Propriété : la Cour des comptes fustige les aides de l'Etat

Par Mathias Thépot  |   |  591  mots
Le Cour des comptes veut recentrer les aides à l’accession sur les plus démunis.
La Cour des comptes s'en prend cette fois-ci aux aides publiques à l’accession à la propriété qui représentaient 2 milliards d'euros en 2014. Elle les juge inefficaces et propose d'en supprimer certaines.

Dans son dernier rapport, la Cour des comptes questionne l'efficacité des aides de l'Etat à l'accession à la propriété. Complexes, ces aides représentaient tout de même 2 milliards d'euros en 2014. Trop, pour les magistrats de la rue Cambon qui souhaitent les remettre en cause. « Malgré un montant cumulé de près de deux milliards par an, (ces aides) se révèlent de moins en moins efficaces, tant pour permettre l'accès des catégories modestes de la population au statut de propriétaire que pour soutenir l'effort de construction », souligne la Cour.

« Si l'aspiration à la propriété demeure largement partagée par les Français, la proportion de ménages propriétaires de leur logement (...) n'évolue plus désormais que lentement », indiquent les auteurs du rapport pour justifier leurs interrogations. Plus précisément, la Cour des comptes s'est intéressée aux quatre principales aides de l'Etat pour les primo-accédants: l'aide personnelle au logement pour l'accession (APL-accession), le prêt d'accession sociale (PAS), le prêt à taux zéro renforcé (PTZ+) et le prêt social de location-accession (PSLA).

Le PTZ, inefficace ?

Dans le détail, les APL-accession sont, selon la Cour « en voie d'extinction du fait du maintien d'un barème de moins en moins attractif ». Le PAS, qu'il faudrait supprimer selon la Cour, voit de son côté « son intérêt actuel réduit par l'absence d'avantage de taux par rapport au marché », tandis que le PSLA « se révèle d'un usage malaisé qui l'amène à rester marginal ». Enfin, « le PTZ+ se caractérise par des effets d'aubaine élevés et des risques d'effet inflationniste », souligne les magistrats. Cette dernière aide a pourtant été récemment élargie par le gouvernement, dans l'optique de relancer le marché de l'accession à la propriété.

La loi de finances 2016 a notamment accru son champ à l'acquisition de logements anciens accompagnée de travaux. Ainsi le PTZ+ devrait coûter 1,7 milliard d'euros à l'État en 2016, contre 662 millions d'euros en 2014. L'objectif de 120.000 PTZ distribués cette année devrait ainsi être atteint. Il aura permis, aussi bien dans le neuf que dans l'ancien, au marché immobilier de retrouver des couleurs en 2016, d'après les professionnels du secteur. En outre, au-delà de son coût pour les finances publiques, l'élargissement du PTZ était un message fort adressé aux acquéreurs. Or on sait que la confiance est l'un des élèvements déterminants de l'activité dans l'immobilier...

Cibler les ménages modestes

Toutefois, la Cour des comptes met en garde contre l'alourdissement de la charge pour les finances publiques si tous ces dispositifs étaient maintenus en l'état. Les magistrats appellent donc à réformer le système pour stabiliser cette charge, et en particulier à « réorganiser le dispositif du PTZ+ en le ciblant sur les ménages plus modestes ». C'est donc un retour en arrière que propose la Cour, même si elle concède qu'il faudrait en parallèle augmenter les possibilités d'accès à cette aide « dans les zones tendues, les quartiers de la politique de la ville et les centres anciens dégradés ».

Enfin, dans un souci de meilleur ciblage territorial, les magistrats recommandent « une gestion déconcentrée d'enveloppes d'aides à l'accession à la propriété permettant de compléter les interventions locales ». Et d'ajouter : « Prises dans leur ensemble, ces aides apparaissent relativement mal articulées, complexes et assorties de barèmes dont la disparité est croissante. » Un constat clair qui appelle à des changements. Reste à savoir si les magistrats de la rue Cambon seront entendus.