Dans le Grand Paris, le secteur du BTP sceptique sur la reprise des travaux

Par César Armand  |   |  626  mots
Trois semaines après le début du confinement, les acteurs franciliens du bâtiment et des travaux publics, ainsi que la présidente régionale de l'ordre des architectes, s'interrogent encore sur la réouverture éventuelle des chantiers.

Après deux semaines d'aller-retours entre le secteur du BTP et le gouvernement, le guide des préconisations est enfin paru dans la soirée du jeudi 2 avril. Sans surprise, l'Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPP-BTP) y appelle les entreprises concernées à "respecter strictement" des consignes de sécurité "pendant toute la période de confinement" voire à "stopper leur activité sur les travaux concernés".

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Le guide du BTP, un "socle commun" et "utile"

Dans le Grand Paris, comme dans le reste du pays, les chantiers se sont arrêtés dès le début du confinement. Aussi, ces conseils élaborés par le patronat, les syndicats et les ministères concernés sont-ils bien accueillis par les représentants franciliens des filières.

"Le guide a un avantage: il correspond à ce qu'il est utile de faire, même s'il sera plus difficilement plus applicable sur les grands chantiers", déclare à La Tribune Jean-Luc Tuffier, président de la Fédération française du bâtiment (FFB) Grand Paris. "C'est un socle commun qui permet d'identifier les mesures à prendre pour amorcer une reprise en toute sécurité et en toute sérénité dès que les éléments seront réunis", corrobore le président de la fédération régionale des travaux publics d'Ile-de-France (FRTP-IDF) José Ramos.

Dans l'attente de masques

Avant de renvoyer les ouvriers sur site, ces acteurs locaux attendent toutefois la livraison de masques. Ces derniers doivent être "obligatoires" dans trois situations, a en effet martelé l'OPP-BTP vendredi dernier: "quand deux compagnons travaillent à moins d'un mètre l'un de l'autre, quand un acteur du BTP intervient chez un client à la santé fragile, et bien sûr quand il se rend chez un client malade."

Si José Ramos (FRTP-IDF) s'en félicite, car il a toujours préconisé le port de masques "a minima" pour les travaux en équipe, Jean-Luc Tuffier (FFB Grand Paris) déclare que son fournisseur habituel est désormais obligé de passer par la Chine, se retrouvant en compétition avec le monde entier.

Scepticisme des entrepreneurs

Outre l'attente de ce matériel indispensable, Jean-Luc Tuffier ne mise pas sur une relance des travaux avant le début voire la mi-mai. "Dans la tête des entrepreneurs d'Ile-de-France, il n'y a pas grand-monde qui veut reprendre", estime-t-il. "Il faudra aussi du gel hydroalcoolique, des caméras de surveillance, des prises de température, autant de procédures qui sont lourdes", insiste l'entrepreneur, lui-même à la tête de 400 salariés.

"Dans l'attente de nouvelles règles sur le déconfinement", José Ramos considère, lui, que la reprise s'amorcera dès la mi-avril. Même après, du fait des installations sanitaires à mettre en ordre, "on ne peut pas dire qu'on travaillera à 100%", ajoute-t-il, citant les mobiles-cantines où il demeurera difficile d'espacer les uns et les autres d'un mètre, ainsi que les salariés qui ont de la température et dont "on ne prendra pas le risque de les faire rentrer".

"Trop tôt" pour les architectes

La présidente du conseil de l'ordre des architectes d'Ile-de-France juge, pour sa part, que la publication des préconisations de l'OPP-BTP ne suffit pas pour reprendre le chemin des chantiers.

"Nous avons l'expérience des pays italiens et espagnols qui ont tout stoppé net quand c'est devenu problématique. Nous ne pouvons pas nous permettre d'accentuer la crise et de submerger les hôpitaux encore plus", relève Christine Leconte pour La Tribune. "Profitons plutôt de cette période pour faire avancer les projets avec une vigilance accrue sur les études techniques et environnementales."