Quand Pierre Gattaz (Medef) teste le retour du "Smic Jeune"

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  698  mots
Le président du Medef souhaite que le gouvernement aille plus vite et plus fort dans la baisse des prélèvements et la diminution des dépenses publiques
Le président du Medef demande au gouvernement d'accélérer. Sur les allègements de cotisations et la baisse de la fiscalité des entreprises. Mais aussi sur l'emploi : il a provoqué un tollé syndical en brisant le tabou du Smic en évoquant une rémunération transitoire inférieure pour les jeunes exclus du marché du travail.

Plus vite, plus haut, plus fort ! Pierre Gattaz veut appliquer à l'économie française la devise olympique du baron Pierre de Coubertin. Certes, le président du Medef continue d'applaudir au Pacte de responsabilité et aux premières décisions de Manuel Valls, décidé à accélérer dans la simplification du millefeuille administratif français. Mais pour lui,  tout ceci est notoirement insuffisant pour créer 1 million d'emplois en 5 ans, l'objectif de l'organisation patronale . Aussi, le Medef a décidé de mettre les mains dans le cambouis en promettant de publier d'ici juin une quinzaine de mesures fiscales, sociales et règlementaires destinées à « faire sauter des verrous » ou à « servir de leviers » pour aider à la création d'emplois…

1 million d'emplois créés en 5 ans: le Medef fera des propositions avant l'été

Et sans surprise, sur le terrain social, par exemple, Pierre Gattaz a évoqué une libéralisation du travail du dimanche ainsi que le soir après 21 heures, « ce qui pourrait déjà aider à créer de 30.000 à 40.000 emplois ». Il veut aussi revoir à la baisse la fiscalité sur les services à la personne, en espérant 100.000 emplois nouveaux. Sans oublier le "lissage" des seuils sociaux".

Autre tabou brisé, Pierre Gattaz rêve aussi de permettre aux entreprises de pouvoir engager "de façon transitoire" des jeunes à un salaire inférieur au Smic..., une piste évoquée récemment par le socialiste Pascal Lamy qui a parlé de "petits boulots" payés moins que le Smic. Omettant de dire que ceci est dans les faits déjà possible lorsqu'un jeune est embauché en apprentissage ou en contrat en alternance, sans parler de la multiplication des stages de longue durée..., Pierre Gattaz a fait le buzz en suscitant des réactions indignées . Ce ballon d'essai patronal sur un Smic Jeune façon Balladur de 1993 qui ne dit pas son nom, même temporaire, a provoqué un tollé syndical et un rejet de la part du gouvernement. L'ancienne patronne du Medef, Laurence Parisot, a même parlé d'une "logique esclavagiste"...

La fiscalité des entreprises ne baisse pas assez fort

Mais, pour l'instant, c'est du côté du gouvernement que le patron du Medef se tourne. Il regrette, donc, que les choses n'aillent pas assez vite, notamment sur la fiscalité alors « que les entreprises françaises accusent 50 milliards d'euros de prélèvements supplémentaires par rapport aux entreprises allemandes. Or, les mesures dévoilées par Manuel Valls ne laissent espérer qu'une baisse de 1 milliard de la fiscalité pesant sur les entreprises en 2015. En revanche, il est bon que le CICE de 20 milliards d'euros soit maintenu ainsi que le nouvel allègement de cotisations sociales de 10 milliards (branche famille)".

Le président du Medef espère que ces mesures seront « actées d'ici l'été », via un projet de loi de finances rectificative. Ce qui devrait être fait, si l'on en croit les intentions du gouvernement.

Pierre Gattaz applaudit également des deux mains le rapport Mandon/ Poitrinal sur les simplifications administratives pour les entreprises, soulignant que le Medef « avait été très acteur », en fournissant de nombreuses idées. Mais, là aussi, il regrette déjà que ces mesures de simplification ne « permettent pas d'endiguer le flux des nouvelles normes. Il faudrait se donner pour objectif de réduire de 5% par an l'ensemble des normes »( fiscales, sociales, commerciales, liées à l'immobilier, etc.).

 Le niveau de l'euro ne doit pas servir d'excuse pour ne rien faire

Plus vite et plus fort, donc. D'autant plus que Pierre Gattaz espère que l'objectif de ramener le déficit à 3% du PIB sera « tenable » pour la fin 2015. Mais alors, ce n'est pas 50 milliards d'économies que le gouvernement doit trouver… mais 90 milliards.

Enfin, le président du Medef n'a pas résisté à adresser un petit avertissement aux zélateurs de la baisse de l'euro : « Certes, le niveau actuel de l'euro [1,38 dollar] est un peu élevé, nous souhaiterions un niveau compris entre 1,15 et 1,25 dollar. Mais ne niveau de l'euro ne doit pas être une excuse à nos difficultés ». Bref, c'est clair, pour Pierre Gattaz, l'Allemagne et la politique de la BCE ne sont pas responsables de la perte de compétitivité de la France.