Le manque de logements s'aggrave en France

Par Mathias Thépot  |   |  659  mots
La baisse de l'offre de logements en France est significative.
Rapporté à la population, le nombre de résidences principales en France est un des plus faible d'Europe. Une situation inquiétante alors que les besoins sociaux en matière de logement sont croissants.

Les tensions sur le marché de l'immobilier français se sont incontestablement accrues depuis la crise de la construction qui a démarré en 2011. La France se retrouve désormais en queue de peloton si l'on prend en compte le nombre de résidences principales par habitants. Selon la dernière enquête publiée en 2015 par Housing Europe, la fédération européenne du logement public, social et coopératif, la France est désormais un des pays européens qui compte le moins de résidences principales par rapport à sa population, avec 423 lots pour 1.000 habitants.

« Année après année, les indicateurs se sont détériorés en France avec une baisse de 133.000 nouveaux logements par an entre 2007 et 2014 » à 266.500 unités, indiquent les auteurs de l'enquête, alors même que le gouvernement a annoncé l'objectif de mettre à disposition 500.000 nouveaux logements par an. Même l'Allemagne, qui n'a pas connu de boom de la construction au début du 21ème siècle, devance désormais la France avec 506 résidences principales pour 1000 habitants.

Si l'on ajoute les résidences secondaires et les logements vacants, le nombre de logements par habitants était de 527 logements pour 1.000 habitants en 2013 en France, selon les Comptes du logement.

Le manque d'offre sociale

Ces chiffres inquiètent les membres de la fédération Housing Europe car les besoins, notamment sociaux, en matière de logement sont considérables dans l'hexagone. « Les situations d'exclusion du logement, ainsi que le nombre de sans domicile fixe s'accroissent », s'inquiètent-ils. Ils déplorent dans ce cadre l'insuffisance de l'offre sociale de logements dans les zones tendues.

Car s'il manque des logements en France, c'est à des prix abordables et de qualité décente pour au moins 800.000 personnes. Comme le rappelle souvent la Fondation Abbé Pierre, il y a 800.000 personnes « aux portes du logement ». « Ce chiffre est la somme des 100.000 personnes sans domicile, des 150.000 personnes hébergées dans le cadre de dispositifs collectifs, des 150.000 à 300.000 personnes contraintes à un hébergement chez des proches, et enfin des 300.000 personnes vivant dans des conditions atypiques », expliquait dans une note Thomas Grjebine, économiste au Cepii.

Correction des prix limitée

Au-delà du sujet fondamental du mal-logement, la réduction de l'offre d'habitations par rapport à la population limite la correction des prix dans les zones tendues, alors qu'ils avaient plus que doublé depuis le début des années 2000. Ainsi globalement, les prix n'ont baissé que de 2,2% en 2014, après des reculs d'1,7% en 2013 et en 2012, selon le baromètre Notaire-Insee. Résultat, le poids du logement dans le budget des ménages reste prohibitif dans les zones urbaines.

Relancer l'offre de logements disponibles est donc un enjeu majeur en France. Mais pour ce faire la France devra, selon Housing Europe, clarifier et réformer sa gouvernance locale en matière de construction de logements. A demi-mots, la fédération cible les freins liés à la répartition sur plusieurs strates du droit à l'urbanisme des collectivités locales. Mais cette complexité est aussi une force au sens de Housing Europe, qui voit dans la dispersion des contributeurs et des acteurs de la construction de logements (Etat, collectivités locales, entreprises) une capacité de résilience face aux crises de l'immobilier.

Une crise de la construction... européenne

Du reste, les difficultés en matière de construction de logements ne sont pas propres à la France, même si l'hexagone subit une régression du stock de logements rapporté à sa population plus forte qu'ailleurs. « Comparé à 2007, le nombre de permis de construire accordés pour 1000 habitants, à l'exception de l'Allemagne (...), a diminué d'un peu moins de moitié en Belgique, en République Tchèque, en France, en Pologne et en Suède », et de plus de moitié « au Danemark, en Hongrie, en Irlande, au Portugal et en Espagne », constatent les auteurs de note d'Housing Europe. Preuve des liens étroits entre la crise économique et la santé des marchés immobiliers européens.