François Hollande ou le social-démocrate (enfin) assumé

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  927  mots
François Hollande lors de sa conférence de presse à l'Elysée. Copyright Reuters
Lors de sa seconde conférence de presse, François Hollande s'est employé à confirmer son cap : la priorité des priorités demeure le redressement de l'économie et de la compétitivité de la France et donc la lutte contre le chômage. Il s'est félicité des réformes struturelles engagées (réforme du marché du travail, frein mis à la dépense publique). Il a aussi longument insisté sur le besoin de diriger l'épargne vers l'investissement productif. Carressant ainsi les entrepreneurs dans le sens du poil. Sans oublier d'insister sur le rôle que doit jouer la France au sein de l'Europe. Un positionement plus social-démocrate que jamais.

Ceux qui attendaient des annonces fracassantes de François Hollande lors de sa seconde conférence de presse ont dû ont été déçus. Pas de remaniement, pas de nouvelles lois, pas d'inflexion majeure dans la politique menée depuis un an. Non, mais sur un ton plus convaincu et convainquant qu'à l'ordinaire, le président de la République - plus social-démocrate que jamais - s'est attaché à expliquer son action et à fixer un cap : celui du redressement du pays. Pour lui, ce redressement s'effectue par étape successive. Ainsi, l'An 1 de son quinquennat a été consacré à stopper l'hémorragie dans les finances publiques ; à parer au plus pressé ; à relancer la machine France ; à donner des gages sur le sérieux budgétaire du pays et sa volonté d'amorcer des réformes structurelles. D'où le pacte de compétitivité à 20 milliards d'euros, d'où l'accord sur le marché du travail du 11 janvier 2013 devenu une loi, d'où la stabilisation des dépenses publiques après dix ans de hausse. Au passage, le Président le reconnaît, cette maîtrise des dépenses publiques a dû passer par une hausse des prélèvements et « il le regrette ».

La nouvelle frontière : l'Europe

Mais, surtout, en réponse à ces détracteurs qui lui reprochent de n'avoir aucune vision pour la France ou l'Europe, François Hollande s'est employé à évoquer l'avenir. Un avenir immédiat, d'abord, avec la volonté de placer l'An 2 du quinquennat sous le signe de « l'offensive ». Une offensive qu'il place d'abord au niveau européen. Il s'est à cet égard félicité que la Commission européenne ait enfin compris que les politiques d'austérité provoquaient de la récession. Il salue ainsi le délai de deux ans accordé à la France pour revenir à la règle du déficit public limité à 3% du PIB. Pour le président, ce délai doit être utilisé pour « sortir l'Europe de sa langueur ».
Il propose donc une « initiative » en quatre points prévoyant notamment d'instituer une gouvernement économique européen et de doter la zone euro d'une capacité budgétaire. Une façon très claire d'affirmer que l'Allemagne, malgré sa puissance économique, n'a pas le leadership en Europe. Autrement dit, sans la France, l'intégration européenne n'avancera pas. Manifestement, François Hollande veut incarner l'homme qui saura relancer l'Europe...

Un social démocrate assumé

L'offensive, elle, passe également par le besoin de s'inscrire dans la durée. François Hollande l'a dit : tous ses prédécesseurs à la présidence de la République ont su proposer de grands projets à long terme. D'où sa demande à Jean-Marc Ayrault de lui présenter pour l'été un grand plan d' investissements à 10 ans dans les domaines du numérique, de la transition énergétique, la santé et les infrastructures de transports.
Et, faute de moyens suffisants de la part de l'Etat, tous les leviers seront utiles pour financer ces investissements : partenariat avec le secteur privé, capitaux extérieurs, fonds d'investissements... voire appel à des Etats étrangers. Il est loin le discours de campagne sur « l'ennemi c'est la finance ». Avec de tels propos, François Hollande assume maintenant totalement sa ligne « social-démocrate ». D'ailleurs, histoire d'enfoncer le clou, toute une autre partie de son intervention a dû satisfaire le Medef et les autres organisations patronales.

François Hollande s'est en effet appliqué à montrer que le financement des entreprises était maintenant privilégié, via un nouveau fléchage des encours de l'assurance vie, l'instauration d'un plan d'épargne en actions « incitatif » pour les PME, la révision de l'imposition des plus values mobilières, etc. Aucune taxe nouvelle évoquée, rien sur l'imposition à 75% des revenus supérieurs à un million d'euros.

Même sur les retraites, François Hollande a vendu la mèche

Aucune allusion à la proposition de loi d'amnistie sociale, aucun propos sur la nécessaire défense du pouvoir d'achat, rien sur la proposition de loi du Front de gauche sur l'obligation de vente d'un site industriel... Bref plus rien qui risquerait de fâcher le monde économique. Au contraire, il appelle l'administration à simplifier au maximum les démarches imposées aux entreprises.

Tout juste si le président a renouvelé son objectif de parvenir à stabiliser la progression du chômage à la fin de l'année. Même sur les retraites, François Hollande a largement vendu la mèche en expliquant que les Français devraient travailler plus longtemps puisque l'espérance de vie s'allonge. Bref, la durée de cotisation va être allongée mais dans un souci de « justice » a tout de même précisé le président.

En résumé, il ressort de cette conférence de presse que François Hollande a voulu s'affirmer dans le rôle du capitaine suivant un cap avec détermination. Et ses choix sont faits. Manifestement, ils ne satisferont pas les électeurs du Front de Gauche... Le président s'affirme davantage encore comme un social démocrate européen dont la volonté est de redresser l'économie française. Les réformes sociales devront attendre.

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Retrouvez notre dossier complet sur cette conférence de presse (résumée ici)

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