Air France : Grève encore en mai, Edouard Philippe soutient le PDG

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(Crédits : Philippe Wojazer)

par Cyril Altmeyer

PARIS (Reuters) - L'intersyndicale d'Air France, qui regroupe toutes les catégories professionnelles de la compagnie, a annoncé jeudi appeler à la grève les 3, 4, 7 et 8 mai, s'alignant une nouvelle fois sur le calendrier de la SNCF où les arrêts de travail sont prévus les 3, 4, 8 et 9 mai.

Cet appel à la grève de dix organisations syndicales de pilotes, hôtesses, stewards et personnels au sol intervient le jour même du début de la consultation lancée par la direction jusqu'au 4 mai sur son projet d'accord salarial rejeté le 16 avril par cette même intersyndicale.

Face à la convergence des luttes dans les transports, le Premier ministre Edouard Philippe a salué jeudi la position "courageuse" de Jean-Marc Janaillac, président d'Air France et PDG d'Air France-KLM, qui a mis son poste en jeu en cas de rejet du référendum.

La direction d'Air France espère convaincre la majorité non gréviste d'accepter l'accord salarial rejeté par l'intersyndicale pour enrayer un conflit social jugé dévastateur par toutes les parties.

"Je me dis que si (...) la consultation qu'il a organisée, ne donnait pas les résultats qu'il espérait et s'il en tirait les conséquences, j'inciterais volontiers tout le monde à boucler sa ceinture de sécurité, parce que les turbulences, à mon avis, ne seraient pas minimales", a déclaré Edouard Philippe sur Europe 1.

Le chef du gouvernement a invité les salariés à mesurer le sérieux de la situation et jugé que "chacun" devait prendre ses responsabilités.

"Une entreprise qui verrait son patron partir dans ces conditions, je ne suis pas sûr qu'elle serait en bonne position pour affronter la suite", a-t-il encore déclaré.

L'Etat français possède 14% du capital d'Air France-KLM, devant les compagnies Delta Air Lines et China Eastern qui ont chacune 9%, selon le document de référence du groupe.

Edouard Philippe, qui rencontrera le 7 mai les syndicats de la SNCF, a réaffirmé jeudi que l'ouverture du système ferroviaire à la concurrence, la réorganisation de la SNCF et la fin des embauches au statut étaient des principes non négociables.

REMONTÉE DU PRIX DU PÉTROLE

La direction d'Air France a dénoncé de son côté le nouvel appel à la grève qui s'ajoute aux 11 jours de grève depuis le 22 février dont elle estime le coût à environ 300 millions d'euros.

"J'adresse une nouvelle fois toutes nos excuses aux clients impactés par ces grèves", dit Jean-Marc Janaillac, cité dans un communiqué. "Elles sont d'autant plus incompréhensibles que la consultation de l'ensemble des salariés sur l'accord salarial proposé est ouverte depuis ce matin".

En portant le nombre de jours de grèves à 15, les syndicats mettent "encore plus en péril" la situation de la compagnie, dont la maison mère Air France-KLM publiera ses résultats trimestriels le 4 mai.

Le groupe franco-néerlandais a amélioré de 41,8% son bénéfice d'exploitation l'an passé à 1,488 milliard d'euros mais les analystes anticipent un tassement cette année à 1,409 milliard selon le consensus Thomson Reuters I/B/E/S, dans un contexte de concurrence accrue et de remontée des cours du pétrole.

Les cours du brut ont augmenté de 15% en quatre semaines pour atteindre 75 dollars le baril dans la crainte de nouvelles sanctions américaines le 12 mai contre l'Iran, majeur exportateur et membre de l'Opep, provoquant par ricochet une hausse du kérosène.

L'intersyndicale, qui regroupe FO, le SNPNC, la CGT, l'UNSA, le Spaf, le Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL), Alter, Sud, la CFTC et le SNGAF, réclame une hausse de 5,1% des salaires rien que pour cette année, tandis que la direction a proposé 2% d'augmentation en 2018 puis une hausse de 5% sur les trois années suivantes.

HAUSSE DES FRAIS DE PERSONNEL

Malgré les mesures de restructuration qui ont réduit les dépenses en salaires, les frais totaux de personnel d'Air France-KLM ont augmenté en 2017 à 7,624 milliards d'euros, soit beaucoup plus que les carburants (4,507 milliards). Le groupe employait 83.522 personnes au 31 décembre, dont 7.746 pilotes.

"Les dirigeants leurrent les salariés sur les conséquences de la consultation", écrit l'intersyndicale dans un communiqué. "Pour sortir d'un conflit, il faut se mettre d'accord, donc il faut négocier".

Les négociations avec les syndicats de pilotes, qui se sont poursuivies vendredi et samedi, sont elles aussi au point mort, a dit à Reuters Grégoire Aplincourt, président du Syndicat national des pilotes d'Air France (Spaf).

"Tous les pilotes du monde ont été réévalués", souligne-t-il. "Il y a un marché mondial qui veut que nous sommes les moins payés".

Lufthansa, principale concurrente d'Air France-KLM avec le groupe britannique IAG (British Airways-Iberia), a annoncé de son côté jeudi une croissance plus faible que prévu de ses bénéfices trimestriels, pénalisée par les coûts de développement de sa compagnie à bas coûts Eurowings sur fond de consolidation en Europe.

L'action du groupe allemand chutait ainsi de 6,87% vers 13h40, contre un recul de 1,99% pour Air France-KLM et une baisse de 0,1% d'IAG à la même heure.

(Avec Emmanuel Jarry et Benjamin Mallet, édité par Gwénaëlle Barzic)