« Orange va investir 50 millions dans les startups en Afrique »

Par Propos recueillis par Delphine Cuny et Pierre Manière  |   |  634  mots
Pour Pierre Louette, Orange se doit d'être leader dans la transformation numérique du continent africain.
Directeur général délégué d'Orange, et notamment en charge des investissements dans les startups, Pierre Louette annonce dans nos colonnes la création d'un fonds spécialement dédié aux jeunes pousses africaines. Doté de 50 millions d'euros, celui-ci doit permettre à l'opérateur historique de saisir les opportunités de la transformation digitale à l'oeuvre sur ce continent. Et ce, dans des secteurs aussi variés que le paiement, la santé, l'énergie, la santé ou l'éducation.

LA TRIBUNE - Vous lancez Orange Digital Ventures Africa. De quoi s'agit-il ?

PIERRE LOUETTE - En complément de notre structure de capital-risque Orange Digital Ventures de 100 millions d'euros créée il y a deux ans, nous avons décidé de lancer un programme d'investissement uniquement dédié aux startups africaines, d'un montant de 50 millions d'euros, sous la houlette de notre structure Orange Digital Investment, qui regroupe toutes nos participations dans le digital (y compris Deezer et Dailymotion). La moitié de cette enveloppe sera investie dans des fonds de fonds spécialisés dans le digital sur ce continent. Nous allons gérer cet argent avec deux partenaires : les fonds Partech Ventures et AfricInvest, qui est basé en Tunisie. L'autre moitié de ces 50 millions nous permettra d'investir en direct, à travers une nouvelle structure, Orange Digital Ventures Africa, dans des entreprises que nous aurons nous-mêmes sélectionnées dans des secteurs qui nous tiennent à cœur, comme la santé ou les télécoms. L'objectif est de cibler des startups déjà assez matures, ce ne sera pas de l'amorçage, mais des tickets allant jusqu'à 3 millions d'euros au premier tour de table.

Aurez-vous une équipe sur place ?

Au mois de septembre, nous disposerons d'une petite équipe de deux ou trois personnes à Dakar. Nous sommes très bien implantés au Sénégal avec Sonatel et nous avons un incubateur Orange Fab sur place. Cette équipe locale sera très agile : elle bénéficiera, comme un vrai fonds, d'une certaine indépendance pour investir de son propre chef jusqu'à un certain seuil. L'objectif est de pouvoir réagir très vite au gré des opportunités et de se comporter comme un fonds, sans en être un juridiquement. Si une société nous sollicite, nous nous engageons à lui répondre en moins de 30 jours.

Dans quels types de startups voulez-vous investir ?

Nous voulons financer des entrepreneurs dans tous les domaines, dès lors qu'ils utilisent le digital pour résoudre les problèmes fondamentaux du continent. Cela pourra être la logistique, le commerce, le transport, l'énergie et pourquoi pas les Fintech ou la santé... Si le spectre est aussi large, c'est parce qu'en Afrique, le digital peut apporter beaucoup dans bien des domaines, mais avec des problématiques totalement différentes de celles qu'on rencontre en Europe : nous ne sommes pas dans l'ubérisation mais dans le "leapfrogging", nous aidons l'Afrique à faire un grand saut en avant. Par exemple, à l'exception des grandes villes et de quelques pays, les banques de détail sont en général peu présentes sur ce continent. Nous voulons soutenir toutes les initiatives qui permettent à des secteurs d'aller de l'avant, dans des domaines aussi variés que le paiement, la santé ou l'éducation à distance.

En quoi cette nouvelle structure était-elle nécessaire, alors que vous avez déjà investi dans des startups africaines ?

Effectivement, Orange Digital Ventures avait notamment vocation à investir dans des startups centrées sur ce continent. C'est pourquoi nous avons soutenu des jeunes pousses comme Afrimarket ou Afrostream. Et via Orange Digital Investment, nous avons mis beaucoup d'argent, 75 millions d'euros, dans Jumia (Africa Internet Group), qui se présente comme le « Amazon africain ». Aujourd'hui, nous voulons une structure spécialisée et développer notre propre écosystème. Avec Stéphane Richard [le PDG d'Orange, NDLR] et Bruno Mettling, le patron des activités africaines d'Orange, notre objectif est de devenir leader dans la transformation digitale en Afrique. Aujourd'hui, des fonds d'investissements, européens et américains, commencent à s'intéresser à l'Afrique, sans être implantés sur place. Nous avons un avantage, nous sommes présents depuis longtemps sur ce continent, dans 19 pays.