Sécurité, santé, robot vocal, surveillance : comment l'État va utiliser l'intelligence artificielle

Par Sylvain Rolland  |   |  892  mots
L'État veut utiliser les différentes approches de l'intelligence artificielle (analyse sémantique, reconnaissance visuelle, modèles prédictif...) pour améliorer le travail des agents au quotidien, renforcer la relation aux usagers, mieux cibler les contrôles, fluidifier les processus et aider à la décision. (Crédits : Pixabay / CC)
Le secrétaire d'État au Numérique Mounir Mahjoubi a révélé les six projets retenus dans le cadre d'une expérimentation d'État sur l'intelligence artificielle.

L'État se convertit aussi à l'intelligence artificielle. Mercredi 21 novembre, le secrétaire d'État au Numérique, Mounir Mahjoubi, a révélé les six projets sélectionnés suite à l'appel à manifestation d'intérêt lancé en juin 2018 dans le cadre du programme d'investissement d'avenir (PIA). L'objectif : utiliser les différentes approches de l'intelligence artificielle (analyse sémantique, reconnaissance visuelle, modèles prédictif...) à partir des textes, images satellites, photographies, enregistrements audio et vidéos détenus par l'administration ou collectées à l'extérieur, afin "d'améliorer le travail des agents au quotidien, de renforcer la relation aux usagers, de mieux cibler les contrôles, de fluidifier les processus et d'aider à la décision", décline Mounir Mahjoubi.

« L'intelligence artificielle a des impacts bien réels. Elle accompagne les agents au quotidien pour faciliter leur travail et leur permettre de se concentrer sur leur cœur de métier. C'est plus de performance pour un meilleur service rendu aux citoyens."

Au total, 52 projets ont été déposés, avec une forte mobilisation des administrations centrales, opérateurs, établissements publics, services déconcentrés et autres services publics (rectorats, universités, cours de justice, hôpitaux). Six projets ont été retenus pour développer un "POC" (proof of concept ou programme pilote dans le jargon startup). À la fin de cette période de dix mois, la Dinsic (Direction interministérielle du numérique et du système d'information et de communication de l'État) et la DITP (Direction interministérielle de la transformation publique) évalueront l'efficacité de chaque outil à l'aide du retour d'experts, des administrations utilisatrices et des tests utilisateurs, afin de déterminer s'ils ont vocation à être déployés à plus grande échelle.

Détecter les occupations irrégulières des sols, aider la police de l'environnement, détecter les risques sanitaires des restaurants

Dans le détail, les six projets choisis visent à faciliter certains services de l'État dans les domaines de la sécurité, de la surveillance d'activités illégales, du rapport aux usagers et de la santé publique.

Le premier projet utilisera des images satellites et des photographies aériennes pour créer une IA basée sur la reconnaissance visuelle, capable de détecter les occupations irrégulières des sols. L'automatisation par comparaison d'images satellitaires permettra de détecter de nouveaux objets illégaux - caravanes, mobil-homes, bâtis, hangars agricoles, décharges sauvages, constructions illégales - dans des milieux dits "sensibles". L'objectif pour l'État est de passer "moins de temps à détecter les anomalies", et "plus de temps sur le terrain pour effectuer les contrôles pertinents".

Dans le même esprit, une autre IA devrait permettre d'améliorer les contrôles de la police de l'environnement. À l'aide de données environnementales comme celles sur la qualité de l'eau, des modèles prédictifs seront créés pour prédire les contrôles non conformes, ce qui reviendra à passer "moins de temps à effectuer des contrôles qui sont in fine conformes" et se concentrer sur les suites à donner pour ceux qui ne le sont pas.

Toujours dans une optique d'optimisation du temps des agents chargés du contrôle, les commentaires et avis présents sur les plateformes et réseaux sociaux seront moulinés par une IA basée sur l'analyse sémantique afin de détecter les restaurants présentant des risques sanitaires. L'IA reconnaîtra les avis négatifs et établira des probabilités de risques sanitaires potentiels. Elle permettra aux agents de "prioriser les contrôles" pour "perdre moins de temps" à détecter les établissements à risque.

Enfin, pour "mieux protéger les travailleurs, les patients, le public et l'environnement" des risques liés à l'utilisation du nucléaire, une IA va mouliner les 20.000 lettres de suite rédigées après chaque inspection, pour détecter les "points de vigilance" pour un "contrôle plus pointu des zones qui présentent des risques".

Améliorer les traitements post-opératoires, un "robot vocal pour les usagers

Seuls deux des six projets sélectionnés ne portent pas sur l'amélioration des activités de contrôle des agents de l'État, et concernent plus directement les usagers. Le premier vise à utiliser l'IA pour améliorer les traitements post-opératoires, à l'aide des comptes rendus et des dossiers médicaux, qui représentent aujourd'hui des bases de données très volumineuses et très désorganisées.

"Basée sur l'analyse sémantique, l'IA fera l'extraction des concepts médicaux issus des textes libres et structurera les données complexes des dossiers médicaux pour réaliser des résumés standardisés", explique Mounir Mahjoubi.

Les gains espérés sont l'optimisation de la recherche d'information médicale, un gain de temps pour les médecins et l'amélioration de la cohérence des dossiers patients.

Enfin, le dernier projet est la création d'un robot vocal pour répondre rapidement aux usagers du chèque-emploi associatif. À partir des questions récurrentes des associations, l'IA basée sur la compréhension naturelle du langage et une synthèse vocale améliorée, pourra répondre directement à certaines questions ou rediriger vers un interlocuteur plus pertinent s'il s'agit d'une demande plus complexe. L'objectif : gagner du temps sur les appels téléphoniques pour que les conseillers se concentrent sur les questions complexes.