Les foncières cotées vont-elles devoir "faire" du logement ?

Par Pascale Besses-Boumard  |   |  946  mots
Copyright Reuters
François Hollande a récemment indiqué qu'il souhaitait voir les foncières cotées investir dans des actifs résidentiels. Leur portefeuille est aujourd'hui presque exclusivement composé de bureaux ou de locaux commerciaux. Ce projet les fait bondir compte tenu des niveaux de rendement des logements. Une partie de bras de fer en perspective

La question du logement, on l?a déjà vu , préoccupe au premier chef le nouveau président François Hollande et ses équipes gouvernementales. Cécile Duflot, la ministre du Logement  a déjà fait quelques annonces concernant l?encadrement des loyers et un possible prolongement de deux mois de la période durant laquelle on ne peut expulser un locataire ne payant plus ses loyers. François Hollande a, de son côté, déclaré dans une interview accordée au site PAP : « les investisseurs institutionnels seront incités à revenir dans le champ du logement locatif intermédiaire : il sera demandé aux sociétés d?investissement immobilier cotées de participer à l?effort de la nation de sorte qu?elles investissent dans des logements utiles au plus grand nombre en contrepartie d?avantages fiscaux dont elles bénéficient ». Un message fort à destinations des foncières cotées et bénéficiant du statut fiscal très avantageux SIIC.

Les foncières cotées consternées

Celui-ci n?a pas manqué de provoquer le plus grand désarroi de la part des dites foncières. Il faut dire qu?elles n?ont de cesse, depuis plusieurs années, de sortir de l?immobilier résidentiel pour se concentrer sur les bureaux et les centres commerciaux. Aujourd?hui, rares sont les sociétés immobilières cotées encore à la tête d?actifs de logements. Mises à part Gecina et Altarea, plus aucune ne dispose de tels portefeuilles. Et ce, pour une raison fondamentale : le résidentiel n?offre quasiment aucune rentabilité. Sauf pour quelques cas particuliers. « Ce projet est une fausse bonne idée, car on se trompe ici de véhicule. On peut imaginer plusieurs solutions pour améliorer les offres de logement, mais il ne faut pas demander aux SIIC ce qu?elles ne peuvent pas proposer. C?est comme si l?on demandait à Air France de construire des voitures électriques », lance un professionnel du secteur. Et de préciser qu?en Europe, aucune entreprise immobilière bénéficiant du statut de « Reits », similaire à celui des SIIC, ne dispose d?actifs résidentiels.
Reste le logement spécialisé destiné soit aux étudiants, soit aux personnes âgées. Ce type d?actifs est tout ce qu?il y a de plus rentable et attire d?ailleurs plusieurs foncières cotées comme Gecina et Altarea, d?ailleurs. Mais cette niche est très limitée et ne représente que de très faibles parts dans les portefeuilles de ces entreprises.

"Il est urgent de créer un outil juridique afin de libérer le foncier"

Les portes paroles des foncières ont d?ores et déjà prévu de monter au créneau pour dissuader les pouvoirs publics de poursuivre sur cette lancée. Ils ont prévu de publier d?ici à la fin du mois une étude très poussée sur la richesse créée par ces entreprises pour la collectivité. Ils entendent bien aussi pousser d?autres idées. L?élément fondamental étant de rendre plus accessible et à un moindre coût le foncier. « Il est urgent de créer un outil juridique afin de libérer le foncier. Tant que ce problème ne sera pas résolu, on ne pourra pas faire avancer le dossier », plaide un autre acteur de l?immobilier.
Et de fait, tous les véhicules immobiliers profitant d?avantages fiscaux sont concernés par les projets de réformes voulus par le président de la république, que ce soit les foncières SIIC que les OPCI (organisme de placement collectif immobilier) ou les SCPI (société civile de placement immobilier). Sans parler des assureurs qui gèrent aussi de vastes parcs immobiliers.

Force de frappe reconstituée

L?obligation d?intégrer un quota d?actifs résidentiels poserait-il vraiment problème aux entités cotées ? Après avoir eu quelques difficultés en 2009 suite à l?obligation de rembourser leurs dettes dans un contexte de « credit crunch », ces sociétés ont réussi depuis à assainir totalement leur bilan. Mieux, les plus grandes sont parvenues à reconstituer une force de frappe importante profitant de courtes fenêtres de tir sur les marchés financiers pour lever dans de très bonnes conditions des fonds supplémentaires. Elles sont donc presque toutes dans les starting-blocks pour saisir des opportunités. Mais il faut bien voir qu?elles réservent plutôt leurs faveurs à des actifs de bureaux ou commerciaux. Si l'instauration de quotas ne serait pas à ce point là catastrophique, elle contrarierait toutefois leurs plans stratégiques et de développement. Sachant que si cette idée devenait réalité, le législateur accepterait très probablement une montée en charge progressive avec une mise en ?uvre sur plusieurs années.

Rendez-vous très vite après les législatives

Il n?empêche, cela ferait sans doute « drôle » à des acteurs tels que Klépierre ou Mercialys, historiquement spécialisés dans les centres commerciaux de devoir acquérir des logements. « Cette idée est d?autant plus rocambolesque que l?on est en train de dégoûter les investisseurs de se positionner sur le résidentiel avec le projet d?encadrement des loyers et ce alors que le dispositif Scellier est sur le point de disparaître », soutient le professionnel. On devrait être assez vite fixé, les discussions entre les différentes parties devant s?accélérer après les législatives.

 

Pour aller plus loin :


Notre espace SCPI

Les prix au mètre carré dans votre rue

Notre espace immobilier d'entreprise