Les tribulations de l’Etat au capital d’Orange

Par Pierre Manière  |   |  564  mots
Emmanuel Macron ne s'interdit pas de vendre une partie des 23% de l'Etat dans Orange.
Alors qu’Emmanuel Macron ne souhaitait pas que l’Etat soit trop dilué au capital d'Orange lorsque l’opérateur historique voulait racheter Bouygues Telecom le mois dernier, il se dit désormais vendeur si le cours remonte suffisamment.

Non, l'état n'a « pas vocation à rester de manière pérenne » au capital d'Orange. C'est ce qu'Emmanuel Macron a affirmé mercredi, à la commission des finances du Sénat. Pour le ministre de l'Economie, l'Etat se montrera « pragmatique » quant à la gestion de ses 23% dans l'opérateur historique.  En clair, il pourrait donc vendre une partie de cette participation le moment venu. « Dès que les conditions de marché sont propices, il faut savoir céder », a précisé le chef de file de Bercy.

Quand ? Pas tout de suite. Emmanuel Macron évoque deux raisons. La première, c'est qu'« il y a aujourd'hui une politique d'aménagement rapide et de déploiement d'un investissement d'infrastructures qui fait que nous sommes aidés en tant qu'actionnaire d'Orange ». De fait, Orange investit actuellement des milliards d'euros pour déployer de la fibre optique et des antennes 4G dans tout le pays. En outre, l'opérateur s'est engagé, à l'instar des autres opérateurs, à en finir avec les zones blanches, où le mobile ne passe pas. Un point jugé crucial par de nombreux élus locaux, qui pestent régulièrement contre cette fracture numérique.

« Une préoccupation patrimoniale »

Secundo, la fenêtre de tir n'est guère favorable pour revendre les titres d'Orange. « Quand on regarde la valorisation des opérateurs après l'agrément d'une quatrième licence [...], il y a eu plutôt une baisse » des cours, rappelle le ministre de l'Economie. Il fait ici référence à l'arrivée de Free Mobile en 2012, qui a allègrement cassé les prix pour se faire une place sur le marché. Ce qui a plombé, pendant de longues années, les revenus des Orange, Bouygues Telecom et SFR.

En somme, Emmanuel Macron a ici détaillé ses propos tenus dans le JDD fin avril. Le ministre y avait déclaré que « sur Orange, nous avons une préoccupation patrimoniale comme actionnaire, et sectorielle comme régulateur pour l'investissement dans les infrastructures télécoms ».

6 milliards d'euros à trouver

Toutefois, il n'a pas toujours eu ce positionnement. Lorsqu'Orange a tenté de racheter Bouygues Telecom au mois de mars, Emmanuel Macron s'inquiétait de l'arrivée de ce dernier au capital de l'opérateur historique. Concrètement, il ne souhaitait pas que la participation de l'Etat soit trop diluée. Et pour ce faire, il a fixé des conditions extrêmement restrictives à Bouygues Telecom. Ce qui a, in fine, largement participé à faire capoter l'opération.

Ce qui est sûr, c'est que si Bouygues Telecom, qui briguait 15% d'Orange, était rentré au capital de l'ex-France Télécom en tant que deuxième plus gros actionnaire, cela aurait forcément limité la marge de manœuvre de l'Etat pour se désengager. Sauf, bien sûr, à laisser Martin Bouygues prendre les commandes du numéro un des télécoms en France... C'est la raison pour laquelle dans le secteur, certains pensent qu'Emmanuel Macron était plus qu'hostile à cette méga-fusion.

Car dans le même temps, le gouvernement va devoir trouver beaucoup d'argent. A minima, il doit dénicher quelques 6 milliards d'euros pour recapitaliser EDF et Areva. Pour sortir une telle somme, Emmanuel Macron a déjà précisé que le gouvernement pourrait revendre une partie de ses participations les moins stratégiques. Et visiblement, Orange se situe aujourd'hui dans son viseur.