Les syndicats sur leurs gardes face à la "séquence" sociale de Macron

reuters.com  |   |  892  mots
Macron veut une autre sequence sociale et rassure sur le chomage[reuters.com]
(Crédits : Gonzalo Fuentes)

PARIS (Reuters) - Emmanuel Macron a souhaité mardi ouvrir une "autre séquence" sociale après un an de réformes à marche forcée accompagnées par une forte contestation, une volonté de dialogue saluée par les syndicats, qui restent néanmoins sur leurs gardes.

Le président de la CPME, François Asselin, a dit avoir constaté "un vrai tournant" lors de la rencontre entre le chef de l'Etat et les organisations patronales et syndicales.

"Le président de la République a dit : 'dans la première année de mandat, il fallait débloquer certaines situations, je suis allé vite, c'était ma volonté, je l'assume et maintenant je passe dans une autre séquence où je vais - entre guillemets - avoir besoin de m'appuyer sur les partenaires sociaux, sur les corps intermédiaires'", a-t-il dit à des journalistes.

Pour ce faire, plusieurs rencontres bilatérales ainsi qu'une multilatérale sont prévues à la rentrée avec le Premier ministre, Edouard Philippe, et la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, pour discuter de l'ouverture de la nouvelle négociation sur l'assurance chômage, annoncée par Emmanuel Macron lors de son discours au Congrès.

Les partenaires sociaux pourront ainsi débattre avec l'exécutif pour établir la feuille de route de la négociation.

"Il s'agit bien de préparer cette lettre de cadrage et cette lettre de cadrage est tout à fait négociable", a précisé le président de la CFTC, Philippe Louis, à l'issue de la rencontre à l'Elysée.

Dans l'entourage du président de la République, on précise que les réunions bilatérales devraient se tenir dans le courant du mois de septembre et permettront d'abord de partager un diagnostic sur lequel se basera la lettre de cadrage. Les partenaires sociaux auront ensuite quatre mois pour négocier, ce qui fixe l'issue de la négociation à janvier-février.

BONUS-MALUS, PAS UN DOGME ABSOLU

L'idée de moduler les cotisations patronales pour limiter le recours au contrats de courte durée serait également toujours sur la table, selon cette source. Le bonus-malus pourrait encore être introduit par décret, comme c'était prévu dans le projet de loi réformant la formation professionnelle et l'assurance chômage, en cas d'échec des négociations.

Le président de l'U2P (syndicat des artisans), Alain Griset, a pourtant déclaré à l'issue de la rencontre que le chef de l'Etat ne considérait pas le bonus-malus comme "intangible", qu'il estimait que cet outil pouvait être utilisé "de façon marginal dans quelques branches par quelques entreprises". "Je ne crois pas qu'il veuille en faire un dogme absolu", a-t-il précisé.

Sur cette négociation, Philippe Louis dit que le chef de l'Etat ne prévoit "clairement pas" de faire baisser le chômage en réduisant les droits de demandeurs d'emploi ou la durée de leur indemnisation.

"Ce que nous lui avons fait préciser aujourd'hui, c'est quel était son état d'esprit, est-ce qu'il pensait qu'on résoudrait le problème du chômage en baissant les droits et en diminuant la durée d'indemnisation ?", a-t-il dit.

"Alors, clairement, ce n'est pas du tout ce qui est prévu, ce qui est vraiment prévu, c'est de donner plus de dynamisme à la recherche d'emploi, plus d'accompagnement vers les demandeurs d'emploi", a-t-il ajouté.

Dans l'entourage du président de la République, on ne garantit toutefois pas que des thèmes tels que le montant ou la durée des indemnisations ne seront pas abordés durant les discussions.

SUR LEURS GARDES

Les syndicats restent néanmoins sur leurs garde.

"Parfois (Emmanuel Macron) entend bien et ne change pas", a déclaré le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez.

Pour son homologue de FO, Pascal Pavageau, "si la forme s'améliore, c'est très bien. Maintenant il reste le fond". "L'ensemble de la politique visant à individualiser les droits collectifs ne nous va évidemment pas", a-t-il dit.

Laurent Berger précise que "la CFDT sera mobilisée pour faire en sorte que sur les sujets qui viennent, on aie des règles du jeu qui soient claires".

Les centrales syndicales se montreront attentives sur les réformes à venir, comme la refonte potentiellement explosive du régime des retraites prévue pour 2019 et la volonté de bâtir un "Etat-providence du 21e siècle".

Elles saluent toutefois le fait que le gouvernement décide de mettre à l'agenda social des thèmes qui leur sont chers tels que la santé au travail, sujet qui sera discuté en septembre ou octobre, selon la source à l'Elysée, ou encore les nouvelles formes de travail (avec le développement des plates-formes).

Les partenaires sociaux ont aussi souhaité qu'une discussion soit menée sur l'avenir du paritarisme par "quelqu'un de neutre", c'est-à-dire qui ne vienne ni des organisations syndicales ni des organisations patronales, selon cette source.

Cela ne les empêchera pas de continuer de travailler pour établir leur propre agenda économique et social, indépendant de l'agenda politique, disent les syndicats. Les partenaires sociaux se sont rencontrés à cette fin le 11 juillet.

Une rencontre identique avec les partenaires sociaux à l'Elysée aura lieu l'an prochain, "sans doute au printemps", a ajouté la source à l'Elysée.

(Jean-Baptiste Vey et Caroline Pailliez, édité par Yves Clarisse)