Simplifications administratives, ce qui va changer pour les entreprises

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  969  mots
Un premier train de 50 mesures de simplification de la vie des entreprises a été adopté pour doper l'emploi.
Le député Thierry Mandon et le chef d'entreprise Guillaume Poitrinal ont présenté 50 propositions pour simplifier les formalités administratives des entreprises. La rétroactivité en matière fiscale est supprimée et la technique du "rescrit" est généralisée. Quant à l'embauche dans les TPE, elle va être très simplifiée.

Faciliter les embauches, simplifier les déclarations des données sociales, miser sur une fiscalité stable… Autant de souhaits maintes fois formulés par les chefs d'entreprise qui déclarent trop souvent s'arracher les cheveux et se perdre dans les arcanes de l'administration française. selon l'OCDE (dans une étude de 2010) , la complexité administrative coûte aux entreprises françaises près de 60 milliards d'euros par an. L'horizon pourrait rapidement se dégager si la volonté suit… vraiment.

En effet, après les deux premiers trains de mesures annoncées en juillet 2013 et janvier 2014, dans le cadre du Pacte de responsabilité - dont la simplification administrative constitue l'un des piliers, le député Thierry Mandon et le chef d'entreprise Guillaume Poitrinal, coprésidents du Conseil de la simplification, ont dévoilé ce 14 avril 50 propositions supplémentaires pour alléger les démarches administratives dans plusieurs domaines. Mieux, les deux coprésidents annoncent que ces mesures seront « applicables dès maintenant ou pour la plupart au 31 décembre 2014 » Dont acte ! En attendant, si c'est vrai, plusieurs mesures qui avaient été proposées en 2011 par Frédéric Lefebvre, alors ministre de PME, vont, de fait, radicalement simplifier la vie des entreprises, notamment les plus petites. En voici quelques exemples très significatifs.

Généralisation de la technique des "réponses-garanties" de l'administration

Ainsi, désormais, afin de permettre aux entreprises de s'engager sur le long terme (investissements, recrutements, etc. ) et pour leur donner des garanties de confiance et de visibilité, l'impact sur les entreprises de toute évolution de la règlementation et de la législation sera évalué par un groupes d'experts indépendants, représentants du monde économique, et chaque nouveau coût sera compensé par une réduction au moins équivalente. Gageons que la création du très compliqué « compte pénibilité », prévue par la dernière loi sur les retraites, devrait être l'un des premiers dossiers étudiés…

En outre, point fondamental, la techniques des « réponses-garanties » ( ce que l'on appelle aussi les « rescrits ») de l'administration sera développée. Ce qui signifie qu'en cas de doute sur l'application d'une norme à une situation concrète, une entreprise pourra interroger l'administration qui sera tenue de lui délivrer une prise de position formelle et opposable juridiquement, dans la mesure où la situation aura été décrite de bonne foi. L'entreprise qui utilisera cette technique sera ainsi protégée face à des difficultés d'interprétation d'une loi.

La fin de la rétroactivité fiscale

L'instabilité fiscale est aussi abordée en mettant fin au principe de rétroactivité fiscale qui venait empoisonner la vie des entreprises. Jusqu'ici, en effet, des lois de finances rectificatives, par exemple, adoptées en cours d'année, pouvaient modifier les règles fiscales portant sur les revenus des entreprises perçus tout au long de l'année. Désormais, les règles affectant l'imposition des revenus perçus par les entreprises au cours d'une année donnée devront être adoptées avant cette même année, sauf force majeur. Très concrètement, ceci signifie, par exemple, qu'il n'est plus question d'instituer une contribution exceptionnelle sur les bénéfices ou de modifier le taux de l'impôt sur les sociétés en cours d'année. Les modifications introduites ne pourront s'appliquer que pour l'année suivante.

Les deux rapporteurs n'ont pas non plus oublié la création d'une entreprise individuelle. Les quelque 2,4 millions d'entrepreneurs individuels vont être satisfaits d'apprendre que les démarches seront simplifiées. Actuellement, un micro entrepreneur doit choisir entre plus de 5 statuts différents (dont EURL et autoentreprise). Aussi, d'ici cet été, un groupe de travail devra remettre un rapport pour réduire, dès 2015, le nombre de statuts et ne retenir que ceux qui correspondent aux besoins réels des entreprises individuelles.

Une feuille de paie simplifiée...

Dans le domaine social aussi il y a un sacré travail de simplification à mener. Les deux auteurs s'y sont attelés. Ainsi, le bulletin de paie va être clarifié de manière à ce que l'on puisse bien identifier une ligne pour le financement de chaque type de protection (famille, retraite, santé). Un gros travail va aussi être mené sur l'architecture des prélèvements sociaux pour faciliter le calcul par les entreprises « des charges qu'elles doivent payer ».

... et les embauches et déclarations sociales allégées dans les TPE

Quant à l'embauche de salariés dans les petites structures, elle va être considérablement allégée grâce à l'extension d'un mécanisme existant : le "titre emploi service entreprise » (Tese). Le Tese, jusqu'ici limité aux entreprises de plus de 9 salariés, sera à l'avenir utilisable dans les entreprises employant jusqu'à 19 salariés. Avec le Tese, toutes les formalités liées à l'embauche sont réunies dans un seul document. Et, à partir de la déclaration de l'employeur, c'est le Centre national Titre emploi service entreprise qui calcule les cotisations dues et adresse à l'entreprise un décompte de cotisations sociales. Plus de deux millions d'entreprises pourraient bénéficier de ce dispositif.

Last but not least, et ce sujet n'est en rien mineur quand on connaît le nombre de conflits sur ce point : il va être procédé d'ici au 31 décembre à l'harmonisation de la définition du « jour » en matière sociale. En effet, on compte de multiples définitions différentes du « jour » : jour ouvré, jour ouvrable, jour calendaire… D'où les risques d'erreurs en matière de congés payé, de forfaits jours, de congés spéciaux, etc.

Bien entendu, Medef, CGPME et UPA, les trois organisations patronales, ne peuvent que saluer ce premier train de mesures. D'autant plus que Thierry Mandon et Guillaume Poitrinal comptent avancer de nouvelles propositions dans les mois qui viennent.

____