Emploi en Île-de-France : la gauche craint les effets discriminatoires du plan Pécresse

Par Mathias Thépot  |   |  681  mots
La présidente de la région Île-de-France veut imposer des critères de performance aux centres de formation d'apprentis. (Valérie Pécresse, lors de son premier discours de présidente de région, le 18 décembre 2015. Capture d'écran)
Les propositions en matière de formation et d'apprentissage de la présidente de la région Île-de-France Valérie Pécresse (LR) ne passent pas auprès de l'opposition PS du conseil régional.

La nouvelle présidente de la région Île-de-France Valérie Pécresse (LR) a fait de l'emploi l'une de ses priorités. Dans ce cadre, elle a détaillé cette semaine en séances plénières au conseil régional son plan dédié à l'emploi, à la formation et à l'apprentissage, qui font partie des principales compétences de la région. Elle y consacre au total près de 15 % de son budget. Mais Valérie Pécresse estime que sous la précédente mandature, la gauche a délaissé ces sujets, notamment concernant les jeunes. Des propos qui font bondir l'opposition francilienne qui juge que la nouvelle présidente de la région ne propose, au mieux, que de poursuivre les orientations données lors des années précédentes lorsque la gauche était aux manettes.

Des mesures discriminatoires

Certes, le président du groupe PS Carlos Da Silva n'émet pas d'opposition de principe sur toutes les mesures du plan de Valérie Pécresse, comme par exemple la création d'une cellule dont le but sera d'éviter les délocalisations d'Île-de-France, mais d'autres dispositifs sont jugés plus discriminatoires. En premier lieu la mesure qui consiste à « moderniser » les relations avec les centres de formation d'apprentis (CFA) de la région Île-de-France, qui en compte un peu moins de 150.

La présidente de région va en effet signer des contrats de performance avec ces CFA basés sur l'employabilité des étudiants après l'obtention de leur diplôme. Mais l'opposition craint fortement qu'à l'avenir, les soutiens financiers de la région dépendent de ces critères de performance, ce qui induirait des effets discriminatoires. « Cela découragerait automatiquement des CFA d'accueillir les publics les plus difficiles », s'inquiète la conseillère régionale Hella Kribi-Romdhane, anciennement vice-présidente (PS) de la région chargée de la formation et de l'apprentissage.

D'autant que les besoins les plus prégnants en matière d'apprentissage se situent dans les territoires les plus en difficulté. « Il est facile de comprendre que les CFA de Ferrandi - l'école française de gastronomie, située dans le sixième arrondissement parisien-  et la faculté des métiers d'Evry n'auront pas les mêmes taux de réussite », explique-t-elle. Or « on ne peut pas traiter de manière indifférenciée la formation dans des quartiers plus ou moins défavorisés », juge-t-elle aussi.

Confusion entre stages et apprentis

Un autre dispositif inquiète les élus de gauche : le conditionnement des 2 milliards d'euros de subventions régionales aux personnes morales à l'embauche d'un stagiaire ou d'un apprenti. Plus concrètement, si la subvention de la région est inférieure à 23.000 euros, la structure devra embaucher un stagiaire plus de 2 mois. Et si la subvention est supérieure à ce montant, une convention sera signée avec la région définissant le type de contrat (stage, apprentissage ou formation), ainsi que le nombre de jeunes engagé.

Ce dispositif inquiète doublement Hella Kribi-Romdhane. D'une part parce qu'étant à périmètre budgétaire constant, il reviendra à créer une charge supplémentaire pour les petites entreprises, notamment associatives. Et d'autre part, parce qu'il met dans le même panier les stages et les contrats d'apprentissage, qui n'ont en réalité rien à voir. En effet, là où l'apprentissage est souvent considéré comme la meilleure voie vers l'emploi durable pour un jeune, les stagiaires sont à l'inverse souvent utilisés comme une main d'œuvre pléthorique très bon marché par les entreprises.

Cependant, le stage peut aussi jouer un rôle « de tremplin indispensable pour les jeunes cherchant un emploi et une obligation dans de nombreux parcours de formation », justifiait Valérie Pécresse. De fait, la présidente de région mise fortement sur les stages, puisqu'elle compte créer 100.000 stages supplémentaires - en plus des 1,6 million existants- d'ici la fin de son mandat. Et en parallèle, elle souhaite faire passer le nombre d'apprentis sous sa mandature de 80.000 à 100.000. Un objectif qu'elle estime, elle-même, très ambitieux.