Les démissionnaires pourraient coûter un milliard à l'Unedic

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PARIS (Reuters) - L'intégration des démissionnaires à l'assurance chômage pourrait coûter 200 millions à un milliard d'euros pour des droits limités à six ou huit mois, selon des chiffrages de l'Unedic commandés par l'Etat mais décriés par les partenaires sociaux.

Les organisations patronales et syndicales se rencontraient jeudi pour une nouvelle séance de négociations sur l'assurance chômage, deuxième chantier social du quinquennat d'Emmanuel Macron après celui du Code du travail.

Dans sa réforme, le gouvernement souhaite notamment ouvrir l'assurance chômage "tous les cinq ou sept ans" aux démissionnaires qui ont un projet professionnel.

Le coût total d'une telle mesure serait de 550 millions d'euros la première année en cas de droits limités à six mois et réservés aux personnes ayant cotisé au moins deux ans sur les 28 derniers mois, et d'un milliard si les droits sont étendus à huit mois.

Dans le cas où les droits sont limités aux personnes ayant cotisé cinq ans au même poste, le coût serait de 200 millions d'euros la première année pour des allocations sur six mois, de 500 millions sur huit mois.

Selon ces hypothèses, les indemnisations ne sont pas plafonnées mais établies en fonction des critères actuels.

Pour les partenaires sociaux, ces chiffrages ne sont pas réalistes.

"Le gouvernement n'a travaillé que sur des droits dégradés", a déclaré Denis Gravouil, négociateur pour la CGT. "Ça, heureusement, pour l'ensemble des syndicats de salariés (...) il n'en est pas question".

La semaine dernière, les organisations syndicales et patronales se sont entendues pour loger à la même enseigne les nouveaux et anciens bénéficiaires de l'assurance chômage.

Ils ne comptent donc pas limiter les indemnisations des démissionnaires, comme le réclame le gouvernement dans sa feuille de route.

DE NOMBREUX EFFETS D'AUBAINE

Pour le président du pôle social du Medef, Alexandre Saubot, les chiffres montrent que la mesure, telle qu'envisagée par le gouvernement, crée de nombreux "effets d'aubaine".

Elle bénéficierait selon lui davantage à des personnes ayant déjà démissionné (entre 45.000 et 85.000 selon l'Unedic) qu'à des personnes qui démissionneraient pour se lancer dans un projet professionnel (entre 30.000 et 60.000 en vitesse de "croisière").

"On ne peut pas dire qu'on favorise les transitions dans le marché du travail si le comportement est identique", a-t-il ajouté.

Pour la secrétaire générale adjointe de la CFDT, Véronique Descacq, les critères choisis ne "semblent pas pertinents" car ils suscitent des effets "indésirables en terme de ciblage de population" et de "sécurisation des parcours".

Les partenaires sociaux précisent que ces chiffres ne tiennent pas compte du critère d'intégration principal dans le régime: la nécessité d'avoir un projet professionnel. Ils entendent donc définir cette notion avant de réclamer leurs propres estimations à l'Unedic.

Pour Eric Courpotin, négociateur pour la CFTC, l'instance la mieux habilitée pour valider un projet professionnel serait le Conseil en évolution professionnelle (CEV), un dispositif d'accompagnement assuré notamment par des conseillers de Pôle emploi.

Les organisations syndicales mettent toutefois en garde contre le risque d'utiliser ce nouveau dispositif pour financer des formations, sachant qu'il existe déjà un programme pour permettre des reconversions professionnelles tout en gardant son emploi.

"La formation peut être un élément pour aboutir à un projet professionnel mais il n'est pas question qu'un salarié vienne à démissionner pour avoir accès à une formation", a dit Eric Courpotin.

Pour la CFDT, la CFTC et FO, les projets professionnels devront être validés avant la démission pour éviter ce genre de dérive.

(Caroline Pailliez, édité par Julie Carriat)