Seine-Saint-Denis : Troussel demande "un plan de rattrapage" post-Covid

Par César Armand  |   |  806  mots
Le président du département de Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel, estime qu'il faut quelque chose de "majeur pour que l'économie reparte et pour ne pas aggraver la crise sociale que le virus dessine aujourd'hui". (Crédits : Conseil Départemental de la Seine-Saint-Denis)
INTERVIEW. Au lendemain de la visite présidentielle à Pantin, le président (PS) du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel, appelle à un plan massif et différencié pour aider au redémarrage économique, sanitaire et social.

LA TRIBUNE - Le 93 est le département le plus touché par le Covid-19. Comment interprétez-vous le déplacement le 7 avril du président de la République à Pantin ?

STÉPHANE TROUSSEL - J'ai salué ce déplacement car je le vois comme la reconnaissance de l'action des personnels soignants, de la mobilisation des agents publics et de ceux en première ligne, y compris les caissières, les livreurs et les éboueurs qui sont parfois obligés de prendre les transports en commun et qui pour beaucoup vivent en Seine-Saint-DenisCela a été l'occasion pour moi de dire au président de la République nos besoins en masques, en tests et en moyens divers. Nous nous devons en effet de tenir dans la durée. Dès le début du confinement, le conseil départemental a d'ailleurs décidé d'ouvrir une cuisine centrale ainsi qu'un internat de collège pour les enfants d'aide sociale à l'enfance malade du Covid-19. J'ai également exprimé auprès d'Emmanuel Macron nos attentes pour l'après, et notamment dans quelle situation va-t-on retrouver nos élèves, sachant que l'école à la maison aggrave le décrochage scolaire ? J'ai l'espoir d'un plan de soutien massif et différencié pour aider au redémarrage économique, sanitaire et social. Cette crise a jeté une lumière crue sur le fait que les inégalités tuent, et que ce sont les plus fragiles qui souffrent en premier. Cette France à deux vitesses ne doit plus être celle de l'après coronavirus.

"J'attends des mesures fortes !"

En novembre dernier, le gouvernement lançait un plan intitulé "l'Etat plus fort en Seine-Saint-Denis"...

A l'époque, j'avais déclaré que cela ne pouvait constituer un solde de tout compte et que l'Etat devait aller plus vite, plus haut, plus fort. La fameuse prime de 10.000 euros pour encourager les fonctionnaires à venir s'installer dans notre département : Qu'attendons-nous pour la mettre en place ? J'avais d'ailleurs demandé qu'elle concerne aussi le personnel hospitalier, et pas seulement les policiers ou les enseignants. L'hôpital public souffre particulièrement en Seine-Saint-Denis. Je le répète: j'attends des mesures fortes pour la Seine-Saint-Denis. De toute évidence la crise actuelle qui frappe particulièrement le département démontre que les choses n'ont pas évolué comme on nous l'avait promis.

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 "Il faut agir maintenant !"

La présidente du conseil régional Valérie Pécresse, qui vous a déjà donné 100.000 masques, a, elle, annoncé un "plan de soutien régional renforcé" pour le département, à savoir 40.000 masques supplémentaires distribués aux Covid Centers, 50.000 aux associations supplémentaires aux associations ou encore 12.000 masques pour les hôpitaux. Est-ce un premier pas dont vous vous félicitez?

Toutes les initiatives de l'État, de la Région et des pouvoirs publics en général sont évidemment les bienvenues. Je suis d'ailleurs prêt à travailler main dans la main avec les services de l'Etat, du conseil régional, comme avec les communes et le secteur privé, sans regarder les frontières institutionnelles, les clivages politiques, et bien sûr les responsabilités et les compétences respectives. Il faut agir maintenant si nous voulons mettre en place un plan de rattrapage pour la Seine-Saint-Denis.

"Un grand coup d'accélérateur dans le BTP"

Le département est le plus pauvre mais aussi le plus jeune de France, avec des entreprises qui s'y installent régulièrement. Comment voyez-vous l'avenir économique de la collectivité ?

Il est compliqué de répondre précisément aujourd'hui, mais la solidarité est dans notre ADN et nous avons des capacités de rebond. Si les grandes entreprises bénéficient du soutien des banques et de l'activité partielle qui devraient leur permettre de tenir, ce ne sera pas nécessairement le cas pour les TPE-PME, les auto-entrepreneurs et a fortiori tous les salariés qui vivent de travaux précaires. C'est assez peu connu mais la Seine-Saint-Denis est aussi un des départements de France où se créent chaque année le plus d'entreprises, mais ce sont des structures souvent petites et donc plus fragiles. Il faudra par exemple un grand coup d'accélérateur dans le BTP à travers toute la commande publique, ainsi que dans la rénovation de l'habitat privé indigne, grâce à un soutien massif de l'Agence nationale de l'habitat. De même, des dossiers de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine ne demandent qu'à être encouragés avec des coups de pouce financiers. Toutes ces activités sont autant d'emplois non-délocalisables. Ce sera majeur pour que l'économie reparte et pour ne pas aggraver la crise sociale que le virus dessine aujourd'hui.

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