Un smartphone subventionné ? Pas une si bonne affaire. C'est l'OCDE qui le dit !

Par Delphine Cuny  |   |  592  mots
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Une étude approfondie de l'organisation internationale aboutit à la conclusion que les abonnements incluant un téléphone à prix réduit en contrepartie d'un engagement de deux ans coûtent plus cher, de 10 à 20 dollars par mois en moyenne, que d'acheter un forfait et un terminal séparément. De quoi réjouir Free Mobile...

Xavier Niel et l'équipe de Free Mobile doivent jubiler. Le quatrième opérateur mobile français, qui avait attaqué en justice son rival SFR sur des contrats avec subventions qu'il considérait comme du crédit à la consommation déguisé mais fut débouté par le Tribunal de Commerce de Paris (et même condamné pour dénigrement), est aujourd'hui conforté par une étude de l'OCDE. L'organisation internationale s'est penchée sur les modèles économiques d'acquisition des téléphones mobiles : la question de départ était de savoir si les subventions faussaient la comparaison des prix de détail des services mobiles au sein des pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques.

Dans un rapport d'une quarantaine de pages, bouclé en décembre mais qui vient seulement d'être « déclassifié » et publié, l'OCDE conclut que, d'une manière générale, « le prix d'un abonnement seul et l'achat d'un téléphone indépendamment revient 10 à 20$ moins cher par mois qu'une option couplée. » Elle appelle aussi à plus de transparence.

« Ce n'est pas une subvention puisque la remise est largement récupérée sur la durée »

L'OCDE reconnaît que le système produit des effets positifs économiques et sociaux, permettant notamment de réduire la « barrière du crédit » pour certains consommateurs ne pouvant s'offrir un téléphone onéreux, donc de développer le marché et accélérer la pénétration de ces innovations dans la population. Mais l'organisation note que l'effet général sur la concurrence est « au mieux ambigu. » Elle conteste le terme même de « subvention » qui se rapporte à « un transfert économique direct non remboursé » : or « dans la plupart des cas, les opérateurs proposent des smartphones à des prix réduits mais ils récupèrent largement ces remises sur la durée du contrat et obtiennent même un gain supplémentaire » écrivent Alexia Gonzalez Fanfalone et Agustin Diaz-Pines, les deux auteurs du rapport. D'autant que dans certains pays, comme au Canada, les subventions pour un iPhone n'étaient accordées qu'à condition de souscrire un abonnement de trois ans (la réglementation vient de changer pour ramener les contrats de 36 à 24 mois).

« Entre 50% et 100% plus cher qu'une offre non couplée » en France et aux Etats-Unis

Dans l'exemple de la France et des Etats-Unis, dans le cas étudié de forfaits de 300 minutes et 1 Gigaoctets de données, incluant d'importantes « subventions » (450 dollars sur un iPhone 4S) , les prix étaient parfois « entre 50% et 100% plus chers que dans les offres non couplées. » L'OCDE note que la situation est en train de changer en particulier en France avec l'essor des offres « SIM-only », sans engagement sans téléphone (des marques low-cost des opérateurs et de Free).

L'organisation relève toutefois que cette différence de prix est parfois liée à « la perception d'une meilleure qualité » (de réseau) ou à la « marque reconnue » d'un opérateur aux yeux des consommateurs. Elle se demande ouvertement si les premiers bénéficiaires des subventions ne sont pas finalement les constructeurs des smartphones les plus courus, autrement dit Apple et Samsung... L'OCDE recommande les pratiques qui incitent à l'information du consommateur, plus de transparence sur le « coût total de possession » du téléphone, et qui réduisent le « verrouillage » du client par des contrats moins longs, en particulier l'achat de terminaux avec des mensualités séparées, « qui peuvent avoir un impact positif à la fois sur le consommateur et sur l'écosystème des smartphones. »