Fillon exigera des gestes concrets de la Russie, annonce Le Maire

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(Crédits : Pool)

par Ingrid Melander et Emmanuel Jarry

PARIS (Reuters) - S'il est élu président, François Fillon exigera des "gestes concrets" de Moscou avant d'envisager une levée des sanctions imposées à la Russie pour son rôle dans la crise ukrainienne, dit son conseiller pour l'international, Bruno Le Maire.

Le candidat de la droite à l'élection présidentielle s'est distingué jusqu'à présent par des positions pro-russes, que son adversaire malheureux de la primaire, Alain Juppé, a même taxé de "complaisance excessive" à l'égard de Vladimir Poutine.

Longtemps considéré comme le favori de la présidentielle, l'ex-Premier ministre est aujourd'hui fragilisé par les soupçons d'emplois fictifs dont aurait bénéficié sa famille.

Lancé dans une délicate tentative de reconquête de l'opinion française, il a laissé le soin à Bruno Le Maire, autre ancien rival de la primaire de droite, d'aller ce week-end défendre son projet à la conférence internationale sur la sécurité de Munich.

"Un des choix stratégiques de François Fillon est de renforcer le lien et de renouer un dialogue constructif avec la Russie", explique Bruno Le Maire dans une interview à Reuters.

"Ça ne veut pas dire que nous passons l'éponge sur les fautes qui ont pu être commises par la Russie", précise-t-il cependant. "Nous estimons que le fait de violer des frontières internationalement reconnues constitue une faute politique."

François Fillon défend l'idée d'un "espace de sécurité" européen englobant à terme la Russie, pour pallier les lacunes de l'Otan, la volonté de désengagement affichée par le nouveau président américain Donald Trump et l'obsolescence de l'OSCE(Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe).

Il n'en demandera pas pour autant, s'il est élu, une levée immédiate des sanctions économiques imposées à Moscou, déclare son conseiller pour les affaires internationales.

"Les sanctions n'ont pas vocation à durer éternellement. Donc notre objectif est d'arriver à obtenir de la Russie des gestes concrets, notamment en matière de démilitarisation du Donbass, qui permettraient de les lever", explique-t-il.

"Il y a des soldats russes dans le Donbass. Nous attendons de la Russie qu'elle les retire", précise Bruno Le Maire.

CRIMÉE, UNE QUESTION "À PART"

Cette région de l'est de l'Ukraine est le théâtre de heurts meurtriers entre séparatistes pro-russes et forces ukrainiennes, accrochages dont Moscou et Kiev se renvoient la responsabilité.

François Fillon s'est aussi rallié à l'idée que le processus diplomatique dit "Normandie", qui réunit France, Allemagne, Russie et Ukraine pour tenter de trouver une solution à la crise ukrainienne, "est le bon format".

En revanche, la Crimée, annexée par la Russie, qui exclut la restitution à l'Ukraine, "est un sujet particulier qu'il vaut mieux laisser à part pour le moment", précise son conseiller.

Bruno Le Maire assure que l'"incompréhension" qu'il pouvait y avoir avec l'Allemagne sur les sanctions a été dissipée lors de la visite de François Fillon à Berlin en janvier, même s'il admet une "différence de perception" sur la menace russe.

François Fillon souhaite relancer la construction européenne en réactivant le couple franco-allemand.

Il propose une harmonisation de l'impôt sur les sociétés en cinq ans et un gouvernement économique dans la zone euro, et se dit ouvert à l'idée d'un Fonds monétaire européen proposé par le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, pour faire face à d'éventuelles crises. Il n'envisage cependant pas à court terme de proposer un nouveau traité européen.

"Nous estimons que dans la situation de fragilité où se trouve l'Europe aujourd'hui, nous avons besoin d'avancer vite et de manière pragmatique", explique Bruno Le Maire. "François Fillon n'exclut pas une modification des traités à terme mais nous pensons que ça ne peut pas être un point de départ."

Les Allemands sont opposés à la mise en chantier d'un nouveau traité. Bruno Le Maire admet aussi l'existence de divergences entre François Fillon et la chancelière Angela Merkel sur la question des réfugiés.

En revanche, il assure que les dirigeants allemands ont "parfaitement conscience" qu'il sera impossible pour François Fillon de respecter les contraintes européennes en matière de déficits publics en 2017 tout en engageant les réformes promises par le candidat de droite.

(Edité par Yves Clarisse)