Le taux du livret A ne pourra descendre sous 0,5%

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Vers un taux plancher de 0,5% pour le livret a, declare le maire[reuters.com]
(Crédits : Dado Ruvic)

PARIS (Reuters) - Le gouvernement a annoncé jeudi une nouvelle méthode de calcul du taux du livret A présentée comme plus simple et mieux adaptée aux conditions économiques mais qui, si elle était mise en oeuvre aujourd'hui, ferait passer la rémunération du produit d'épargne le plus populaire sous le niveau de l'inflation.

Pour en contenir l'impact sur ses 55,8 millions de détenteurs et leurs 276 milliards d'euros d'épargne, la réforme, qui s'appliquera à compter de 2020, fixera un plancher inamovible de 0,5% pour le livret A.

Elle s'accompagnera aussi d'une refonte du taux du Livret d'épargne populaire (LEP) réservé aux catégories les plus modestes, actuellement de 1,25%, qui ne pourra lui tomber sous celui de l'inflation, a-t-on appris auprès du ministère de l'Economie et des Finances.

Concrètement, le taux du livret A, révisable tous les semestres et qui s'applique aussi au Livret de développement durable et solidaire (LDDS), sera à l'avenir la moyenne de l'inflation hors tabac et des taux interbancaires au jour le jour (Eonia) lissés sur six mois pour en limiter les à-coups.

De plus, ses ajustements, qui continueront d'être proposés par le gouverneur de la Banque de France avec possibilité d'y déroger dans des "circonstances exceptionnelles", pourront se faire au dixième et non plus au quart de point comme c'est le cas actuellement.

"Je veux une règle beaucoup plus simple de calcul de ce taux, ce sera la moyenne du taux d'inflation et des taux d'intérêt", a déclaré jeudi matin sur BFMTV Bruno Le Maire.

"Je souhaite surtout qu'on mette un taux plancher qui sera 0,5% pour garantir aux millions d'épargnants qui ont un Livret A que (...) la rémunération du Livret A ne baissera jamais en dessous de 0,5%", a ajouté le ministre de l'Economie et des Finances.

Il a confirmé dans le même temps le gel sur 2018-2019, annoncé à l'automne dernier, du taux du Livret A et du LDDS à 0,75%, niveau historiquement bas auquel il est fixé depuis août 2015.

UNE QUESTION POLITIQUE TRÈS SENSIBLE

Par comparaison, le nouveau mode de calcul le situerait aujourd'hui à un niveau inférieur (0,4%), en fonction d'une inflation hors tabac de l'ordre de 1,1% sur les six derniers mois et un taux Eonia de -0,36% à -0,37%.

Les précédentes formules de calcul, la dernière remontant à 2016, prenaient en compte l'inflation hors tabac et les taux monétaires et interbancaires, mais avec une garantie d'une rémunération supérieure à l'inflation dans une proportion allant jusqu'à 0,25 point.

Les taux à court terme étant en territoire négatif depuis 2015 sous l'influence de la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE), le rythme de l'inflation était ces dernières années de facto le seul facteur pris en compte.

Le gouverneur de la Banque de France de l'époque, Christian Noyer, s'est plaint à plusieurs reprises que le niveau élevé de rémunération du livret A par rapport à celui des autres actifs financiers fasse obstacle à la transmission de la politique très accommodante de la BCE et renchérisse le coût des logements sociaux que cette épargne sert à financer.

Son gel a été décidé l'automne dernier par le gouvernement pour venir en aide au secteur, en contrepartie de la baisse très décriée des loyers imposée aux organismes d'habitat social pour compenser celle des aides publiques à leurs locataires.

Dans un communiqué, Bercy a chiffré à environ 675 millions d'euros par an la baisse des charges pour les acteurs du secteur permise par la nouvelle donne pour le livret A dans l'environnement actuel.

Il ajoute que le gouvernement va demander aux banques d'accentuer la promotion du LEP, un produit que 8,9 millions de Français possèdent, "de manière à ce que toutes les personnes éligibles, qui représentent près de 40% de la population, puissent en disposer."

Depuis la grande vague de baisse de l'inflation des années 1990, le taux du livret A est devenu une question politique très sensible qui s'est exarcerbée avec le passage d'une bonne partie des taux d'intérêt en territoire négatif ces dernières années.

Les gouvernements successifs ont tenté de la circonscrire en instaurant à partir de 1999 une formule de calcul censée faciliter leur fixation mais qu'ils ont modifiée depuis à plusieurs reprises, invoquant la nécessité de protéger l'épargne populaire et ce, sans les suivre systématiquement.

(Myriam Rivet et Yann Le Guernigou, édité par Yves Clarisse)