Face à la hausse du franc, la Suisse impose des taux négatifs

Par Romaric Godin  |   |  471  mots
Les dépôts bancaires seront taxés à 0,25 % par la BNS
La banque centrale suisse imposera une taxe de 0,25 % sur les dépôt le 22 janvier. Il s'agit de défendre le seuil de 1,20 euro par franc, sous pression ses derniers jours.

Personne ne s'y attendait, mais la Banque nationale suisse (BNS) a frappé fort ce jeudi 20 décembre au matin. Dans un simple communiqué, elle a annoncé que, désormais, les dépôts des banques dans ses comptes seraient frappés d'un taux négatif de 0,25 % à partir de 10 millions de francs suisses. Chaque franc supplémentaire déposé à la BNS sera donc taxé à hauteur de 0,25 centime. Voici une semaine, dans sa réunion habituelle, la banque centrale helvétique avait jugé bon de ne pas recourir à cette arme, sa volte-face rapide constitue donc une surprise.

Défendre le seuil

Mais pour la BNS, il s'agit de défendre le cours du franc suisse. Depuis l'été 2011, la BNS a indiqué qu'elle ne tolérerait plus un euro plus faible que 1,20 franc. A l'époque, le franc était venu tutoyer la parité avec l'euro, jusqu'à 1,07 euro par franc. Un niveau intolérable pour l'économie suisse, avait alors jugé la BNS qui était intervenue massivement sur les marchés pour faire respecter son « seuil. » Mais ce seuil est à nouveau attaqué. Pour deux raisons.

L'effet BCE

La première, c'est la politique de la BCE. En instaurant des taux de dépôt négatifs dès juin, en annonçant sa volonté de gonfler son bilan d'un tiers et en préparant le terrain à un assouplissement quantitatif de grande envergure, Mario Draghi a naturellement pesé sur l'euro. Et mécaniquement renforcé le franc suisse. Structurellement, il était très difficile pour la BNS de tenir le seuil de 1,20 euro avec un taux de dépôt supérieur de 20 points de base à celui de la BCE. Il y est à présent inférieur de 5 points de base.

L'effet rouble

La seconde raison est plus conjoncturelle. Le franc suisse reste une « valeur refuge » pour les investisseurs. La chute des marchés dans la foulée des tensions sur le rouble a conduit beaucoup d'entre eux à reprendre des « positions de repli » dans la Confédération. Et mécaniquement, le franc s'est raffermi. Au point de venir frôler le fameux seuil, jusqu'à 1,2009 euro pour un franc mercredi. La BNS devait donc agir vite.

Suffisant ?

Ce taux négatif sera appliqué à partir du 22 janvier, mais d'ores et déjà, la menace a fait son effet, en quelques minutes, le franc s'est déprécié jusqu'à 1,2075 euro pour un franc. Reste à savoir si cette mesure sera durablement efficace pour maintenir le franc dans les limites fixées par la BNS face à la volonté de la BCE et à d'éventuelles autres tensions. Reste également à déterminer les effets sur l'économie suisse de ces taux de dépôt négatif. Le secteur bancaire suisse, déjà sous pression après la fin du secret bancaire, en sera-t-il affecté ?

Le communiqué de la BNS est ici.