La déroute socialiste aux municipales condamne-t-elle le Pacte de responsabilité ?

Par Fabien Piliu  |   |  727  mots
Proposé aux entreprises, le Pacte de responsabilité est-il encore d'actualité ?
Les engagements de l’exécutif en faveur des entreprises ne seront pas connus avant le 15 avril. Pourtant, au lendemain des élections municipales, certaines composantes de la majorité souhaitent que l’Elysée renonce à cette politique de l’offre.

Ce lundi, François Hollande devrait annoncer le remaniement de son gouvernement. S'il est remplacé, qui succédera à Jean-Marc Ayrault à Matignon ? L'enjeu de cette décision ne porte pas tant sur le nom du prochain ministre que sur la politique économique qu'il souhaitera mener. Concrètement, à peine amorcé, le virage social-démocrate est-il d'ores et déjà condamné si le prochain locataire de Matignon est choisi en fonction de ses liens étroits avec l'aile gauche du Parti socialiste, qui réclame la fin de l'austérité et la mise en place d'une politique de relance pour sortir l'économie française de l'atonie qui la frappe depuis 2010 ?

Si tel est le cas, le Pacte de responsabilité est-il irrémédiablement condamné ? Jean-Vincent Placé, le chef de file des sénateurs écologistes est en première ligne. " Je dis stop au pacte de responsabilité. En l'état, il est invotable et il ne sera pas voté par la majorité ", a-t-il déclaré ce lundi sur RMC. Le rejet de ce pacte vient aussi du Front de gauche et des syndicats comme la CGT et FO - rejoints depuis la semaine dernière par la CFE-CGC -, qui se sont dès janvier engagés à ne pas signer ce pacte, estimant que les contreparties réclamées aux entreprises en matière d'emploi étaient largement insuffisantes.

Bruxelles veille au grain

" Remettre en cause ce pacte semble impensable, car Bruxelles veille. La Commission européenne a accordé un sursis à la France pour qu'elle respecte ses engagements en matière de réduction de déficit public. Elle n'en accordera pas un second », estime Denis Ferrand chez COE Rexecode.

Qu'en pense le patronat ? A la CGPME, on n'ose croire à un nouveau changement de cap de la part de l'exécutif. " Le chef de l'Etat s'est engagé personnellement. Revenir sur cet engagement est impensable. Les chefs d'entreprises ne comprendraient pas ", avance Jean-Eudes du Mesnil du Buisson, le secrétaire général de la Confédération. " Compte tenu de leur situation financière actuelle, les entreprises ont vraiment besoin d'un coup de pouce de la part de l'Etat pour se remettre à embaucher et à investir  ", poursuit-il.

Selon les résultats détaillés de la croissance au quatrième trimestre 2013 dévoilés ce lundi par l'Insee, le taux de marge des entreprises a reculé de 0,2 point entre 2012 et 2013 pour atteindre 28,1% de l'excédent brut d'exploitation. Un niveau à comparer à celui affiché par les entreprises allemandes, proche de 40%

Cette opposition frontale au Pacte de responsabilité intervient alors que son contenu est toujours méconnu. Le seul élément de certitude ? Il sera présenté avant le 15 avril, date à laquelle la France enverra son document d'orientation sur la trajectoire des dépenses publiques à la Commission européenne, document qui contiendra impérativement les détails de ce pacte.

Fromage et dessert pour le patronat

En attendant que Bercy dévoile ce qu'il retient des Assises de la fiscalité entamées le 29 janvier, les spéculations vont bon train. Les dernières déclarations " off " du ministère du Budget invitent le patronat à l'optimisme. L'Elysée aurait promis une suppression de la surcotisation de l'impôt sur les sociétés acquittée par les grands groupes. En vigueur depuis 2011 pour financer la réforme du régime des plus-values mobilières, cette surtaxe est acquittée par les entreprises affichant un chiffre d'affaires supérieur à 250 millions d'euros. L'Elysée aurait également promis la suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) et un abaissement du taux d'IS sous les 30% ! Depuis 1993, le taux normal de l'IS s'élève à 33,33 %, auquel s'ajoute la contribution sociale de 3,3 % de l'IS pour les entreprises enregistrant un chiffre d'affaires annuel supérieur à 7,6 millions d'euros, portant le taux global à 34,43 %, l'un des plus élevés des pays de l'OCDE. Ces mesures seraient intégrées dans le projet de loi de finances 2015 avec effet rétroactif cette année. Leur effet serait donc immédiat.

Stimuler l'innovation et l'export grâce à un CICE « Plus »

A ces dispositions généreuses s'ajouteraient le passage de 6% à 8% du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) au-dessous de 2,5 SMIC et la création d'un taux marginal de 2% au dessus de 2,5% SMIC pour aider les entreprises à embaucher des emplois qualifiés leur permettant ainsi d'innover et d'exporter davantage.