Première confrontation directe pour la Grèce à l'Eurogroupe

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Premiere confrontation directe pour la grece a l'eurogroupe[reuters.com]
(Crédits : Yves Herman)

par Costas Pitas et Alastair Macdonald

ATHENES/BRUXELLES (Reuters) - La réunion de l'Eurogroupe mercredi s'annonce comme la première confrontation directe entre le ministre grec des Finances, Yanis Varoufakis, et ses homologues de la zone euro, après des échanges à distance qui ont surtout illustré les divergences de vue entre les deux camps sur l'aide à la Grèce.

Le gouvernement formé par Alexis Tsipras après la victoire du parti de gauche anti-austérité Syriza aux élections législatives anticipées du 25 janvier s'est dit prêt à tenir ses positions face à l'Allemagne et aux alliés de celle-ci afin d'en finir avec la tutelle de la "troïka" (Union européenne, Banque centrale européenne et Fonds monétaire international) et d'obtenir une renégociation de la dette de son pays.

"Si une dette ne peut plus être remboursée, alors cela conduit à une décote (haircut)", a dit Yanis Varoufakis au magazine allemand Stern, dans une interview parue mercredi. "L'élément essentiel, c'est que la dette de la Grèce ne peut pas être remboursée dans un avenir proche."

Mardi, le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, a jugé que si Athènes refusait de demander une prolongation du plan d'aide en cours, alors "tout sera fini", excluant de facto une réduction de la dette ou une nouvelle forme d'aide.

Lui et les autres ministres de la zone euro attendent de Yanis Varoufakis qu'il leur présente ses propositions lors de la réunion prévue à 17h30, avant le Conseil européen des chefs d'Etat et de gouvernement jeudi. Mais aucun des participants n'imagine que les discussions aboutiront en quelques heures à un compromis.

"Nous allons écouter les projets du nouveau gouvernement grec et voir sur quelle base nous pouvons continuer notre soutien à la Grèce", a dit le président de l'Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem, à son arrivée à Bruxelles. "Je ne m'attends pas à un résultat aujourd'hui, ce n'est que le début de nos discussions, nous avons un autre Eurogroupe prévu lundi prochain. Nous avancerons pas à pas."

Auparavant, un responsable allemand avait expliqué qu'aucune décision concrète sur le dossier de la dette grecque ne pourrait être adoptée lors du Conseil européen de jeudi, toute proposition économique présentée par Athènes devant être soumise à la "troïka".

POSTURES

L'incertitude sur l'issue des pourparlers pèse sur les marchés grecs. La Bourse d'Athènes perdait 4% en fin de séance et les rendements des obligations d'Etat étaient de nouveau en hausse, à plus de 21% pour l'échéance 2017 et près de 11% pour les titres à dix ans. L'indice des valeurs bancaires grecques cédait quant à lui 5%.

En théorie, un échec des discussions est susceptible de conduire en quelques semaines la Grèce à un défaut et à une sortie forcée de la zone euro, un "Grexit" dont les retombées pourraient être très lourdes pour l'ensemble de la zone euro.

Mais la plupart des observateurs croient encore à un compromis d'ici la fin du mois, malgré les postures des principaux protagonistes.

"Une fois de plus, le nouveau gouvernement grec d'un côté et la 'troïka' de l'autre jouent à celui qui cèdera le premier à la peur", explique Robert Bergqvist, chef économiste de la banque suédoise SEB. "Notre scénario favori implique un compromis qui apaisera les craintes actuelles des marchés financiers."

Yanis Varoufakis a évoqué la possibilité d'une période de transition de six mois prévoyant un relèvement du plafond d'émissions de bons du Trésor imposé à son pays, le paiement des profits réalisés par la BCE et les banques centrales nationales sur leurs avoirs en dette grecque et le déblocage des ressources non utilisées du fonds de sauvetage du secteur bancaire grec.

Cette période serait consacrée à une renégociation globale de la dette publique, qui dépasse 320 milliards d'euros, soit 175% du produit intérieur brut (PIB), ce qui pourrait conduire à un échange des titres existants contre des obligations indexées sur le PIB ou des emprunts perpétuels, c'est-à-dire sans échéance fixée.

Du côté de la "troïka", on assure qu'Athènes ne peut espérer au mieux qu'un rééchelonnement de la dette existante, une diminution des taux d'intérêt et un moratoire sur le service de la dette, en échange d'engagements fermes sur des réformes et de l'acceptation d'une supervision extérieure.

(avec Lefteris Papadimas, Angeliki Koutantou et Deepa Babington à Athènes, Caroline Copley à Berlin, Marc Angrand pour le service français)