En France, Canal+ continue de broyer du noir

Par Pierre Manière  |   |  634  mots
Maxime Saada, le patron de Canal+. (Crédits : Reuters)
Le groupe de télévision payante a confirmé qu’il allait tailler à la hache dans ses effectifs en France, où il est confronté à une double concurrence : celle de BeIN Sports, de SFR et de Mediapro dans le sport, et celle des plateformes Netflix ou Amazon Prime dans la vidéo par abonnement.

Le précédent plan de restructuration n'a visiblement pas suffi. Canal+ continue de souffrir dans l'Hexagone. Le groupe a annoncé ce mardi qu'il allait une nouvelle fois tailler à la hache dans ses effectifs: son état-major veut se séparer d'environ 500 collaborateurs en France (492 exactement) sur les 2.600 qu'il compte en France, à travers un nouveau « projet de transformation ».

Au total, en ajoutant des postes actuellement inoccupés, ce sont 544 postes qui seront supprimés selon le syndicat maison PlusLibres, qui dénonce dans un communiqué « l'absence criante d'une stratégie de relance » et « déplore que la majorité des décisions prises ces dernières années vise à réduire les coûts pour servir les intérêts de notre actionnaire ».

Toutes les activités françaises sont concernées: la société de production et distribution Studiocanal, la chaîne cryptée et les chaînes gratuites à l'exception de CNews, a indiqué le patron du groupe Maxime Saada, lors d'une conférence téléphonique, rapporte l'AFP. Il n'a pas souhaité donner le détail des métiers touchés ni l'objectif d'économies recherché.

« On n'a pas réussi à enrayer les difficultés »

Maxime Saada a surtout expliqué que les précédents plans d'économies n'ont pas suffi, selon lui, à redresser la barre en France.

« En dépit des initiatives qu'on a lancées en 2015: la refonte totale de nos offres, le développement de nouveaux partenariats avec les opérateurs téléphoniques, les investissements soutenus dans les programmes (plus de 3 milliards d'euros) et la technologie et un plan d'économies s'élevant à 1 milliard d'euros d'économies en cumulé, force est de constater qu'on n'a pas réussi à enrayer les difficultés de Canal+ en France », a-t-il déploré.

Selon lui, l'enjeu est de « préparer l'avenir face à des concurrents mondialisés », à l'instar des plateformes américaines Netflix et Amazon Prime, et « mono-thématiques », comme SFR, BeIN Sport et l'espagnol Mediapro. Ces derniers concurrencent en effet Canal+ dans le sport, et en particulier dans le football, où Canal+ a perdu de nombreux droits.

Attaqué sur ces deux fronts, Canal+ a ainsi vu son nombre d'abonnements individuels directs (c'est-à-dire hors partenariats avec les opérateurs télécoms) reculer de 300.000 l'an dernier, à 4,73 millions de fidèles. Selon Les Echos, Maxime Saada estime que les activités en France, dans leur ensemble, sont malgré tout profitables. La situation du groupe reste meilleure en dehors des frontières de l'Hexagone. Présente en Afrique, en Pologne et au Vietnam, la filiale de Vivendi comptait l'année dernière près de 8 millions d'abonnés à l'international. Sur ce segment, le groupe s'est renforcé en mai dernier en rachetant M7, un distributeur de chaînes payantes, pour plus de 1 milliard d'euros.

En novembre dernier, Canal+ affirmait qu'il était compétitif face à Netflix

Quoi qu'il en soit, les propos de Maxime Saada concernant ses difficultés à faire face à la concurrence en France tranchent - c'est peu dire - avec ceux tenus dans nos colonnes en novembre dernier. À l'époque, le dirigeant claironnait que le groupe allait mieux, qu'il était « compétitif ». Maxime Saada avait même jugé que Netflix ne lui faisait pas peur.

« Netflix a un modèle qui encourage les consommateurs à payer pour du contenu, expliquait-il. Il contribue à développer notre marché. Ils sont dans mon camp. »

Des mots qui, à ce moment-là, avaient laissé pantois plusieurs analystes interrogés par La Tribune. « C'est un peu comme si Fnac Darty se réjouissait de l'essor d'Amazon ! », expliquait l'un d'eux, redoutant que Canal+ n'ait pas les reins assez solides pour suivre Netflix et ses investissements colossaux dans les contenus.

(avec AFP)