets néfastes sur nos marchés immobiliers locaux.

Les dommages sont multiples : l'accès au logement devient plus ardu, des quartiers entiers se vident de leur âme, les petits commerces de proximité périclitent, et même des écoles doivent fermer leurs portes dans les zones les plus touchées.

David face à Goliath

Cependant, dans cette bataille inégale contre les géants de la location saisonnière, les habitants et leurs élus se retrouvent bien souvent en position de David face à Goliath, notamment en raison des avantages fiscaux dont bénéficient les loueurs en meublés touristiques.

Un propriétaire est aujourd'hui soumis à une pression fiscale plus élevée pour louer son bien à un résident permanent que pour le louer à un touriste de passage. C'est incompréhensible.

Afin d'y remédier, quatre amendements identiques ont été déposés à notre initiative au Sénat en décembre dernier. Ils ont été adoptés en séance publique et le gouvernement les a ensuite retenus dans le projet de loi de finances qu'il a imposé par 49-3. « Par erreur » a-t-on expliqué à Bercy. Il n'en reste pas moins que la niche fiscale était supprimée.

Volte-face le 14 février

Volte-face :  le Bulletin Officiel des Impôts, daté du 14 février, révèle une décision scandaleuse : il indique que les loueurs en meublés de tourisme continueront malgré la loi de finances 2024 à bénéficier d'une exonération fiscale.

Très concrètement, à la veille des Jeux Olympiques, le gouvernement rétablit par la petite porte cette niche fiscale.

Un tel mépris de l'exercice démocratique est inacceptable. Nous le rappelons avec force : on ne vote pas la loi pour ne pas l'appliquer.

Un manque à gagner gigantesque pour les finances publiques

En outre, les nombreux fiscalistes que nous avons consultés sont unanimes : il est impératif que la déclaration d'impôt sur le revenu 2024 soit conforme au texte adopté en décembre.

L'équité fiscale et la préservation de nos finances publiques ne sauraient souffrir de compromis face aux intérêts particuliers.

L'absence de mise en application de la loi de finances est contra legem et contraire à l'intention du législateur. Elle représente, en outre, un manque à gagner gigantesque pour les finances publiques.

Face à cette manœuvre politique déloyale, nous avons décidé de saisir le Conseil d'État au travers d'un recours « pour excès de pouvoir ». Face aux dérives le temps de l'inaction et du laisser-faire est révolu.

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(*) Liste des signataires

  • Ian Brossat, sénateur PCF de Paris
  • Max Brisson, sénateur LR des Pyrénées-Atlantiques
  • Eric Bocquet, sénateur PCF du Nord
  • Rémi Féraud, sénateur PS de Paris
  • Nathalie Goulet, sénateur centriste de l'Orne