Des communes sans candidats aux municipales, la faute de la parité ?

Par Marina Torre  |   |  727  mots
Le gouvernement prévoit que 20.000 femmes supplémentaires seront conseillères municipales en 2014. / Reuters
Soixante-quatre communes n’ont pas trouvé de candidats aux élections municipales des 23 et 30 mars. Si les statistiques prouvent que la loi sur la parité n’est pas en cause, le recrutement des femmes pour ce scrutin local reste ardu.

Devenir conseiller(e) municipale? Non merci! soixante-quatre communes de France n'ont pas pu présenter de liste pour les élections municipales qui se tiendront les 23 et 30 mars. Avant même la fin du dépôt des candidatures au scrutin municipal, le 6 mars à 18h00, les préfectures sonnaient l'alarme sur l'absence de postulants dans certaines communes.

Parmi les causes invoquées pour expliquer de cette situation : l'obligation de présenter des listes paritaires dans les communes d'au moins 1000 habitants (contre 3500 précédemment). En pleine célébration de la Journée internationale de la Femme, la question a de quoi déranger.

Non, l'obligation de respecter la parité n'est pas en cause

Or, les chiffres issus des dépôts de candidature infirment tout simplement l'hypothèse. En effet, parmi les 9 734 communes de plus de 1000 habitants concernées par la loi sur la parité… une seule n'a aucun candidat. Il s'agit de Gironde-sur-Dropt (33) qui dispose de trois mois pour constituer et déposer une liste.

Le ministère de l'Intérieur en conclu que :

 " L'extension du scrutin de liste proportionnel et paritaire décidé par la représentation nationale a donc bien fonctionné."

D'ailleurs, avant même que la loi sur la parité ne soit étendue aux communes de plus de 1000 habitants, certains signes indiquaient que l'égalité hommes-femmes progressait dans les petites communes. Ainsi, dans celles de moins de 3.500 habitants, la proportion de femmes conseillères municipales se rapproche de la moyenne nationale (35%) à 32,01% au 1er janvier 2014.

"Plus difficile de trouver des candidates"

Pour autant, dans certaines communes, comme à Epernay par exemple, trouver des femmes prête à intégrer le conseil municipal se révèle ardu.  "Il est peut-être plus difficile de trouver des candidates que des candidats", reconnaît Armelle Danet, la présidente de l'Association Elles aussi, une association qui rassemble des femmes élues. Cette dernière rappelle que, dans la plupart des cas, les têtes de liste sont des hommes. "Ils n'ont peut-être pas la même approche que des femmes pour les convaincre de rejoindre leur liste", se demande-t-elle.

 "Souvent, il faut aussi que le compagnon soit d'accord. Ce qui n'est pas évident. J'ai déjà entendu parler d'un cas de menace de divorce ", raconte-t-elle. Un cas extrême qui met en relief une vraie difficulté de recrutement posée par la répartition des tâches au sein des couples. En effet, remplir des responsabilités d'élues prend du temps. Surtout si les candidates veulent obtenir une délégation.

20.000 conseillères de plus, mais à quel poste? 

En raison de la loi sur la parité, quelque 20.000 femmes de plus devraient devenir conseillère municipales en 2014, d'après des chiffres confirmés à la Tribune par le Haut conseil à l'égalité entre femmes et hommes. Un chiffre contesté par d'autres observateurs qui prévoient plutôt 15.000 conseillères de plus. En 2008, 181.608 femmes avaient été élues dans un conseil municipal, ce qui portait le taux de féminisation de ces derniers à 35%. Ces élues restent cependant cantonnées à des attributions hiérarchiques "moins convoitées" comme la petite enfance ou les affaires sociales, comme a tenté de le démontrer l'universitaire strasbourgeois Michel Koebel à partir d'une étude de cas. Ce dernier commente:

"La loi sur la parité, en faisant croire aux femmes qu'elles pourraient atteindre tous les postes de pouvoir, n'a fait que transformer la chape de plomb de la domination masculine en plafond de verre. Il reste beaucoup à faire dans ce domaine, et en particulier chez les femmes elles-mêmes, qui souvent participent à leur propre domination en croyant qu'elles ont moins de compétences que les hommes pour s'engager dans un mandat local, et, quand elles s'engagent, qu'elles sont moins capables qu'eux de s'occuper des finances, de l'urbanisme ou du sport, et qu'elles sont plus faites pour l'enfance, la famille ou les affaires scolaires ou sociales."

Combien de candidates têtes de liste? 

Enfin si les conseils se féminisent, rien ne permet de savoir dans quelle proportion l'égalité progressera chez les maires. Les femmes n'étaient que 5104 sur 36.718 communes à ceindre l'écharpe tricolore après le scrutin de 2008. Seront-elles plus nombreuses cette année? Réponse après le second tour, le 30 mars. En attendant, le nombre de candidates têtes de liste devrait être dévoilé par le ministère de l'Intérieur le 11 ou 12 mars.