Financement de la protection sociale : Manuel Valls obligé de lâcher un peu de lest

Par Fabien Piliu  |   |  872  mots
Le Conseil d'Etat a contraint Manuel Valls à modifier le PLFSS rectificatif 2014
Dévoilé ce mercredi par le Premier ministre, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2014 rectificatif ne tient pas - encore - compte des injonctions des « frondeurs » de la majorité. En revanche, certaines mesures ont été retoquées par le Conseil d’Etat.

Une semaine après la présentation du collectif budgétaire, Manuel Valls présente ce mercredi en Conseil des ministres le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2014 rectificatif. Si le texte ne tient pas(encore)  compte des injonctions des députés « frondeurs » de la majorité qui réclament jusqu'ici en vain moins d'austérité et plus de relance, il a dû être modifié, le Conseil d'Etat ayant retoqué certaines décisions gouvernementales.

Concrètement, quelles sont les mesures contenues dans cette seconde version du PLFSS 2014 ?

Pour les ménages :

  • Le texte allège les cotisations salariales pour les revenus entre 1 et 1,3 SMIC. Prévue dans le cadre du pacte de responsabilité, cette mesure doit permettre un gain jusqu'à 500 euros par an pour un salarié à plein temps. Son coût est évalué à 2,5 milliards d'euros dont 400.000 sont réservés aux fonctionnaires. Autre point positif pour le pouvoir d'achat des ménages, par décision du Conseil d'Etat, le gouvernement a décidé de retirer du texte le gel pour cette année des prestations familiales qui devait rapporter 360 millions d'euros cette année à l'Etat ainsi que celui des pensions invalidité/accidents du travail (200 millions d'euros). Mais, ce n'est que partie remise.... Le ministère des Affaires sociales étant décidé à inscrire cette disposition dans le budget de la Sécu 2015.
  • L'allègement des cotisations salariales complète les dispositions fiscales prises dans le cadre du collectif budgétaire. Pour mémoire, dès septembre, 3,7 millions de foyers fiscaux bénéficieront d'une réduction d'impôt sur le revenu, dont 1,9 million en seront totalement exonérés. Ce sont les personnes dont le revenu ne dépasse pas 1,1 fois le SMIC qui sont concernées. Une personne seule paiera 350 euros d'impôts de moins, un couple 700 euros. Avec cette mesure, le gouvernement souhaite faire sortir du barème de l'impôt sur le revenu ceux qui y étaient entrés en 2012 et 2013 ou qui y seraient rentrés cette année en raison de sa politique fiscale et non parce que leurs revenus ont augmenté. Le coût de cette mesure s'élève à 1,1 milliard d'euros. Elle est financée par la lutte contre la fraude fiscale dont le produit devrait être plus élevé que prévu.

Pour les entreprises

  • En 2015, les employeurs ne paieront plus les cotisations Urssaf (contribution de sécurité sociale et allocations familiales) pour les salariés au SMIC, y compris dans les entreprises de 20 salariés et plus. Cette exonération sera dégressive jusqu'à 1,6 Smic. Le texte prévoit une baisse des cotisations familiales pour les travailleurs indépendants dont le revenu est inférieur à 53.000 euros par an. Le coût de cette mesure s'élève à 1 milliard d'euros. Elle concerne plus de 2 millions d'entrepreneurs indépendants, dont 460.000 agricoles.
  • Assise sur le chiffre d'affaires, la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) est supprimée pour les deux tiers des entreprises qui en sont redevables, c'est-à-dire celles dont le chiffre d'affaires dépasse 760.000 euros. Dès 2015, ce sont environ 200.000 entreprises dont le chiffre d'affaire est inférieur à 3,2 millions d'euros, qui en seront totalement exonérées. Les autres bénéficieront de réductions. Cette mesure représente une dépense de 1 milliard d'euros. Deux autres baisses de C3S interviendront en 2016 puis en 2017, représentant un manque à gagner pour l'Etat de 2,5 milliards d'euros chacune.

Pour les finances publiques

  • Le gouvernement table sur des économies supplémentaires par rapport à celles gravées dans le PLFSS 2014. Elles sont estimées 800 millions dans l'assurance-maladie, 600 millions à l'Unedic, 300 millions prélevées sur la caisse nationale d'allocations familiales et 400 millions non décaissés au titre du programme des investissements d'avenir (PIA).
  • La non-revalorisation des pensions de retraite supérieures à 1 200 euros et des aides au logement au 1er octobre doit permettre à l'Etat de récupérer 300 millions d'euros.... Mais, les "frondeurs" socialistes ont déposé un amendement en faveur dun "dégel" des aides au logement.
  • Concrètement, la branche maladie de la Sécurité sociale restera la plus déficitaire en 2014 avec 6,1 milliards d'euros de déficit, devant la famille (2,7 milliards) et la vieillesse (1,3 milliard). En revanche, la branche accidents du travail présenterait un excédent de 300 millions d'euros. Avec le fonds de solidarité vieillesse (FSV, -3,6milliards), qui finance les cotisations retraite des chômeurs, le déficit atteindrait 13,3 milliards d'euros. Le montant des dépenses de santé pour 2014 est abaissé par rapport au PLFSS initial pour  2014. Grâce aux bons résultats réalisés en 2013, l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) est fixé à 178,3 milliards d'euros pour 2014, contre 179,1 milliards d'euros initialement.
  • Pour le gouvernement, " le PLFRSS consolide les résultats obtenus en matière de redressement des comptes sociaux. Ces résultats traduisent la poursuite de la politique de réduction des déficits sociaux menée par le Gouvernement : de 20,9 milliards d'euros
    en 2011, le déficit du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) a été ramené à 17,5 milliards d'euros en 2012 et à 15,4 milliards d'euros en 2013, et devrait atteindre 13,3 milliards d'euros en 2014. Selon les hypothèses économiques retenues, ce déficit devrait être de 8,9 milliards en 2015 et disparaître en 2017 ".