Droits du foot : Drahi poursuit ses coûteuses emplettes

Par Pierre Manière  |   |  638  mots
Patrick Drahi, le patron d'Altice, maison-mère de Numericable-SFR.
Après s’être offert les droits du championnat anglais le mois dernier, Patrick Drahi a ressorti le chéquier pour s’offrir ceux du FC Porto pour près de 460 millions d’euros. L’homme d’affaires confirme ainsi sa stratégie de convergence entre les médias et les télécoms. Sans se soucier de son énorme dette, qui flirte désormais avec les 48 milliards d’euros.

Le ballon rond a décidément la cote chez Altice. Ce week-end, le groupe de Patrick Drahi (maison-mère de Numericable-SFR en France), a déboursé quelque 457,5 millions d'euros pour s'offrir les droits de retransmission télévisée du FC Porto, un des clubs phares du Portugal, souvent bien placé dans les compétitions européennes. Plus précisément, l'accord a été signé avec Portugal Telecom, l'opérateur historique du pays, qu'Altice a racheté en décembre 2014 pour 7,4 milliards d'euros.

Selon l'AFP, qui cite un communiqué du club aux autorités boursières, le contrat comprend la cession pendant dix ans, à compter de juillet 2018, des droits télévisuels des matchs à domicile du club, l'exploitation des espaces publicitaires du stade. Mais aussi, à partir du 1er janvier 2016, l'espace publicitaire des maillots pendant sept saisons et demie, ainsi que les droits de retransmission de la chaîne Porto Canal pendant douze saisons et demie.

Un moyen de préserver ses abonnés

Cette emplette intervient un mois à peine après qu'Altice a mis la main, au nez et à la barbe de Canal+, sur les droits de la Premier League en France, pour un montant de 300 millions d'euros selon plusieurs journaux. De quoi confirmer la stratégie de convergence entre les médias et les télécoms chère à Patrick Drahi. Dans le sillage de l'essor du très haut débit, celui-ci mise sur les contenus à valeur ajoutée pour ferrer de nouveaux abonnés. Et surtout, les inciter à dépenser davantage que pour leurs seuls abonnements Internet fixe ou de téléphonie mobile.

Si aujourd'hui, la viabilité de cette stratégie suscite le scepticisme de nombreux experts et analystes financiers (beaucoup attendent de voir quels nouveaux « produits exclusifs » pourraient bien voir le jour après l'acquisition récente de BFM-TV, par exemple), l'appétit d'Altice pour le football surprend moins au Portugal. Dans ce pays, contrairement à la France, les clubs ont chacun directement la main sur leurs droits. Ils sont ainsi libres de les vendre au plus offrant, y compris aux opérateurs de télécommunications, qui y voient un moyen de se différencier et de siphonner des abonnés à la concurrence.

Une réponse à NOS, son principal concurrent

Si la somme déboursée par Altice et Portugal Telecom est faramineuse - c'est « plus gros contrat de l'histoire du sport portugais », a déclaré le FC Porto -, elle sonne comme une réponse à son principal concurrent, le câblo-opérateur NOS. Au début du mois, ce dernier a en effet signé un gros chèque pour les droits TV du Benfica, champion du Portugal en titre et rival historique du FC Porto, pour un montant pouvant atteindre 400 millions d'euros sur dix ans.

C'est donc peu dire que le foot est un actif stratégique et un produit d'appel de choix pour les opérateurs télécoms portugais. Et ce, dans un pays ou plus de huit foyers sur dix disposent d'un abonnement à la télé payante. Ce n'est donc pas un hasard si, au mois de novembre, Altice a signé un partenariat avec Cristiano Ronaldo. Le Portugais, attaquant star du Real Madrid et triple Ballon d'Or, va devenir l'ambassadeur de toutes les marques du groupe de Patrick Drahi. Y compris de Portugal Telecom, dont il sera, à n'en point douter, un porte-étendard de choix.

Les marchés demeurent frileux

En Bourse, l'acquisition des droits du FC Porto n'a pas provoqué d'engouement. Loin de là. Lundi, le titre Altice s'est même affiché en léger retrait de 1,44%, à 12,67 euros. Il faut dire que désormais, la dette du groupe s'élève à 48 milliards d'euros... De quoi susciter l'inquiétude des investisseurs. Depuis la fin du mois d'août, le titre a perdu plus de la moitié de sa valeur.