Le parlement a du pain sur la planche avec vingt projets de loi en attente

Par Giulietta Gamberini  |   |  1758  mots
Presqu'une vingtaine de projets de lois présentés par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault qui auront une influence sur l'économie du pays attendent les parlementaires à la rentrée. Passage en revue.

S'ajoutant aux arbitrages en cours, une bonne quinzaine de projets de loi déjà présentés par le gouvernement socialiste, sensibles pour l'économie du pays, doivent encore être approuvés, voire discutés, par le Parlement. Qu'est-ce qu'ils prévoient? Où en sont-ils? La Tribune fait le point.

Entreprises et consommation

Projet de loi relatif à la consommation

La mesure la plus célèbre de ce texte, qui vise à redonner du pouvoir aux consommateurs face aux professionnels, est l'instauration de l'action de groupe, permettant aux associations agréées d'agir en justice pour plusieurs acheteurs. Présenté le 2 mai par Benoît Hamon, ministre de l'Economie sociale et solidaire et de la Consommation, avec Pierre Moscovici, ministre de l'Economie et des Finances, le projet de loi a été adopté en première lecture par l'Assemblée nationale le 3 juillet. Son examen en séance publique au Sénat reprendra le 10 septembre.

Projet de loi relatif à l'économie sociale et solidaire

Présenté également par Benoît Hamon et Pierre Moscovici, lors du Conseil des ministres du 24 juillet, et déposé au Sénat, ce projet de loi vise à encadrer et encourager l'Economie sociale et solidaire (ESS) ainsi qu'à favoriser les reprises d'entreprises par leurs salariés. Une disposition, reconnaissant le droit de ces derniers d'être préalablement informés de tout projet de cession, a fait particulièrement polémique.

Projet de loi relatif à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises

A l'initiative de la ministre de l'Artisanat, du Commerce et du Tourisme, Sylvia Pinel, qui l'a présenté en Conseil des ministres le 21 août, le texte a suscité l'attention médiatique notamment en ce qu'il réforme le régime de l'auto-entrepreneur. Il intervient également sur la possibilité de se prévaloir de la qualité de «artisan» ainsi que sur l'évolution annuelle des loyers commerciaux, limitée à 10%.

Médias

Projet de loi organique et projet de loi relatifs à l'indépendance de l'audiovisuel public

L'objectif de ces textes est de restituer au Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA, dont la composition et le mode de nomination sont aussi réformés) le pouvoir de nommer les présidents des sociétés de l'audiovisuel public (France Télévisions, Radio France et Audiovisuel Extérieur de la France), qui lui avait été ôté par une loi de 2009. Présentés par Aurélie Filippetti, ministre de la Culture et de la Communication, le 5 juin, les projets ont été adoptés en première lecture par l'Assemblée nationale le 24 juillet et transmis au Sénat.

Défense

Projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019

Les préconisations du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, remis au Président de la République le 29 avril, sont le socle de ce texte, qui fixe les ressources de la défense entre 2014 et 2019 à 190 milliards d'euros courants. Le projet de loi prévoit de consacrer 17,1 milliards d'euros en moyenne chaque année à l'investissement et à l'équipement et de supprimer 23500 emplois (s'ajoutant aux 10175 suppressions de postes déjà décidées pour 2014 et 2015). Présenté le 2 août par le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, le texte sera d'abord examiné par le Sénat.

Egalité professionnelle

Projet de loi pour l'égalité entre les femmes et les hommes

Najat Vallaud-Belkacem, qui l'a présenté le 3 juillet, entend par ce texte s'attaquer aux inégalités entre hommes et femmes dans les sphères privée comme publique et professionnelle. Afin de favoriser le partage des responsabilités familiales et donc le niveau d'emploi féminin, la ministre des Droits des femmes propose notamment de réformer le congé parental, en réservant une période au «second parent». Le projet, qui sera examiné en séance publique au Sénat à partir du 16 septembre, facilite également les congés parentaux des collaborateurs libéraux, le recours aux prestations de service à la personne et le recouvrement des pensions alimentaires. Il étend les exigences de parité, sanctionne leurs violations par les entreprises de plus de 50 salariés et les partis et renforce la lutte contre le sexisme dans les médias. 

«République exemplaire»

Projet de loi organique et projet de loi interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur

Promis par François Hollande pendant la campagne présidentielle et présentés par Manuel Valls, ministre de l'Intérieur, le 3 avril, ces projets interdisent, à compter du 31 mars 2017, de cumuler l'exercice d'un mandat parlementaire avec certaines fonctions exécutives locales. L'Assemblée nationale les a adoptés en première lecture le 9 juillet et transmis au Sénat, qui reprendra leur examen le 18 septembre.

