Ce qu'il faut retenir du nouveau plan pour l'Innovation

Par Fabien Piliu  |   |  1125  mots
Le gouvernement mise sur l'innovation
Un plan en 40 mesures visant à créer une "Nouvelle donne pour l'innovation". Plusieurs sont nouvelles, d'autres moins, et certaines restent un peu floues. Revue de détail du nouveau bébé d'Arnaud Montebourg, Fleur Pellerin, et Geneviève Fioraso.

Après les 35 mesures du Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi , les 34 mesures de la Nouvelle France industrielle, voici les 40 mesures de la Nouvelle donne pour l'innovation, le nouveau plan gouvernemental présenté ce mardi par Arnaud Montebourg, le ministre du Redressement productif, Fleur Pellerin, la ministre des PME et du Numérique et Geneviève Fioraso, la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche.

Pourquoi ce plan ? « La France n'a pas qu'un récit politique à adresser au reste du monde mais aussi un récit économique. Elle doit reprendre le cours de ce récit, interrompu ces dernières années », a déclaré Arnaud Montebourg, le ministre du Redressement productif, citant les inventions, les innovations de rupture nées en France depuis la première révolution industrielle, notamment la machine à vapeur, la montgolfière, l'avion, le cinéma, le pneumatique, le train à grande vitesse, la carte à puce ou encore l'ABS.

Trop de mesures ?

Fallait-il 40 mesures pour stimuler l'innovation en France, sachant qu'un certain nombre d'entre elles étaient déjà connues ? A force d'être taxé d'immobilisme, le gouvernement a décidé de frapper fort, quitte à ce que ses messages passent aux yeux de certains pour de simples moulinets de bras, voire de la gesticulation.

Plusieurs mesures devraient être saluées par les chefs d'entreprises et les entrepreneurs innovants en herbe. Comme l'avait dévoilé La Tribune, le code des marchés publics sera bientôt réformé pour que les entreprises, et en particulier les plus innovantes d'entre elles, bénéficient davantage du matelas de sécurité que représente la commande publique qui s'élève à 200 milliards d'euros par an.

Des fesses seront bottées prévient Arnaud Montebourg !

« Il va falloir que l'on botte les fesses des acheteurs publics. A cause de leur professionnalisme juridique, des champions de demain sont abandonnées en rase campagne, faute de pouvoir gagner des marchés publics », a tonné Arnaud Montebourg. Cette envolée typiquement montebourgienne peut sembler un rien injuste, les acheteurs publics étant incités par le code des marchés publics à se montrer d'une extrême prudence dans leurs décisions d'achats. Ne sont-ils pas responsables pénalement et personnellement trois ans après leur décision d'achat ?

Pour soutenir les entreprises innovantes en cas de litige avec l'administration, les entreprises pourront désormais compter sur le soutien de Pierre Pélouzet. L'actuel médiateur des relations interentreprises voit son périmètre s'agrandir puisqu'il endossera aussi la fonction de médiateur de l'innovation.

Autre bonne surprise de ce plan, le crédit impôt recherche (CIR) reste non seulement sanctuarisé mais il sera adapté aux entreprises innovantes.

La question du financement à l'honneur

Dans le domaine du financement, plusieurs mesures ont été annoncées. Le gouvernement a décidé la création de plusieurs outils pour couvrir tout le spectre des besoins en fonds propres des entreprises innovantes : le fonds Large venture lancé par Bpifrance et doté de 600 millions d'euros doit favoriser la transformation des start-up à fort potentiel en ETI leaders au niveau mondial.

Quant au fonds de fonds de 600 millions d'euros dédié notamment à des interventions sectorielles, il sera géré par Bpifrance dans le cadre du Programme des investissements d'avenir (PIA). Pour soutenir les start-up, la compétence et le renforcement des FIP et des FCPI seront bientôt renforcés. Les investissements des grands groupes, via la création de joint-venture, seront également encouragés. Enfin, les montants unitaires des investissements des business angels seront augmentés.

Si ces mesures semblent pouvoir être rapidement opérationnelles, d'autres paraissent plus aléatoires. Toujours dans le domaine du financement, le gouvernement souhaite mener une action ciblée pour faire venir les grands fonds d'investissement étrangers en France. Au regard de la dégradation du climat économique et social actuel, alimentée par la polémique sur la pause fiscale que le gouvernement a lui-même déclenchée, le pari n'est pas gagné.

Une bourse pour les nouveaux entrepreneurs est également lancée. Ce dispositif consiste en  une dotation pouvant aller jusqu'à 30.000 euros permettant de financer les premières étapes d'un projet innovant porté par un entrepreneur modeste. Cette bourse est dotée d'une enveloppe de dix millions d'euros.  

Le retour de l'immigration choisie

Imitant les initiatives prises en ce sens lors du quinquennat précédent, le gouvernement souhaite mettre en place une immigration choisie en attirant les talents étrangers à « haut potentiel », via une procédure simplifie et accélérée. En 2007, lors de la campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy avait émis le souhait que 50% des entrées migratoires aient un motif professionnel.

Une véritable politique de transfert

Directement inspirées par le rapport Beylat-Tambourin publié en avril, plusieurs mesures doivent accroître l'impact économique de la recherche publique par le transfert. Il s'agit notamment de multiplier les passerelles entre la recherche publique et la recherche privée et de favoriser les échanges entre ces deux mondes encore cloisonnés.

Beaucoup de mesures déjà connues

Parmi les autres mesures, nombreuses sont celles qui étaient déjà connues, notamment celles qui doivent développer la culture de l'entrepreneuriat et de l'innovation. La plupart d'entre elles avait été dévoilées lors des Assises de l'Entrepreneuriat.  

Quelques décisions… inédites

Plusieurs mesures du plan Innovation laissent songeurs. Évoquons la mise en place d'un programme de « Maisons de l'international » pour favoriser l'accès à l'international aux entreprises innovantes ou encore la création d'un programme de designers en résidence dans les pôles de compétitivité. L'initiative est intéressante, même si la capacité des pôles de compétitivité à avoir un effet d'entrainement sur l'économie est encore sujette à caution.

Huit ans après leur création en 2005, en cohérence avec la décision n°10 du Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi, les 71 pôles de compétitivité pôles doivent se tourner davantage vers les débouchés économiques et l'emploi durant la période 2013-2018. Comment ? En devenant des « usines à produits d'avenir » qui transforment les efforts collaboratifs des travaux de R&D en produits, procédés et services innovants mis sur le marché.

Quant à la mise en place des parcours d'accompagnement des start-up et des entreprises innovantes à fort potentiel, on se demande à qui sera confiée cette mission. A l'administration ? A des chefs d'entreprises ? A des business angels ?

Enfin, le gouvernement espère faire revenir en France des entrepreneurs français qui ont réussi à l'étranger. Le document ne précise pas comment il compte s'y prendre. Ni si ce sont des entrepreneurs qui ont réussi à l'étranger et qui y sont restés pour des raisons fiscales…