Le projet de loi asile et immigration adopté en première lecture

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Le projet de loi asile et immigration adopte en premiere lecture[reuters.com]
(Crédits : Benoit Tessier)

par Julie Carriat

PARIS (Reuters) - Les députés ont adopté dimanche en première lecture le projet de loi pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie après d'intenses débats et en dépit des germes de divisions semés au sein du parti présidentiel par ce texte, vu par les acteurs de terrain comme une régression.

Au total, 228 députés ont voté pour, 139 contre et 24 se sont abstenus, au terme de plus de soixante heures de débats, qui ont dépassé de deux jours le calendrier initial.

Au sein de la République en marche, 197 députés ont voté pour le texte, 14 se sont abstenus et un député a voté contre: l'élu de la Vienne Jean-Michel Clément, seul membre de la petite minorité du pôle social de LaRem à mettre à exécution ses menaces d'opposition face aux mises en garde de son chef de file Richard Ferrand.

"Afin d'éviter que mon vote nourrisse quelques interprétations ambiguës ou farfelues, d'où qu'elles viennent, j'ai décidé de me mettre en congé du groupe parlementaire La République en marche à compter de ce jour", annonce-t-il dans un communiqué.

"Je ne suis pas sûr que nous envoyions aux citoyens du monde le message universaliste qui a toujours été le nôtre", justifie-t-il.

L'entourage de Richard Ferrand avait laissé entendre que des abstentions seraient tolérées mais qu'un vote contre aurait des conséquences.

Le groupe Modem a voté en majorité en faveur du texte (16 pour, un contre et huit abstentions) tout comme UDI, Agir et indépendants (15 pour, un contre, deux abstentions).

Les Républicains et le Front National, à droite, et la Nouvelle Gauche, le groupe La France insoumise et les communistes (GDR), à gauche, ont voté contre le texte.

Le ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb, s'est félicité de cette adoption qui s'inscrit selon lui dans "dans la continuité des objectifs définis par le Président de la République", Emmanuel Macron.

MODIFICATIONS À LA MARGE

Les modifications à la marge de la commission des Lois sur l'allongement de la durée de rétention à 90 jours et non 135 (contre 45 actuellement) ou la suppression des pays pénalisant l'homosexualité de la liste des pays sûrs, ont été validées par les députés.

Le Front national a voté pour certains articles, permettant notamment la réduction du délai de dépôt de la demande d'asile et la possibilité de rétention en cas de demande d'asile déposée après une décision d'expulsion, ainsi que certains amendements défendus par la majorité.

"Ce texte n'a pas été écrit pour séduire le Front national, et vous savez très bien que le Front national adopte des tactiques pour, précisément, déstabiliser l'ensemble de notre système républicain", s'est défendue dimanche sur France Inter la ministre de la Justice Nicole Belloubet, face aux accusations de la gauche qui a fustigé une "collusion entre la droite, l'extrême-droite et la majorité", selon les termes de Laurence Dumont (Nouvelle Gauche).

En séance, au titre des concessions aux sensibilités sociales de la majorité, un amendement aménageant la possibilité de travailler dès six mois suivant la demande d'asile contre neuf actuellement a été adopté, ainsi qu'un élargissement des exceptions aux poursuites pénales en cas d'aide au séjour illégal des étrangers, dit "délit de solidarité".

Sur la rétention des mineurs, que certains députés y compris de LaRem demandaient d'interdire, aucun changement n'a été acté ; la question a cependant été confiée à un groupe de travail.

"Le Gouvernement a entendu les inquiétudes de quelques-uns et s'est engagé à travailler sur les conditions de rétention, qui doivent être adaptées, et sur une durée qui soit la plus brève possible. Ainsi, un groupe de travail sera organisé avec les députés pour continuer la réflexion sur ce sujet", a dit Gérard Collomb dans son communiqué.

Le texte du projet de loi est désormais attendu courant juin au Sénat.

(édité par Nicolas Delame)