Projet de loi organique et projet de loi relatifs à la transparence de la vie publique

Ce sont les «enfants» de l'affaire Cahuzac, présentés en Conseil des ministres le 24 avril par le Premier Ministre lui-même. Leur mesure phare consiste dans la création d'une Haute autorité de la vie publique, composée d'experts indépendants et chargée de contrôler la véracité des déclarations de patrimoine et d'intérêt des membres du gouvernement, des parlementaires nationaux et européens et d'autres hauts fonctionnaires. Ayant épuisé les navettes entre les deux chambres du Parlement, qui se sont notamment opposées sur la question de la publication des déclarations du patrimoine des élus au Journal officiel, les textes seront désormais soumis au seul vote de l'Assemblée nationale.

Projet de loi relatif à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière

Présenté lui aussi le 24 avril par Jean-Marc Ayrault dans le contexte de l'affaire Cahuzac, ce projet renforce la lutte contre la fraude fiscale en aggravant ses sanctions et en attribuant plus de pouvoirs à l'administration. Les deux chambres du Parlement n'étant pas parvenues à un accord sur tous les points du texte, elles devront le réexaminer à la rentrée.

Projet de loi organique relatif au procureur de la République financier

La création d'un Procureur de la République financier national, placé hors hiérarchie et compétent pour les atteintes à la probité et les délits de fraude fiscale d'une grande complexité, proposée le 7 mai par la Garde des Sceaux, Christiane Taubira, n'a pas convaincu le Sénat. Le texte devra être réexaminé par les deux chambres du Parlement.

Projet de loi relatif à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires

Les valeurs qui fondent l'action spécifique de la fonction publique (neutralité, impartialité, probité et laïcité) sont consacrées par ce texte, qui renforce également la déontologie (notamment la prévention des conflits d'intérêt), l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la mobilité des agents. Présenté le 17 juillet par Marylise Lebranchu, ministre de la Réforme de l'Etat, de la Décentralisation et de la Fonction publique, il a été déposé devant l'Assemblée nationale.

Projet de loi organique et projet de loi ordinaire relatifs au renforcement des obligations déontologiques des magistrats de l'ordre judiciaire

Présentés le 24 juillet par Christiane Taubira, ils étendent la prévention des conflits d'intérêts aux magistrats.

Projet de loi habilitant le Gouvernement à simplifier les relations entre l'administration et les citoyens

Suivant les vœux du Comité interministériel pour la modernisation de l'action publique (Cimap) lancé en décembre 2012, ce texte espère contribuer à la simplification des normes et des procédures. Il autorise notamment le gouvernement à adopter un Code des relations entre l'administration et le public, regroupant toutes les règles jusqu'à présent dispersées. Présenté le 2 mai par Marylise Lebranchu, le projet de loi, adopté par le Sénat le 16 juillet, doit maintenant être examiné par l'Assemblée nationale.

Projet de loi constitutionnelle portant réforme du Conseil supérieur de la magistrature

Présenté le 13 mars par M. Jean-Marc Ayrault, il visait à renforcer l'indépendance et l'autorité du Conseil supérieur de la magistrature (CSM). Son deuxième examen par l'Assemblée nationale a été suspendu par le gouvernement le 4 juillet et reporté à une date non déterminée.

Territoires

Projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles

Le partage et la coordination entre collectivités territoriales devraient être clarifiés par ce texte, qui rétablit pour les régions et les départements la clause générale de compétence (destinée à disparaître en 2015) et qui crée un nouveau statut pour les métropoles de plus de 400000 habitants. Présenté par Marylise Lebranchu le 10 avril, le projet de loi devra être examiné une deuxième fois par les deux chambres du Parlement, qui se sont opposées sur la question du «Grand Paris».

Projet de loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR)

Afin de combattre la forte augmentation des loyers et la pénurie de logements, la ministre de l'Egalité des territoires et du Logement, Cécile Duflot, qui a présenté son projet le 26 juin, prévoit de renforcer l'encadrement des loyers dans les zones dites «tendues», c'est -à-dire dans les 28 agglomérations de plus de 50000 habitants où il existe un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande (soumises à ce titre à la taxe sur les logements vacants). Elle envisage aussi d'encadrer l'activité des agences immobilières et des syndics ainsi que les justificatifs exigibles du locataire. Le projet de loi, qui institue aussi une garantie universelle des loyers (Gul) à compter de 2016 et simplifie les démarches pour obtenir un logement social, est en cours d'examen auprès de l'Assemblée nationale.

Projet de loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine

Issu des réflexions du Comité interministériel des villes (CIV) qui s'était réuni en février, le projet de loi a été présenté par le ministre de la Ville François Lamy et déposé devant l'Assemblée nationale le 2 août, avec l'objectif affiché de réduire les écarts entre 1200 quartiers prioritaires (désignés selon la concentration de la pauvreté calculée à partir du revenu des habitants) et les autres. Il institue un Observatoire national de la politique de la ville chargé de mesurer cette évolution ainsi qu'un contrat de ville unique comprenant l'ensemble des politiques publiques et alloue 5 milliards d'euros à l'Agence nationale de rénovation urbaine (ANRU).