L'opposition doute de la pertinence des frappes en Syrie

reuters.com  |   |  709  mots
L'opposition doute de la pertinence des frappes en syrie[reuters.com]
(Crédits : Charles Platiau)

PARIS (Reuters) - Droite, Front national, communistes et France insoumise ont émis des doutes lundi sur la pertinence des frappes françaises en Syrie, relevant les risques d'escalade d'une opération "dont l'utilité reste à démontrer", ont jugé Les Républicains (LR).

Conformément à la Constitution, l'opération militaire menée dans la nuit de vendredi à samedi contre des sites syriens par la France, le Royaume-Uni et les Etats-Unis a fait l'objet d'une information du Parlement, où s'est tenu un débat sans vote.

L'occasion pour les groupes d'opposition d'exprimer leurs désaccords avec cette démarche, approuvée par les partis alliés du parti présidentiel La République en marche ainsi que par le groupe Nouvelle gauche, issu du Parti socialiste.

"L'utilité des frappes françaises en Syrie reste à démontrer", a dit le chef de file des élus LR, Christian Jacob.

"En intervenant sans mandat, nous craignons que la France se soit encore un peu plus isolée dans cette région du monde où pourtant ses liens auraient pu lui permettre de jouer un rôle à la mesure de son Histoire".

"C'est pour nous, M. Le Premier ministre, une occasion manquée", a ajouté Christian Jacob à l'adresse d'Edouard Philippe, qui avait ouvert les débats.

Lundi soir sur France 2, le président de LR, Laurent Wauquiez, a estimé qu'Emmanuel Macron n'avait pas de stratégie "ni pour gagner la guerre, ni pour établir la paix".

"Les frappes aériennes, oui, mais à condition qu'il y ait une stratégie derrière. Je ne vois pas aujourd'hui cette stratégie", a-t-il dit, déplorant que le chef de l'Etat n'ait pas évoqué dans ses récentes interventions télévisées le sort des chrétiens d'Orient ni celui des Kurdes.

A l'Assemblée, le président de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon s'est quant à lui inquiété des mesures prises "pour éviter l'escalade".

"C'est la seule chose qui compte quand vous frappez de savoir jusqu'où vous devrez encore frapper. Et là je dis 'c'est le pire nid de frelons'", a-t-il lancé.

"EST-CE QUE CES FRAPPES VONT CONTINUER ?"

Dépourvue d'un groupe à l'Assemblée, la présidente du Front national, Marine Le Pen, a exprimé devant la presse au Palais-Bourbon des inquiétudes similaires.

"Aujourd'hui nous sommes confrontés à des conséquences que nous ne connaissons pas. Est-ce que ces frappes vont continuer ?", a-t-elle demandé.

"Emmanuel Macron a pris la décision d'effectuer des frappes sans aucun accord de la communauté internationale. Il a, en cela, violé le droit international auquel il essaie de substituer une notion éminemment vague qui serait une forme de légitimité internationale", a-t-elle fait valoir.

Comme elle, nombre d'opposants ont reproché au chef de l'Etat et à ses alliés d'avoir agi sans mandat de l'Onu.

"En ce qui concerne le concert des Nations, nous croyons à un monde ordonné", a dit Jean-Luc Mélenchon. "C'est fini le temps où, à quelques pays, on pouvait décider pour tout le monde !"

Au nom du groupe de la gauche démocrate et républicaine, le député communiste Jean-Pierre Lecoq a invité Emmanuel Macron à se rapprocher de Moscou pour trouver une solution au drame syrien.

"Moscou n'a pas fermé la porte à un dialogue direct avec la France, y compris dans le cadre d'une visite officielle du chef de l'Etat à Saint-Pétersbourg fin mai", a-t-il dit.

Dans son propos liminaire, comme dans sa réponse aux intervenants, Edouard Philippe a assuré que toutes les précautions avaient été prises pour "éviter toute escalade".

"Notre riposte était amplement justifiée dans ses causes, dans ses modalités, elle a été soigneusement proportionnée, des objectifs exclusivement liés au programme chimique, exclusivement syriens, elle a été ciblée pour éviter les dommages aux civils et conçue de façon à éviter toute escalade", a-t-il assuré. "Le risque et le coût de l'inaction étaient plus grands encore pour notre avenir".

"Je ne mésestime nullement la complexité de la situation au Levant, elle impose nuances, prudence et réflexion, mais cette complexité ne condamne ni à l'inaction ni à l'impuissance face à une violation aussi flagrante des principes qui fondent notre vie en commun", a insisté le chef du gouvernement.

(Elizabeth Pineau et Marine Pennetier, édité par Yves Clarisse)