Les socialistes pourraient redevenir le premier groupe au parlement européen

Par Romaric Godin  |   |  951  mots
Les Socialistes seraient à nouveau le premier groupe au parlement européen
Un sondage a réalisé des projections concernant les groupes au prochain parlement européen. Le centre-droit s'effondrerait et les Eurosceptiques atteindraient près de 30 % des élus.

Selon une enquête réalisée pour PollWatch d'après un modèle développé par des professeurs du Trinity College de Dublin et de la London School of Economics, le centre-gauche pourrait être le premier groupe politique du prochain parlement européen. Ce sondage, réalisé selon une méthode qui, en 2009, avait permis de prédire 98 % de la répartition par siège, estime que le groupe Socialistes & Démocrates (S&D) pourrait disposer en mai prochain de 221 sièges, soit 29,4 % des votes au parlement, contre 202 voix au parti populaire européen de centre-droit, son principal « rival. »

France et Allemagne assurent la remontée des Sociaux-démocrates

Le centre-gauche obtiendrait 8 députés de plus dans un parlement qui en comptera 15 de moins. Une bonne performance qui tient en réalité plus de la stabilisation que de la progression. En revanche, le centre-droit connaîtrait une sévère défaite avec 72 députés de moins, soit un poids dans le parlement en recul de neuf points de pourcentage (de 35,8 % à 26,9 %).

Aussi étrange que cela puisse paraître, c'est la France et l'Allemagne qui devrait être les socles de la progression des Sociaux-démocrates. Ces deux pays devraient apporter 12 sièges de plus au groupe S&D (5 pour le PS et 7 pour la SPD) en raison principalement de la très mauvaise performance des socialistes dans ces deux pays en 2009. Voici cinq ans, la SPD n'avait obtenu que 20,8 % des voix, son plus mauvais résultat pour un scrutin national depuis 1949, tandis que le PS n'avait obtenu que 16,5 %. Il y aurait cette année une forme de « rattrapage. »

Italie et France plombent le PPE

En revanche, les partis de centre-droit qui avaient réalisé de bonnes performances en 2009 accusent le coup. Il y a à cela plusieurs raisons. La première, c'est l'usure du pouvoir en Espagne (- 5 sièges) ou en Pologne (-12 sièges). C'est aussi les difficultés internes du camp conservateur en France (-10 sièges) ou encore en Italie (-14 sièges). Quant au cas de la CDU/CSU en Allemagne qui, selon l'étude, perdrait 7 sièges alors qu'elle devrait légèrement progresser dans les sondages, ce recul s'expliquerait à la fois par le nouveau mode de scrutin qui place la limite pour participer au partage des sièges à 3 % des voix (au lieu de 5 %) et par les trois sièges en moins accordés à l'Allemagne cette année (96 au lieu de 99).

Recul des groupes qui forgent les compromis

Reste que, au final, les deux grands groupes sont encore très loin de pouvoir obtenir la majorité absolue nécessaire à « élire » le président de la Commission (376 voix). Il faudra donc bâtir un compromis sur le président de la Commission. On notera cependant que la majorité des quatre grands groupes qui forgent habituellement les compromis (S&D, PPE, libéraux de l'ALDE et Verts) serait bien moindre et passerait de 79,8 % des sièges à 70,7 %.

Progression de la gauche communiste

Si donc il n'y aura pas de « majorité » pour les partis eurosceptiques, il y aura bien une montée de cette tendance. Mais sous des formes bien diverses. Le groupe communiste de la GUE (Gauche unitaire européenne) pourrait ainsi passer de 35 à 56 membres et peser pour 7,5 % du futur parlement, en grande partie en raison de la poussée de Syriza et du Parti communiste (KKE) en Grèce et d'Izquierda Unida en Espagne, mais aussi du Front de gauche français (qui en 2009 n'avait obtenu que 6 % des voix) : ces trois pays apporteraient 14 députés européens de plus au groupe GUE.

La montée des Eurosceptiques de droite

De l'autre côté de l'échiquier politique, le groupe EFD (Europe des Libertés et de la Démocratie) qui regroupe, entre autres, le parti eurosceptique britannique UKIP et la Ligue du Nord italienne ne devrait pas progresser (30 sièges au lieu de 32) puisque si le UKIP a le vent en poupe au Royaume-Uni et pourrait doubler le nombre de ses députés européens, la Ligue du Nord pourrait voir sa représentation divisée par deux.

Les "non inscrits" tripleraient leur score

Les grands vainqueurs se seront donc les « non-inscrits » qui passeraient de 31 à 92, soit trois fois plus. Parmi ces « non-inscrits », le principal contingent viendra de France où le FN pourrait compter sur 22 élus au lieu de 3, mais aussi de nouveaux venus en provenance d'Italie avec le « Mouvement 5 Etoiles » de Beppe Grillo (24 élus), d'Allemagne avec le parti eurosceptique Alternative für Deutschland (7 élus). On y trouvera aussi des partis fédéralistes comme l'UPyD espagnol qui pourrait disposer de 5 élus ou des partis néo-nazis franchement infréquentables comme les Hongrois de Jobbik (3 députés, comme en 2009) ou les Grecs d'Aube Dorée (3 élus). Tous ces partis ont en réalité peu de choses en commun et ne devraient pas pouvoir constituer un groupe. D'autant que pour former un groupe, il faut non seulement 25 députés, mais aussi des députés provenant de 7 pays différents de l'UE.

Pas de changement dans les faits ?

Le poids de ces partis ne sera donc pas en mesure de peser sur la capacité législative du parlement européen qui, on l'a vu, bénéficiera encore d'une solide majorité europhile. Mais ils pourraient apporter un ton différent au sein du parlement. A Bruxelles, on se montre cependant assez serein. « Ces partis participent en fait assez peu à la vie du parlement, parce qu'ils sont précisément opposés à l'UE comme système », indique un responsable de la communication du parlement. Autrement dit, malgré cette montée du vote de protestation, tout devrait au parlement continuer comme maintenant…