La croissance mondiale menacée par les tensions commerciales, selon le FMI

reuters.com  |   |  744  mots

PARIS (Reuters) - La croissance de l'économie mondiale reste solide mais est moins équilibrée que dans un passé récent et pourrait rapidement accuser le coup si les menaces sur le commerce mondial se concrétisent, estime le Fonds monétaire international.

Dans leurs perspectives économiques d'été publiées lundi, les économistes du FMI ne changent rien à leurs prévisions globales du printemps, à savoir une croissance mondiale qui atteindrait 3,9% cette année comme en 2019, après 3,7% en 2017.

"Mais nous jugeons que le risque d'un résultat plus mauvais a augmenté, même pour le court terme", a déclaré Maurice Obstfeld, chef économiste du Fonds.

Pour lui, la principale menace est une poursuite de l'escalade des tensions commerciales initiées par les Etats-Unis, avec son impact sur la confiance des acteurs économiques, la valorisation des actifs et l'investissement.

Elle le conduit à revoir en baisse ses prévisions de croissance du commerce mondial à 4,8% cette année puis 4,5% en 2019, soit respectivement 0,3 et 0,2 point de moins par rapport aux perspectives d'avril.

Le FMI estime que le PIB mondial pourrait être amputé de l'ordre de 0,5 point d'ici à 2020 par rapport aux anticipations actuelles si les menaces de hausses de droit de douanes de l'administration Trump et de représailles des pays visés étaient suivies d'action.

"Les Etats-Unis, en tant que cible de représailles globales, verraient une proportion relativement élevée de leurs exportations taxées sur les marchés mondiaux dans une telle guerre commerciale élargie, et ils y seraient donc particulièrement vulnérables", avertit Maurice Obstfeld.

LE FMI MOINS OPTIMISTE POUR LA ZONE EURO

En attendant, le FMI voit toujours la croissance américaine progresser à 2,9% cette année (contre 2,3% en 2017) grâce aux effets de la réforme fiscale votée fin 2017, puis se tasser à 2,7% l'an prochain. Il précise que ce scénario n'intègre pas l'impact des dernières annonces douanières de l'administration Trump contre la Chine faites le 10 juillet.

Mais il revoit en baisse ses prévisions pour la zone euro, à 2,2% (-0,2 point) cette année et 1,9% (-0,1 point) en 2019 pour tenir compte du trou d'air des économies européennes cet hiver.

Cette révision est due pour l'essentiel à l'Allemagne et à la France, pour lesquelles le Fonds n'escompte plus respectivement que 2,2% et 1,8% de croissance cette année, soit dans les deux cas 0,3 point de moins qu'il n'attendait encore au printemps.

Il relève néanmoins de 0,1 point, à 2,1%, sa prévision pour l'Allemagne en 2019 mais abaisse encore de 0,3 point celle pour la France l'an prochain, à 1,7%.

Le FMI est aussi moins optimiste pour l'Italie, avec des attentes à 1,2% (-0,3 point) cette année et 1,0% (-0,1 point) en 2019, estimant que l'environnement financier plus difficile, avec la remontée des taux d'intérêt liée aux incertitudes sur la politique du nouveau gouvernement, devrait peser sur la demande.

RECRÉER DES MARGES DE MANOEUVRE BUDGÉTAIRES

Les prévisions pour les croissances britannique (-0,2 point à 1,4%) et japonaise (-0,2 point à 1,0%) sont également abaissées pour 2018.

Au vu de la situation, le FMI estime que la croissance semble avoir atteint un plafond dans les économies occidentales, hors Etats-Unis pour l'instant, après la forte accélération de 2016-2017.

S'agissant des économies émergentes, il entrevoit une croissance également moins équilibrée, avec le pétrole plus cher, la hausse des taux d'intérêt américains, les tensions commerciales et les pressions des marchés sur les devises des pays dont les fondamentaux sont les plus faibles.

Pour ces raisons, les économistes du fonds ont relevé leurs prévisions pour les producteurs d'or noir mais abaissé sensiblement leurs anticipations pour le Brésil et l'Argentine.

Ils tablent toujours sur 6,6% de croissance en Chine cette année et 6,4% l'an prochain, mais n'attendent plus que 7,3% (-0,1 point) en Inde en 2018 et 7,5% (-0,3 point) en 2019.

Pour l'institution de Bretton Woods, "éviter des mesures protectionnistes et trouver ensemble des solutions qui favorisent la progression continue des échanges de biens et services demeurent essentiels pour préserver la croissance globale".

Le Fonds recommande toujours la mise en oeuvre par les gouvernements de réformes structurelles favorables à la croissance à moyen terme.

Mais il juge aussi, dans le contexte actuel de montée des risques, que de nombreux pays doivent se recréer des marges de manoeuvre budgétaires en prévision du prochain retournement de cycle et afin de renforcer leur solidité financière dans un environnement de marchés potentiellement plus volatil.

(Yann Le Guernigou, édité par Marc Joanny)