Immobilier : l’Espagne continue de purger sa peine

Par Mathias Thépot  |   |  548  mots
La baisse des prix de l'immobilier en Espagne devrait ralentir en 2014 et en 2015
Le marché immobilier espagnol reste englué dans la crise. Les chiffres de la construction ont été divisés par plus de 10 en seulement 5 ans, alors que les prix ont baissé de près de 30%... et ce n’est pas fini.

L'Espagne continue de purger la peine qui lui a été infligée par ceux qui ont permis l'envol insensé de la construction de logements durant les années 2000. L'éclatement brutal de la bulle immobilière au moment de la débacle financière de 2008 a plongé le pays dans une crise économique profonde et durable. Avec un taux de chômage de 26 %, la demande est durement affectée et le marché de la construction est au fond du gouffre : le nombre de mises en chantier sur 12 mois a été divisé par plus de 10 de début 2007 (750.000) à septembre 2012 (60.000).

De surcroît, le marché ne présente pas de signe de redressement. Dans le secteur privé "seuls 35.000 permis de construire ont été déposés entres octobre 2012 et septembre 2013", explique Jesus Castillo, économiste chez Natixis. En parallèle, le nombre de transactions de logements neufs croît lentement à 150.000 unités entre octobre 2012 et septembre 2013, contre 133.000 sur l'année 2012. Ce niveau reste toutefois plus de deux fois inférieur à celui de 2008 (330.000 unités).

L'heure est à l'écoulement des stocks

L'heure est en fait davantage à l'écoulement des stocks de logements construits et invendus, qui forment les fameuses "villes fantômes" situées principalement dans les Communautés de Valence, le sud de l'Andalousie et le centre du pays (Castilla-La Mancha). Selon l'agence de notation Standard & Poor's (S&P), le stock de logements invendus s'élevait ainsi à 635.000 unités fin 2012.

De toute évidence, la liquidation complète des stocks prendra des années. D'une part parce que les ménages n'ont plus la capacité financière d'acheter. D'autre part parce que les banques sont très frileuses pour octroyer des crédits comme le montrent les chiffres des encours de prêts immobiliers en baisse de 5% sur douze mois. Ces institutions financières espagnoles possèdent toujours une proportion de créances douteuses trop importante dans leur bilan, alors qu'en parallèle il leur est demandé davantage de provisions pour faire face aux risques de défaut.

30% de baisse des prix en 5 ans...

Avec l'écrémage des stocks, on assiste du reste à une chute vertigineuse des prix de l'immobilier en Espagne : entre le premier trimestre 2008 et le troisième trimestre 2013, ils ont baissé de 28,8% ! En 2013, les prix devraient chuter de 8%, selon l'agence de notation Standard & Poor's, après la dégringolade de 10,5% de 2012.

La chute des prix devrait cependant ralentir à l'avenir. Ils devraient diminuer, selon des prévisions similaires de S&P et du service de recherche de Natixis d'environ 5% en 2014 et d'environ 1% en 2015.

Les banques adoptent une position d'attente

Il faut dire que les banques qui ont récupéré les actifs immobiliers des promoteurs ayant fait faillite durant la crise adoptent désormais une position d'attente.
C'est le cas de la Sareb, la société de gestion d'actifs immobiliers des banques nationalisées, sorte de "bad bank" espagnole qui détient 30% des stocks. "Elle fait face à un dilemme. Elle doit vendre ses actifs rapidement sans les céder à des prix trop bas", explique Jesus Castillo. Et ainsi éviter d'introduire une distorsion de concurrence avec les banques privées qui ne peuvent plus se permettre de baisser les prix de leurs biens immobiliers, sous peine de subir des dépréciations importantes dans leurs comptes.