Dans un CD volé à l'UBS, trois milliards d'euros

Par latribune.fr  |   |  581  mots
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Selon le Süddeutsche Zeitung, les données contenues dans un CD volé à la banque suisse permettraient de retrouver la trace de trois milliards d'euros qui avaient échappé aux autorités allemandes.Le fisc allemand pourrait empocher la moitié de ce montant.

Décidément, les autorités et les banques suisses jouent de malchance en Allemagne. Un peu plus d?une semaine après le rejet par le Bundesrat de l?accord fiscal germano-suisse, qui devait mettre un terme à la querelle fiscale entre les deux pays, le quotidien munichois Süddeutsche Zeitung (SZ) croit savoir que des contribuables allemands ont déposé trois milliards d?euros dans la seule banque UBS sans avoir à payer un centime d?impôt outre-Rhin.

750 «fondations»

Selon la SZ, c?est ce qui ressort de l?analyse des données contenues dans un CD volé à UBS et revendu ensuite au procureur de Bochum, en Rhénanie du Nord Westphalie. Parmi les moyens utilisés pour échapper à l?impôt, on remarque notamment la présence de 750 «fondations», des structures juridiques qui permettent de se dissimuler derrière un ayant droit fictif pour échapper au fisc.

Chiffres difficiles à obtenir

Cette estimation est intéressante, car les autorités suisses refusent d?estimer officiellement les montants placés dans la Confédération pour échapper à l?impôt. Dans le débat autour de l?accord fiscal, Berlin avait estimé à 10 milliards d?euros la somme que pourrait rapporter l?indemnité forfaitaire destiné à «blanchir» les évadés fiscaux allemands en Suisse. Le patron du syndicat allemand de l?administration fiscale estime à 150 milliards d?euros l?ensemble des fonds allemands placés en Suisse pour des raisons fiscales.

La Rhénanie du Nord Westphalie en pointe

Les autorités de Rhénanie du Nord Westphalie sont à la pointe de la lutte contre l?évasion fiscale en Suisse. Le ministre des Finances du Land, Norbert Walter-Borjans, a été le porte-drapeau de la lutte contre l?accord fiscal au Bundesrat et sa stratégie consiste à obtenir la levée totale du secret bancaire suisse pour les Allemands en exerçant une pression constante sur les banques suisses par l?achat de CD volés. Début novembre, des perquisitions avaient été menées dans toute l?Allemagne.

1,3 milliard d?euros de plus dans les caisses allemandes

Cette stratégie irrite les Helvètes, mais elle porte ses fruits. Depuis 2007 et les premiers achats de CD de données, 40.000 personnes sont venues se dénoncer spontanément aux autorités fiscales allemandes. Elles échappent ainsi à la lourde amende prévue en cas d?évasion fiscale. Selon le procureur de Düsseldorf, le fisc allemand pourrait, grâce aux données contenues dans ces CD, récupérer 1,3 milliard d?euros. L?opération est rentable puisque le CD venant de l?UBS évoqué par la SZ aurait coûté «seulement» 3,5 millions d?euros. Reste l?argument moral souvent avancé par la Suisse: peut-on rémunérer des voleurs au nom de la lutte contre l?évasion fiscale? C'est pour éviter ces achats que Berne veut imposer les accords "Rubik".

Sort de l?accord « Rubik»

Cette nouvelle péripétie de la guérilla germano-suisse sur le fisc pourrait apporter de l?eau au moulin des opposants et des partisans de l?accord fiscal qui fait désormais l?objet d?une commission mixte paritaire entre Bundestag et Bundesrat. D?un côté, il prouve l?efficacité de l?achat des CD de données, de l?autre, il prouve que l?accord pourrait rapporter gros et rapidement au fisc allemand. L?enjeu politique germano-allemand décidera sans doute du sort de cet accord dont le SPD ne veut absolument pas avant les élections de 2013.