Europe : la "grande coalition" allemande poursuivra la politique du gouvernement Merkel II

Par Romaric Godin  |   |  666  mots
Angela Merkel a imposé ses vues sur l'Europe aux Sociaux-démocrates
Si Angela Merkel a fait un pas en direction des sociaux-démocrates en acceptant le principe d'un salaire minimum généralisé, pas question en revanche de toucher à la politique européenne. Berlin campera sur une position "dure".

SPD et CDU abordent la dernière ligne droite des négociations pour construire le programme du nouveau gouvernement allemand de « grande coalition. » Selon la presse allemande, un contrat de coalition pourrait être signé dans la nuit de mardi à mercredi. Lundi soir, un député écologiste a déjà dévoilé le projet provisoire de contrat qui permet, sur certains sujets de disposer d'une vision quasi-définitive de la politique future du gouvernement fédéral. C'est notamment le cas sur l'Europe.

Un manque d'ambition

Sur ce point, on peut parler d'un manque d'ambition évident. Le document se contente de répéter les grands axes de la stratégie menée par Angela Merkel sous le gouvernement précédent. L'engagement du gouvernement à sauver l'euro à tout prix est rappelé : « l'Allemagne reste attachée à la monnaie commune. Notre but est et reste de mener l'Europe renforcée hors de la crise. »

Poursuivre l'austérité

Mais le nouveau gouvernement demeure également fidèle au maintien des politiques de dévaluations internes et d'austérité dans les pays en crise. « Le niveau élevé de l'endettement doit être réduit en Europe. (…) La politique de consolidation budgétaire doit être poursuivie et combinée avec des réformes pour une croissance structurelle et des investissements futurs durables », indique le projet. On ne saurait mieux résumer la politique menée dans les pays périphériques depuis 2010-2011. La politique allemande ne bougera donc pas d'un pouce sur l'Europe.

De futurs aides modelées sur le cas chypriote ?

Mieux même, la nouvelle coalition dresse le contour des futures aides : « l'appel au MES doit se faire en dernier recours. » Et d'ajouter : « nous voulons que les pays en crise participent fortement à leur propre sauvetage. » Une façon de prévenir que ce qui a été imposé à Chypre en mars et avril pourrait bien être la norme désormais. Les déposants slovènes peuvent trembler… Le but est le même que sous la coalition CDU-FDP : dissuader les pays en crise de solliciter l'aide pour épargner les contribuables allemands.

La défaite des Sociaux-démocrates

Les Sociaux-démocrates ont donc dû inscrire dans le marbre les termes de leur défaite sur la question d'une plus forte solidarité. « Le principe voulant que chaque État membre reste lui-même responsable de ses propres engagements doit demeurer. Toute forme de socialisation des dettes souveraines mettrait en danger la nécessaire orientation des politiques nationales. La responsabilité budgétaire nationale et la responsabilité commune et supranationale sont incompatibles. » Trois phrases qui suffisent à rejeter toute forme d'euro-obligation ou de fonds d'amortissement commun, comme le proposait la SPD durant sa campagne.

Une révision des traités

Mieux même, le projet de la CDU de modifier les traités pour renforcer les contraintes budgétaires a été adopté par la coalition. « Pour empêcher les problèmes futurs dans l'UEM, les politiques budgétaires et les évolutions de l'endettement doivent être mieux surveillées. » L'Allemagne proposera donc une réforme des traités afin de mettre en place des « contrats » entre les Etats et l'UE afin de réaliser les « buts de compétitivité, de finances saines et durables, de croissance et d'emplois. »

Concrètement : les Etats devront s'engager à certains objectifs et seront contraints de s'y tenir. La Commission aura alors les moyens de les contraindre si les budgets ne sont pas satisfaisants. Seules concessions faites à la SPD : l'objectif de l'emploi et la « légitimation démocratique » de ces contrats.

Rien sur l'union bancaire

Last, but not least, le contrat de coalition est totalement muet sur l'Union bancaire et son processus de résolution. C'est pourtant un des sujets les plus brûlants et les plus urgents du moment et ceci augure bien mal des négociations européennes sur le sujet. Plus que jamais, l'Allemagne semble donc s'enfermer dans sa propre logique. L'espoir d'un changement, en tout cas sur ce terrain-là, avec l'arrivée au gouvernement des Sociaux-démocrates aura fait long feu.