Régionales 2015 : à quoi ressemblera le grand Nord du Front National ?

Par Geneviève Hermann  |   |  675  mots
Le lendemain de son meeting à Lille, Marine Le Pen rencontrait les chefs d'entreprises de la région.
Tous les sondages placent Marine Le Pen en tête des élections régionales dans le Nord-Pas-de-Calais – Picardie, devant Xavier Bertrand (LR) et Pierre de Saintignon (PS). Une partie du patronat s’inquiète d’une fermeture de la région au monde extérieur.

Tous les sondages placent Marine Le Pen en tête des élections régionales dans le Nord-Pas-de-Calais - Picardie, devant Xavier Bertrand (LR) et Pierre de Saintignon (PS). Ce qui a amené notre confrère La Voix du Nord à prendre position en consacrant sa une du 30 novembre à son inquiétude d'une victoire du FN et à la menace d'une telle victoire sur les échanges internationaux dont profite aujourd'hui l'économie régionale. Une mise en garde faite par Bruno Bonduelle, ex-pdg du groupe alimentaire éponyme et ancien président de la CCI Grand Lille, il y a déjà un mois dans le mensuel économique régional Eco 121.

Aux dires d'un responsable d'une des instances économiques locales, « qu'une figure emblématique du patronat du nord prenne officiellement une telle position n'a pas été du goût de tous les chefs d'entreprises, dont certains adhèrent aux idées du Rassemblement Bleu Marine ». Car l'électorat de Marine Le Pen ne se compte plus uniquement dans les couches populaires qui ont fait son succès à Hénin-Beaumont, premier bastion conquis par le FN.

Repli sur soi économique

Quand on demande à Philippe Hourdain, le président de la CCI Grand Lille, ce qu'il pense d'une présidence FN à la tête de la future région, sa première réaction est de rappeler la situation difficile dans laquelle se trouve déjà ce territoire avec un nombre bien trop important de chômeurs. Pour lui, « la priorité est de travailler tous ensemble, les institutions territoriales et les représentants de l'Etat, quelque soit sa couleur politique, pour tirer partie de la position de cette grande région d'échange ouverte sur le monde - via sa frontière avec la Belgique et sa façade maritime ». En 2014 en Nord - Pas-de-Calais et Picardie, le chiffre d'affaires généré à l'export était de 47,2 millions d'euros. L'économie de la future région pourrait donc souffrir d'un repli sur soi en cas de victoire de Marine Le Pen.

« La création de valeur repose sur les échanges internationaux. Le discours de Marine Le Pen est en déphasage avec l'ouverture sur le monde dont on a besoin », tient à dire Gauthier Vignon, dirigeant d'une startup lilloise. A en croire Luc Doublet, président de l'agence de développement Nord France Invest, « il n'y aura pas de grand changement sur les politiques de contractualisation entre le Conseil Régional et les autres instances de la région ».

Réduction des subventions

Mais les critères d'attribution des aides régionales accordées aux entreprises changeront sans aucun doute, dans la mesure où Marine Le Pen veut réduire les dépenses. Comme elle s'est engagée à ne pas augmenter les taxes, elle le fera en diminuant les subventions. Le projet Troisième Révolution Industrielle, fer de lance de la politique menée en Nord - Pas-de-Calais par le président sortant en matière de transition énergétique en souffrira-t-il ? Marine Le Pen ne le remet pas en cause. Mais pour elle, la priorité est au patriotisme économique. Si elle est élue, « la première mesure qu'elle prendra sera de donner la priorité aux entreprises locales dans les marchés publics régionaux », a précisé Sébastien Chenu, délégué national du Rassemblement Bleu Marine, rencontré à Lille lors du meeting de Marine Le Pen.

Un meeting où la candidate a peu parlé des enjeux régionaux si ce n'est pour dire que « de cette terre féconde peut venir le sursaut national et la reconquête de la France ». Le lendemain matin, elle rencontrait une cinquantaine de chefs d'entreprise dans les locaux du Medef du Nord-Pas-de-Calais. « Au même titre que les autres candidats Xavier Bertrand et Pierre de Saintignon invités précédemment », souligne Frédéric Motte, président du Medef régional. L'après-midi, Jean-Marc Puissesseau, PDG du port de Calais, l'attendait pour une visite de ses installations, à proximité de la « Jungle » où s'entassent des milliers de migrants qu'elle aimerait bien reconduire chez eux.