Pas trop de « French Bashing » cette année à Davos !

Par Philippe Mabille  |   |  813  mots
Oubliée la Une de Newsweek sur "The Fall of France" ? La petite musique de la politique de l'offre chantée par François Hollande et vendue par les ministres présents à Davos a commencé de changer l'image d'un pays qui fait encore figure d'homme malade de l'Europe. Reste à délivrer les réformes promises...

Certes, la France fait encore figure d'homme malade de l'Europe, comme l'était l'Allemagne d'avant les réformes Schroeder. Mais que l'on prenne cela pour de l'indifférence ou bien comme l'espoir que le virage pris par François Hollande va enfin dans la bonne direction, on entend moins de critiques contre l'immobilisme de notre pays cette année dans le temple du libéralisme qu'est le Forum économique mondial...

On n'entend il est vrai pas beaucoup, ni très souvent la voix de la France à Davos. Nicolas Sarkozy est venu deux fois, pour critiquer les financiers, « cause de la crise la plus grave depuis 1929 » et souligner que s'il n'avait pas été là… Non, la France n'est pas vraiment l'amie de Davos, qui le lui rend bien par beaucoup d'indifférence. On ne s'étonne même pas que François Hollande n'ait toujours pas répondu à l'invitation qui lui est renouvelée chaque année, comme tous les grands dirigeants politiques mondiaux. Peut-être en 2015, pour défendre les positions de la France avant les négociations de Paris sur le traité climatique, dont le secrétaire général de l'ONU, espère la conclusion…

Mais, en ce début d'année 2014, la France n'est pas vraiment un sujet de discussion, à part pour quelques médias anglo-saxons comme Newsweek, qui a consacré sa Une à la "Chute de la France", comparant la politique de François Hollande à la révocation de l'édit de Nantes qui a fait fuir les Protestants. Pour contrer ce discours qui devient insignifiant et ridicule à force d'être excessif, trois ministres français sont attendus : Fleur Pellerin (PME et numérique), présente dés l'ouverture mercredi 24 janvier ; puis Laurent Fabius (Affaires étrangères), sur la route de Montreux et de la négociation sur la Syrie (il verra certains des protagonistes à Davos, dont le chef de l'opposition et le président iranien) ; et enfin, pour deux jours pleins, le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, bien décidé à faire du forum économique mondial une plate-forme pour "vendre" les réformes menées en France, dont il se dit un des inspirateurs, et s'opposer à tout « French Bashing ».

Comment retrouver la « croissance naturelle » ?

C'est Fleur Pellerin qui a ouvert le bal des ministres français amis de Davos et objectivement, elle s'en est tirée comme une fleur, si l'on ose dire… La ministre des PME, de l'Innovation et de l'Économie numérique est intervenue dans le panel consacré aux moyens de retrouver «la croissance naturelle» et a décliné sans faire sourire «la politique de l'offre» annoncée le 14 janvier par François Hollande.

Face à la journaliste du Financial Times, qui a attaqué d'emblée en affirmant que «la France est aujourd'hui le pays qui inquiète le plus les marchés…», Fleur Pellerin a retourné l'assistance en reconnaissant les retards de la France dans le soutien à l'investissement des entreprises, et en assurant que les mesures prises ou à venir allaient y remédier. « Nous ne sommes pas un gouvernement conservateur, nous sommes pour les réformes.», a-t-elle crânement déclamé, sans masquer "la difficulté de convaincre l'opinion de la nécessité de ces réformes".

Un point a particulièrement séduit : la confirmation du voyage de François Hollande à San Francisco, après sa visite d'Etat à Washington chez les Obama le 11 février. Qu'un président de la République qui se dit converti à la social-démocratie (traduction à Davos, donc à la politique de réforme menée en Allemagne ou dans les pays du Nord de l'Europe) fasse ainsi le premier voyage d'un chef de l'Etat français depuis celle de François Mitterrand à l'Université de Berkeley en 1984, voilà de quoi frapper les esprits alors que le tout Davos est converti à l'économie numérique. Chacun sait d'ailleurs que la France réussit plutôt bien dans la Silicon Valley puisqu'elle y compte plus de 50.000 expatriés... Fleur Pellerin qui sera du voyage avec le président de la République a d'ailleurs profité de sa présence à Davos pour rencontrer des investisseurs américains, dont le patron de Nest, spécialiste de la maison connectée récemment racheté par Google.

Février devrait être un temps fort pour le renforcement de l'écosystème français des start-up, avec notamment la réforme du crowdfunding et le lancement de la mission confiée à Philippe Lemoine, le patron de LaSer sur les conséquences de la révolution numérique sur l'ensemble des secteurs de l'économie. L'enjeu symbolique du voyage de François Hollande à San Francisco est bien de montrer que la France a pris la mesure de l'enjeu et que l'innovation fait désormais partie du logiciel de la politique économique d'un pays en train de faire sa « révolution copernicienne », selon le mot de Pierre Moscovici.

Davos n'en demandait pas tant…