La réunification, pas la priorité pour les Coréens du Sud

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La reunification, pas la priorite pour les coreens du sud[reuters.com]
(Crédits : Jorge Silva)

par Christine Kim

SEOUL (Reuters) - Alors que la Corée du Nord et la Corée du Sud tiendront vendredi leur premier sommet depuis plus de dix ans, de nombreux Sud-Coréens ont revu durant cette décennie leurs attentes à la baisse, privilégiant la paix à la réunification.

Cette détente dans la péninsule coréenne, considérée comme propice à une éventuelle réunification - surtout dans la communication de Pyongyang-, est l'occasion pour le président sud-coréen Moon Jae-in d'oeuvrer à un objectif plus pragmatique, la réconciliation.

Pour de nombreux Sud-Coréens, l'hypothèse d'une réunification s'est éloignée, au point de devenir irréaliste, depuis la fin de la guerre de Corée il y a 65 ans.

Plusieurs décennies de provocations et de menaces militaires, ainsi que les programmes balistique et nucléaire menés par le Nord, ont fini de creuser de profondes divisions.

En marge de savoir comment l'autocrate Kim Jong-un et son régime pourraient s'adapter à une Corée unifiée, les Sud-Coréens estiment qu'ils ont davantage à perdre qu'à gagner avec une réunification, le Sud étant devenu la quatrième plus grande économie d'Asie alors que le Nord est frappé par la pauvreté.

"La Corée du Sud s'est hissée à la hauteur des pays développés, après avoir été l'un des plus pauvres au monde, grâce au sang et à la sueur de la génération de nos parents", a déclaré Park Jung-ho, 35 ans, employé de bureau à Séoul.

"Avec la réunification, tout redeviendrait comme avant lorsque nous étions un pays en développement", a-t-il ajouté.

Selon un rapport annuel de l'université nationale de Séoul, le pourcentage de Sud-Coréens se prononçant en faveur de la réunification a baissé depuis 2007, année de publication du premier rapport et du dernier sommet intercoréen en date.

L'année dernière, 53,8% des Sud-Coréens interrogés disaient considérer la réunification comme "nécessaire", contre plus de 63% en 2007.

Un sondage trimestriel du Conseil consultatif de l'unification sud-coréen, publié en mars, montre que 50,3% des personnes interrogées estiment que la dénucléarisation doit être la question prioritaire du sommet intercoréen. Pour 36,8%, la priorité est l'apaisement des tensions militaires.

Parmi les Sud-Coréens les plus âgés, la préférence va plutôt à la réunification, certains ayant le souvenir de ce à quoi la Corée unifiée ressemblait.

"Nous sommes le même peuple, avec le même langage. Bien sûr qu'il faut s'unifier", a dit Kim Yong-cheol, 89 ans.

"Pourquoi devrions-nous, en tant que peuple unique, vivre comme des ennemis ? Il faut juste que l'on se pardonne un peu", a ajouté ce vétéran de la guerre de Corée.

Kown Tae-yun, 54 ans, se prononce en faveur de la réunification, tout en estimant qu'elle aurait un prix.

"Nous pourrions davantage voyager, prendre le train vers la Chine, et même aller en Europe", a dit ce directeur d'une entreprise. "Mais nous ne toucherons vraisemblablement pas notre retraite, et je vais devoir cultiver des pommes de terre à la campagne."

(Avec Hyunyoung Yi, Jean Terzian pour le service français)