Climat : des actionnaires de Shell montent au créneau pour contraindre la major à des objectifs plus ambitieux

Par latribune.fr  |   |  756  mots
Shell va publier début 2024 une mise à jour de sa stratégie de transition énergétique. De quoi peut-être calmer les tensions avec les associations écologistes. (Crédits : Toby Melville)
Un groupe d'actionnaires de Shell, parmi eux le gestionnaire européen d'actifs Amundi, va déposer une résolution en vue de l'assemblée générale du groupe. Celle-ci vise à contraindre le géant des hydrocarbures à définir un objectif de réduction de ses émissions en conformité avec l'Accord de Paris. Un texte qui aurait, selon lui, « des conséquences négatives pour ses consommateurs » et serait « contraire aux intérêts de l'entreprise et de ses actionnaires ».

Comme l'année précédente, un groupe d'actionnaires part en lutte contre Shell en vue de son assemblée générale annuelle, dont la date n'est pas encore connue. 27 investisseurs vont déposer une résolution dans le but de contraindre le géant britannique  des hydrocarbures à aller plus loin sur ses engagements en faveur du climat.

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Concrètement, le collectif souhaite que Shell « aligne ses objectifs de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre, y compris celles liées à l'utilisation de ses produits (Scope 3), à moyen terme avec l'objectif de l'Accord de Paris », selon un communiqué publié ce lundi 15 janvier par l'organisation d'actionnaires activistes Follow This, à l'origine de cette initiative.

À savoir « limiter le réchauffement climatique à 2 degrés par rapport aux niveaux pré-industriels et poursuivre les efforts pour limiter l'augmentation des températures à 1,5 degré ». Le texte prévoit aussi de laisser le conseil d'administration élaborer une stratégie pour atteindre ces objectifs.

Grossir encore le collectif

Parmi les 27 investisseurs au dépôt de la résolution figurent notamment le géant européen de la gestion d'actifs Amundi. Ce groupement représente un total de 3.900 milliards d'euros d'actions de Shell et mobilisent 3,4% du capital de la major pour soutenir cette résolution climatique, peut-on lire dans le communiqué.

En associant ces investisseurs, le fondateur de Follow This, Mark Van Baal, espère que d'autres actionnaires suivront le mouvement et voteront en faveur du texte. Pour lui, « les grands actionnaires possèdent la clé pour s'attaquer à la crise climatique grâce à leurs votes aux assemblées générales ».

« En 2023, Shell n'a pas amélioré ses objectifs climatiques et le nouveau directeur général semble faire marche arrière en matière d'action climatique », souligne le communiqué de FollowThis.

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Shell fustige une résolution « irréaliste et simpliste »

Pour le conseil d'administration de Shell, la résolution de Follow This est « irréaliste et simpliste », aurait « des conséquences négatives pour ses consommateurs » et serait « contraire aux intérêts de l'entreprise et de ses actionnaires ».

Cette résolution est d'ailleurs quasi identique à celle de l'année passée. Car ce n'est en effet pas la première fois que le collectif d'actionnaires Follow This propose une résolution climat au vote des actionnaires lors de l'assemblée générale de Shell. En mai 2023, elle avait reçu 20% de votes favorables. Cela signifie que 80% des actionnaires avaient tout de même voté en faveur du plan de transition énergétique du groupe.

Pour autant, le géant britannique avait indiqué dans un communiqué que ce résultat nécessitait « de consulter les actionnaires pour comprendre les raisons ». Le début de la réunion avait par ailleurs été mouvementé : des dizaines de manifestants pro-environnement avaient interrompu les discours d'introduction des dirigeants et d'autres avaient été sortis par des agents de sécurité de la salle.

Les assemblées générales d'autres entreprises liées au secteur des hydrocarbures avaient aussi été troublées l'année dernière. La groupe BP avait fait face à une part notable d'actionnaires remontés contre sa décision de ralentir sa transition énergétique, mais avait finalement obtenu le soutien d'une large majorité d'entre eux. Celles de Barclays et HSBC avaient également été perturbées, entre autres, car ces banques sont accusées par de nombreuses organisations écologistes de trop financer les extractions d'hydrocarbures polluants.

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Revue à la baisse de ambitions climatiques

Shell a aussi indiqué que le groupe va publier début 2024 une mise à jour de sa stratégie de transition énergétique. De quoi peut-être calmer les tensions avec les associations écologistes.

Encore faut-il qu'il aille assez loin dans ses ambitions. En juin dernier, Shell a annoncé que sa production de pétrole resterait « stable » jusqu'en 2030, alors qu'il avait présenté en 2021 des objectifs de réduction de 1 à 2% par an. Et son directeur général Wael Sawan avait estimé un mois plus tard que réduire la production d'hydrocarbures actuellement serait « dangereux et irresponsable » et pourrait faire à nouveau flamber les factures. Il a également affirmé que le monde avait encore « désespérément besoin de pétrole et gaz » car le virage vers les énergies renouvelables n'était pas assez rapide pour les remplacer.

(Avec AFP)