Free Mobile crée "un déséquilibre de concurrence" selon Bouygues

Par Delphine Cuny  |   |  674  mots
Martin Bouygues jge ce déséquilibre du marché mobile "problématique." Copyright Reuters
En présentant les résultats de son groupe, fortement impactés par la chute des bénéfices de sa filiale télécoms, Martin Bouygues a fait valoir que la situation était problématique et devait conduire le régulateur à s'interroger. Verbatim de la conférence de presse et analyse.

Free Mobile est-il responsable des difficultés de Bouygues Telecom ? En présentant les résultats de son groupe, fortement impactés par la chute des bénéfices de sa filiale télécoms, Martin Bouygues n'a pas directement accablé le nouvel entrant. Mais plutôt les conditions dans lesquelles il est entré sur le marché, en particulier le contrat d'itinérance conclu avec Orange qui permet à Free de construire progressivement son propre réseau et de faire transiter pour l'instant l'essentiel du trafic de ses abonnés sur celui de l'opérateur historique qui lui loue son réseau. « Nous sommes trois opérateurs à coûts fixes en compétition avec un opérateur aux coûts pour l'essentiel variables. C'est un cas quasiment unique en Europe. Cette situation de déséquilibre est problématique » a-t-il déclaré mercredi lors d'une conférence de presse au siège parisien du groupe. « Le régulateur a de vraies questions à se poser. Nous, nous sommes là pour nous adapter. »

Une baisse de prix « malsaine »
« Les difficultés que nous rencontrons sont largement dues aux conditions de concurrence. Les prix très bas de Free ne sont pas liés à un outil de production moins cher mais à ses coûts variables » a plaidé le patron du conglomérat familial. « Cette baisse de prix c'est plutôt malsain car elle conduit à une baisse de revenus et à une hausse des usages, et la réduction des coûts commerciaux ne la compense que partiellement » a-t-il ajouté. Bouygues Telecom a en effet réalisé 67 millions d'euros d'économies sur les frais commerciaux (coûts d'acquisition et de fidélisation des clients, subventions) et 27 millions sur les coûts d'exploitation dans le mobile au premier semestre.

Le numéro trois français du mobile, avec 10,85 millions de clients, a mis en place depuis février un « plan d'adaptation » devant conduire à 300 millions d'euros d'économies en 2013 et qui coûtera 150 millions cette année, y compris la mise en ?uvre du plan de départs volontaires portant sur 556 postes présenté le 3 juillet aux partenaires sociaux. Bouygues Telecom va notamment renégocier ses contrats avec des prestataires de centres d'appel, céder son grossiste Extenso et vendre divers actifs immobiliers, dont des pylônes. « L'Ebitda des télécoms cette année sera tout juste au-dessus du niveau des investissements ce qui nécessitera de prendre des mesures plus radicales » analyse Stéphane Beyazian, de Raymond James Equities. Les investisseurs, qui s'inquiètent pour le dividende, ont mal réagi à l'abaissement des prévisions de Bouygues Telecom mercredi : l'action Bouygues a clôturé en repli de 8,95% à 19,95 euros, soit une capitalisation de 6,28 milliards d'euros. Iliad, la maison-mère de Free, pèse près de 700 millions de plus en Bourse...

La 4e licence mobile, « un désastre »
Selon Martin Bouygues, « la 4e licence mobile devait se traduire par une amélioration du pouvoir d'achat mais celle-ci ne sera que passagère, par des créations d'emploi, or c'est plutôt un désastre, et par des recettes fiscales, mais l'Etat va en perdre plus d'un milliard », du fait de la baisse des résultats des autres opérateurs. Se montrant malgré tout optimiste, le patron a fait valoir que Bouygues Telecom traversait « une période difficile mais pleine d'espoir car les télécoms restent un univers indispensable dont un pays moderne ne peut se passer. » Il veut lancer au plus vite la 4G et espère un retour à des conditions de concurrence rééquilibrées. « Free annonce que son réseau lui coûte 1 milliard. Or un réseau mobile couvrant la France coûte au minimum 10 milliards. Cherchez l'erreur ! Si l'accord d'itinérance perdure, c'est une catastrophe » a-t-il souligné, reprenant l'argument développé dans un courrier adressé début juillet à tous les parlementaires. « Le précédent gouvernement nous a fait les poches en demandant des montants considérables pour les fréquences 4G et, un mois après, nous fracassait avec un nouvel opérateur... » a-t-il lancé.