Présidence de l'UMP : piège ou tremplin pour Nicolas Sarkozy ?

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  909  mots
Même avec la casquette de président de l'UMP, Nicolas Sarkozy va retrouver Alain Juppé sur sa route
Nicolas Sarkozy sera sans doute de nouveau président de l'UMP samedi soir. Mais son score sera surveillé. S'il n'est pas massif, sa stratégie de "reconquête" en 2017 risque d'être très perturbée.

La question n'est pas de savoir si Nicolas Sarkozy sera le prochain président de l'UMP. Il le sera sans doute dés demain, samedi 29 novembre, à l'issue du vote des quelque 268.000 militants. En revanche, il faudra surveiller de près le score de l'ancien chef d' Etat. Déterminant pour l'avenir à court et moyen terme de l'UMP et de Nicolas Sarkozy.
Une chose est déjà quasi acquise. L'ancien président de la République qui a choisi de "revenir " en politique en passant par la case UMP ne renouvellera pas son score plébiscitaire d'il y a dix ans quand, déjà, il était parti à l'assaut de l'UMP. En 2004, il avait obtenu 85,9% des suffrages écrasant ses deux concurrents Christine Boutin et Nicolas Dupont-Aignan. Cette fois, s'il obtient 70% des voix dès le premier tour face à ses deux concurrents du moment Hervé Mariton et Bruno Le Maire, il sera soulagé.

De fait, revenu à la politique active depuis la mi-septembre, Nicolas Sarkozy pensait que tout allait plier devant lui. Il espérait même qu'il se retrouverait seul candidat pour la présidence de l'UMP. Mais Hervé Mariton et surtout Bruno Le Maire ont fait de la résistance. Hervé Mariton, le député de la Drôme, s'estimerait satisfait s'il réalise un score à deux chiffres. Il a fait une campagne discrète mais pleine de convictions, n'ayant pas peur de passer pour un « conservateur » sur les questions sociétales et pour un « libéral » sur le plan économique. Néanmoins il sait que sa candidature tient surtout du témoignage. A l'inverse, le député de l'Eure s'est lui senti pousser des ailes au point de (faire) croire à une « énorme surprise ».

Le Maire ne rejoindra pas Sarkozy

En vérité, Bruno Le Maire sait que Nicolas Sarkozy va gagner. Mais peu importe pour lui. L'important est d'avoir créé une dynamique. Il prend date pour l'avenir, ce sera d'autant plus facile s'il rallie environ 30% des suffrages, son espoir. Il a d'ailleurs déjà annoncé qu'il refuserait d'intégrer l'équipe dirigeante de l'UMP qui sera constituée autour de Nicolas Sarkozy. Bruno Le Maire veut garder son indépendance. Incontestablement l'ancien ministre de l'Agriculture de... Nicolas Sarkozy a pris de l'étoffe. Il a travaillé ses dossiers et développe des idées personnelles, notamment sur le renouvellement des institutions avec ses proposition sur le cumul des mandats ou le statut des élus. A 45 ans, il a donné un coup de jeune à l'UMP. Il faut reconnaître que, à son corps défendant, Nicolas Sarkozy lui a facilité le travail. L'ancien président, de l'aveu même de cadres de l'UMP, a semblé un peu trop décontracté lors de ses différents meetings ou intervention. Donnant l'impression que son logiciel de propositions est resté bloqué à 2012 tant au niveau des ses idées économiques que sociétales. Il a même réellement donné l'impression d'improviser sur la question du « mariage pour tous » semblant plus soucieux d'amadouer une salle que d'afficher des principes solidement établis.
Mais Nicolas Sarkozy n'en a cure. Ce qui compte c'est de s'emparer de l'UMP pour mieux préparer l'étape suivante : la présidentielle de 2017. Il sera toujours temps, d'ici là, de bâtir un véritable programme. L'important, pour l'instant, est qu'il se retrouve en position d'opposant numéro un à François Hollande et à... Marine Le Pen pour asseoir sa légitimité au sein de la droite et dégoûter d'éventuels rivaux pour la présidentielle de 2017.


Mal élu, difficile pour Sarkozy d'éviter une primaire ouverte

Reste que s'il n'obtient « que » 70% des suffrages lors de l'élection à la présidence de l'UMP, ses ambitions risquent d'être contrariées. Pas certain, qu'il parvienne, comme c'est son intention, à changer de « fond en comble » l'UMP, voire à en modifier le nom. L'opposition interne pourrait se montrer plus résolue qu'il le pense. On sait aussi qu'il voudrait éviter une primaire en 2016, surtout si elle est ouverte aux sympathisants du centre et de l'UDI, nettement moins « sarkolatres ».

Là aussi, il n'est pas du tout évident que les militants lui obéissent sans rechigner. Surtout, Alain Juppé veille au grain. Le maire de Bordeaux a renoncé à postuler à la présidence de l'UMP, préférant se concentrer sur la primaire de 2016. Il sait ses chances réelles si cette primaire est très ouverte, notamment en direction du centre. D'ailleurs, François Bayrou s'est dit prêt à l'aider. Renoncer à la primaire - ou la limiter - présente donc un double danger possible pour Nicolas Sarkozy. Soit Alain Juppé passe outre et décide tout de même de se présenter à la présidentielle de 2017. Dans ce cas, comme en 1995 - Chirac/Balladur -, la droite se retrouve avec deux candidats au premier tour... Le FN de Marine Le Pen doit en rêver. Soit Alain Juppé renonce, mais un candidat de l'UDI, voire François Bayrou lui-même, sort du bois, pour ne pas se retrouver sous la coupe de Nicolas Sarkozy... Là aussi, le scénario est très dangereux face à Marine Le Pen.
Pour Nicolas Sarkozy donc, la route n'est pas totalement dégagée pour sa " revanche" - son unique objectif- de 2017. Le score qu'il obtiendra demain soir à l'UMP sera une première indication sur le niveau des difficultés qui l'attendent durant deux ans. A moins que tous ce scénario s'effondre, si Nicolas Sarkozy est rattrapé par un juge...