Electricité : Scholz fait un pas vers Macron pour réformer le marché européen

Par latribune.fr  |   |  907  mots
« La France et l'Allemagne forment un couple très important », a annoncé Olaf Scholz, le chancelier allemand. (Crédits : JOHANNA GERON)
Les chefs d'Etat allemands et français se sont mis d'accord pour « chercher à conclure d'ici la fin du mois un accord » sur une réforme du marché européen de l'électricité très critiqué dans l'Hexagone, a annoncé Emmanuel Macron. Olaf Scholz, le chancelier allemand, a affirmé de son côté qu'il « est possible de développer un point de vue commun », après des mois de blocage.

L'opération séduction d'Emmanuel Macron pour amener l'Allemagne à réformer le marché européen de l'électricité porter ses fruits, si l'on en croit les déclarations du président français ce mardi.

« Nous avons acté de pouvoir travailler ensemble (...) dans les semaines à venir pour chercher à conclure d'ici la fin du mois un accord nécessaire », a-t-il déclaré à Hambourg à l'issue de discussions avec le chancelier, Olaf Scholz.

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De son côté, le chancelier allemand s'est félicité de « discussions intenses et constructives » entre les deux gouvernements. Celles-ci devraient permettre de « développer des réponses communes ». « Nous voulons ensemble faire en sorte que l'Europe conserve sa souveraineté dans ce domaine et que le système énergétique européen puisse assurer la croissance et des prix de l'électricité bas », a-t-il ajouté.

Le blocage d'une réforme des règles de fixation des prix de l'électricité en Europe pourrait donc bien résolu d'ici la fin du mois. Pourtant, les deux pays partent de loin et ont campé sur leurs positions pendant plusieurs mois. Et pour cause, ils « partent de modèles nationaux qui sont extrêmement différents », a reconnu Emmanuel Macron à l'issue de deux jours de réunion avec les chefs d'Etat et les ministres des deux pays.

Le nucléaire au centre du blocage

A l'origine du désaccord : la France veut notamment une prise en compte des centrales nucléaires déjà existantes dans les mécanismes de contrat à long terme, assortis de compensations financières, prévus par la réforme de la Commission européenne. L'Allemagne qui a abandonné l'atome, y est réfractaire. Elle souhaite privilégier les investissements dans les énergies renouvelables.

Concrètement, l'exécutif tricolore entend administrer les prix de son électricité, afin qu'ils soient les plus bas possibles pour les consommateurs. Une décision jugée inacceptable, jusqu'alors par son voisin allemand qui lui fait fermement barrage, redoutant des distorsions de concurrence. Résultat, l'Hexagone prépare un plan B qui consisterait à imposer, au niveau national, un prix plafond à EDF pour la vente de sa production nucléaire, en court-circuitant l'agenda européen.

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Initialement, le gouvernement d'Emmanuel Macron voulait compenser EDF en cas de baisse du cours au-dessus d'un certain seuil et lui demander de rembourser la différence en cas de hausse du cours au-dessus d'un certain prix, dans le but de maintenir une stabilité des prix de l'électricité pour les consommateurs. Emmanuel Macron a même promis aux Français d'annoncer une reprise du « contrôle du prix de notre électricité » dès le mois d'octobre.

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Mais ce mécanisme n'était pas, jusqu'à aujourd'hui, vu d'un bon œil par Berlin. Il refusait que Paris puisse réguler son parc nucléaire à la demande du gouvernement. L'Allemagne, de son côté, subventionne aussi massivement son industrie, afin de la protéger de la flambée des cours de l'énergie.

« Il préférerait que la France soutienne également ses industriels, plutôt que de la laisser bénéficier d'un prix annoncé sur le long terme comme relativement stable. En fait, l'Allemagne ne dit pas qu'elle s'oppose au nucléaire français, mais qu'elle est contre le fait qu'il soit vendu à un prix inférieur à celui du marché. C'est-à-dire, en d'autres termes, qu'elle est contre le nucléaire français compétitif », expliquait, à La Tribune, l'économiste Jacques Percebois, qui siégeait à la Commission Champsaur de 2009, à l'origine de l'instauration d'un accès régulé à l'énergie nucléaire (ARENH).

L'Allemagne fait un pas

Le froid dans les relations franco-allemandes, centré autour de cette réforme des prix de l'électricité européenne, semble s'être dégelé ce mardi.

« La France et l'Allemagne forment un couple très important. Il y a parfois des perspectives différentes sur certaines questions, mais il est possible de développer un point de vue commun », a estimé mardi le chancelier Olaf Scholz, à l'issue d'un séminaire franco-allemand.

« Nous avons le devoir, je dirais moral, politique, historique, de bâtir des voies communes pour avancer pour nos deux pays et pour notre Europe », a renchéri le président français Emmanuel Macron au cours de cette conférence. « Une Europe plus forte et plus unie est indispensable, et pour cela une Allemagne et une France plus proches sont une condition nécessaire », a-t-il martelé. « Si la France et l'Allemagne ne savent pas s'entendre, l'Europe est bloquée », a encore observé le président français.

Le chef de l'Etat français a loué le travail effectué lors de ce séminaire. Sur tous les dossiers, c'est « l'esprit de Hambourg qui a régné » a-t-il assuré, c'est-à-dire une « volonté amicale de mieux se comprendre de manière informelle pour pouvoir avancer ». « Nous verrons les fruits de Hambourg ... grâce aux graines que nous avons semées durant ces deux journées », a-t-il encore assuré.

Les ministres de l'Energie de l'UE se réuniront le 17 octobre pour tenter de trouver un compromis. Il leur permettrait d'entamer des négociations finales avec le Parlement européen avec l'objectif, très incertain, de boucler la réforme cette année.

(Avec AFP)